DossierPourquoi les KPI doivent-ils se conjuguer au pluriel ?
Productivité, création de valeur... L'époque où la durée moyenne de traitement des appels (DMP) faisait foi à elle seule est révolue. Le point sur les indicateurs les plus pertinents utilisés par 350 services clients avides de mesurer leurs performances.
Sommaire
- Comment se retrouver dans les indicateurs métiers?
- 1. Le temps de réponse
- 2. La durée moyenne de traitement (DMT)
- 3. Le taux de résolution au premier appel
- 4. La priorisation des demandes
- 5. Le taux de réclamation
- 6. NPS, CES, Csat: les indicateurs de satisfaction
- 7. Les indicateurs business
- 8. L'évaluation multicritère
- Du stratégique à l'opérationnel, les indicateurs-clés de la Maif
1 Comment se retrouver dans les indicateurs métiers?
2 1. Le temps de réponse
Les canaux vocaux demeurent les plus exigeants en termes de délai de réponse: il ne s'agit plus de décrocher vite, mais immédiatement. Pourtant, deux entreprises sur dix ne mesurent pas leur temps de réponse via le canal téléphonique, selon le Baromètre des KPI des services clients, et autant ne se fixent aucun objectif. Parmi les plus avancées d'entre elles, 67 % visent un temps de réponse inférieur à 30 secondes, soit 8 % de moins qu'il y a deux ans. Plus grave encore, nombre d'acteurs sont loin de tenir leurs engagements: 45 % des entreprises de plus de 1000 salariés affichent de piètres performances, supérieures à trois minutes, et moins de six sociétés sur 100 parviennent à décrocher en moins de 5 secondes. Une durée qui varie en fonction de la plage horaire.
Concernant l'e-mail, la majorité des clients s'attend à recevoir une réponse dans un délai de 24 heures, ainsi qu'un accusé de réception consécutif à l'envoi de sa demande, sur lequel apparaît le délai de traitement. Enfin, sur les réseaux sociaux, trois marques sur quatre s'engagent à répondre en quatre heures.
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Les indicateurs pour mesurer sa performance
3 2. La durée moyenne de traitement (DMT)
Longtemps considérée comme l'unique gage de performance des conseillers, la durée moyenne de traitement est remise en question. Le minutage accentue la pression sur les collaborateurs et frustre les clients. La DMT ne doit pas être considérée comme un outil de management, mais comme un outil d'aide à la planification. Huit entreprises sur dix (dont 100 % des centres de contacts) utilisent cette métrique. En moyenne, l'objectif (souvent tenu) s'élève à 4 minutes et 56 secondes via le canal téléphonique, tandis que la durée de traitement d'un e-mail ne dépasse pas 6 minutes et 17 secondes en moyenne.
4 3. Le taux de résolution au premier appel
Au premier abord, le "once and done" a toutes les qualités: reflet de l'efficacité opérationnelle, de la satisfaction client, de la qualité de service... Cependant, le risque de biais est très élevé: lorsqu'une personne appelle un service client, n'obtient pas de réponse suffisante et recontacte l'entreprise via un autre canal, cette réitération n'est pas comptabilisée. Il importe donc de s'assurer que la demande du client est bien traitée avec succès, sous peine de voir décroître le taux de satisfaction. En dépit de sa médiatisation, il s'agit d'une métrique peu utilisée. Seul un acteur sur quatre se fixe cet objectif pour le canal téléphonique, et 35 % pour une demande par e-mail ou par formulaire.
5 4. La priorisation des demandes
La classification des demandes dépend, en premier lieu, du niveau d'urgence ou de risque perçu par le conseiller. Viennent ensuite le motif de la demande, l'ordre d'arrivée des appels ou messages, la valeur du client (chiffre d'affaires généré) et, enfin, le canal utilisé. Une faible frange du panel d'entreprises interrogées dans le cadre du Baromètre des KPI (à peine plus de 6 sur 100) adopte, pour unique critère, l'ordre d'arrivée des sollicitations. En revanche, peu d'acteurs tiennent compte de l'éventuelle adhésion du client à un programme de fidélité ou de son historique de commandes. Prioriser certains consommateurs en fonction du contexte et de leur passé relationnel implique de savoir agréger les données afin de créer un "score multicritère", utilisé pour établir un ordre de passage.
6 5. Le taux de réclamation
Le taux de réclamation moyen atteint 30,8 % des demandes, selon le Baromètre des KPI, avec une grande variation en fonction des acteurs (il est particulièrement élevé dans la distribution, l'e-commerce et au sein des centres de contacts). Attention, cependant, un faible taux de réclamation n'implique pas nécessairement un excellent score en termes de satisfaction client.
En effet, la définition d'une réclamation varie fortement en fonction des entreprises. Une acception plus large permet de ne pas manquer une occasion de convertir des clients insatisfaits. Cet indicateur apparaît intrinsèquement lié à la fidélisation des consommateurs. La bonne prise en compte des réclamations s'avère un signe de la maturité des services clients.
7 6. NPS, CES, Csat: les indicateurs de satisfaction
Huit acteurs sur dix évaluent la satisfaction de leurs clients via des enquêtes réalisées à chaud, afin de définir trois indicateurs phares: le CES (customer effort score, soit la facilité avec laquelle un client a pu obtenir la résolution de son problème ou la satisfaction de sa demande), le Csat (réponse à "Avez-vous été satisfait ?") et, surtout, le NPS (taux de recommandation client). Le taux moyen de retour sur ces enquêtes post-contact s'élève à 37,5 % (il tombe à 25,4 % dans la distribution, l'e-commerce, les télécoms et l'énergie). Il ne faut pas systématiser ces process, car un client dont les commentaires n'ont pas été pris en compte finit par se lasser et ne plus répondre. Par ailleurs, le NPS est largement dénoncé, car il est considéré comme mauvais en dessous de 9/10 et entraîne des manoeuvres de triche de la part des points de vente et des agences. On doit veiller à ce qu'un outil de mesure ne devienne pas une cible à atteindre.
8 7. Les indicateurs business
Au-delà de la satisfaction, la contribution du service clients au business de l'entreprise doit, elle aussi, être mesurée. Pourtant, seuls 15 % des acteurs participant au Baromètre des KPI font état d'indicateurs de ce type (chiffre d'affaires généré par les ventes additionnelles, chiffre d'affaires sécurisé, taux de réabonnement, taux de réachat suite à un contact...). Si les services clients veulent être reconnus comme des centres de profit, il est important que leurs KPI ne soient pas tous liés à des centres de coûts.
9 8. L'évaluation multicritère
Le Top 5 des critères utilisés pour mesurer la performance d'une équipe de conseillers est le suivant, selon les entreprises interrogées dans le cadre du Baromètre des KPI: satisfaction du client, nombre de demandes traitées par jour, durée moyenne de traitement, taux de transformation suite à un contact avec le service clients et données récoltées dans le cadre d'une double écoute. Ainsi, si la satisfaction client se trouve désormais au centre des attentions, les KPI liés à une dimension purement quantitative demeurent très représentés, au détriment des indicateurs business. Un équilibre auquel il importe de réfléchir.
Les indicateurs sont issus du baromètre 2018 intitulé "Les chiffres-clés pour évaluer votre service clients", publié par Easiware, Hubicus, l'Amarc et le Blog de la relation client. Ce baromètre s'appuie sur les pratiques de quelque 350 services clients.
DMT, temps de réponse, taux de résolution au premier appel... Le point sur les indicateurs à suivre pour juger la performance d'un centre de contacts.
10 Du stratégique à l'opérationnel, les indicateurs-clés de la Maif
Quels sont les principaux KPI qui vous permettent de piloter votre relation sociétaire?
C. M.-C.: À la Maif, nous regroupons, au sein de la même direction, toutes les personnes en lien direct avec nos sociétaires (sur les volets conseil/vente et gestion de sinistres). Nos KPI concernent donc ces deux aspects. Nous avons un chaînage d'indicateurs qui va du stratégique à l'opérationnel. Par exemple, le taux d'engagement est un indicateur très stratégique pour nous, tandis qu'un collaborateur plus opérationnel sera davantage évalué via le CES ou le Csat.
Les indicateurs liés à l'efficacité sont-ils au centre de la gestion de la performance?
C. M.-C. : La Maif a un rapport au temps particulier: nous nous situons sur les moyen et long termes. Dans ce cadre, l'efficacité n'est pas perçue sous le même angle que chez d'autres opérateurs qui doivent, eux, rémunérer des actionnaires. La durée moyenne de traitement d'un appel, par exemple, est significative, mais aucun conseiller ou gestionnaire ne doit avoir en tête qu'un appel doit durer trois minutes. Nous ne gérons pas nos équipes via des normes, mais à travers la satisfaction sociétaire afin de le fidéliser. Une DMT longue doit être justifiée par la qualité de la relation. Nous n'avons ainsi pas de script afin de favoriser l'écoute active.
Comment mesurez-vous la satisfaction client?
C. M.-C. : Via le taux d'engagement, le NPS et le taux d'attrition. Nous évaluons aussi le taux de multi-équipement, lié à la satisfaction. D'un point de vue opérationnel, nous évaluons le CES et le Csat. Nous privilégions les KPI orientés sociétaires quantitatifs et qualitatifs.
N. C. : Ces KPI sont complétés par des retours verbatims. Nous avons des trackers qui nous permettent de voir ce que ressentent le sociétaire et le salarié, qui identifient les sujets sur lesquels les clients ont besoin de s'exprimer et la tonalité dans laquelle ils le font. Nous privilégions les verbatims en parallèle du CES. C'est essentiel pour la détection d'une insatisfaction naissante. L'analyse des verbatims permet ainsi de reconstituer le parcours de nos sociétaires avec leur propre vision, et non via celle du conseiller et du chef de projet Maif. En même temps, nous demandons régulièrement à nos collaborateurs quelles sont la meilleure et la pire expérience qu'ils ont vécues.
Que pensez-vous du taux de résolution des problèmes au premier appel?
N. C. : Cela nous a intéressés dans un passé récent, mais nous avons pris du recul par rapport à cet indicateur. Les verbatim de nos sociétaires nous permettent maintenant de savoir si nous avons bien répondu à leur question, au lieu d'une question fermée. Nous évitons les enquêtes systématiques afin d'empêcher que la sollicitation ne devienne rébarbative.
C. M.-C. : Nous faisons confiance à nos sociétaires pour nous dire ce qui va et ce qui ne va pas. Nous avons un rapport assez horizontal avec nos clients.
Comment ne pas se laisser aveugler par les métriques pour avoir une véritable vision?
C. M.-C. : En écoutant le client et nos collaborateurs et en évitant de se mettre à leur place, à travers l'analyse des verbatim, via des logiques de parcours et de miroirs. En résumé, nous ne partons pas d'une métrique pour arriver à une vision, mais d'une vision pour arriver à une métrique.
N. C. : Nous organisons également des tables rondes avec nos sociétaires. Nous avons une vigilance en ce qui concerne les attentes des consommateurs au sens large.
Christine Mathé-Cathala, dg adjointe en charge des opérations assurance et de la relation sociétaire, et Nicolas Courjaud, responsable de l'excellence opérationnelle et de la satisfaction sociétaires, font le point sur l'utilisation des KPI pour piloter la relation sociétaire de la Maif.
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