Recherche

Harley-Davidson met les femmes en selle

Marque fantasmée, longtemps associée à une imagerie macho, Harley-Davidson se réinvente en tant que porte-parole de la parité. Rencontre avec Isabelle Zammit, directrice marketing en charge du segment femmes de Harley-Davidson France.

Publié par Charlotte Marchalant le | Mis à jour le
Lecture
5 min
  • Imprimer
Harley-Davidson met les femmes en selle

La Harley-Davidson, un faire-valoir de la masculinité ? Les clichés ont la peau dure mais le groupe de Milwaukee, depuis longtemps dans l'imaginaire collectif, chasse gardée de tatoués fans de Easy Rider et membres des Hell's Angels, courtise de plus en plus les femmes. Une clientèle pas si à part. " Elles doivent passer le même permis moto que les hommes ", indique, logique, Isabelle Zammit. " Techniquement, elles sont même meilleures, car nous ne compensons pas par la force ". Dans son discours, la directrice marketing en charge du segment femmes de Harley-Davidson France, passe souvent du " elles " au " nous ". Il faut dire que parler des femmes motardes revient à parler d'elle-même, ce qui n'était pourtant pas encore vrai lors de sa prise de fonction, à la faveur d'une création de poste il y a trois ans.

Contre l'auto-censure : le gender-marketing

Et puis elle a franchi le pas ; passé un cap. Une chose pas si facile à faire, en témoigne le nombre, toujours croissant, de femmes qui lui confient en la rencontrant avoir toujours rêvé d'en faire de même. Sauf que chez un homme, le passage du rêve à la réalité est facile. " Il va passer son permis, s'acheter une moto. Alors que la femme est instantanément assaillie de questions, à commencer par celles autour du permis : Ça se passe où ? Comment ? Et puis, vient la remise en question : la moto, est-ce vraiment pour moi ? ", détaille Isabelle Zammit. Un processus d'autocensure qui est la raison d'être du gender-marketing qu'elle a développé. Concrètement, il s'agit de montrer aux femmes d'autres femmes qui roulent en deux roues. L'émulation fait le reste. Celles qui n'osent pas se disent alors : " Si elle peut le faire, moi aussi, résume Isabelle Zammit. C'est pas plus compliqué. "

Des rendez-vous virtuels et réels

Harley-Davidson multiplie les partenariats, comme celui-ci avec Causette.


Pour autant, la stratégie déployée par Harley-Davidson ne laisse rien au hasard. Combinant de façon experte online et offline, elle se sert des nouveaux outils de communication digitaux pour entamer une conversation qui a vocation, très vite, à se poursuivre dans la vraie vie. A cette fin, le concessionnaire multiplie les points de rencontre avec le public féminin. Au travers de partenariats - pas de sponsoring -, précise Isabelle Zammit : " Mettre un logo quelque part ne m'intéresse pas ". Plus exigeante car plus ambitieuse, elle cite en exemple une initiative récente, organisée avec le site Internet Mes bonnes copines : "Les internautes ont été invitées à poser des questions, puis, à l'occasion d'une visite en concession, une vidéo a été faite et j'ai répondu aux questions. Ensuite, nous avons convié les membres du site à l'une de nos soirées Chrome and Roses".


La fidélisation à chaque nouveau rendez-vous

Fleuron de la stratégie relationnelle du groupe, ces dernières, organisées en concession, visent à fidéliser les non-initiées : les femmes qui n'ont pas encore le permis le moto et qui sont en train de le passer ou bien encore celles qui viennent tout juste de l'avoir. Riches en divertissements, elles proposent en général, sur fond de concert rock un photo-call, un jump-start (un outil de simulation de conduite sur deux roues) ainsi que des ateliers plus techniques, visant à montrer, par exemple, comment customiser une Harley-Davidson selon sa morphologie, ses goûts. Un schéma, classique, autour duquel les concessions sont invitées à broder. Et le succès est au rendez-vous. Alors que le groupe possède en France 50 concessions, 45 d'entre elles ont organisé une soirée Chrome and Roses entre mars et juin 2014. Chaque rendez vous attire en moyenne une centaine de participantes. "Sans publicité", soutient Isabelle Zammit.

Quand elles reviennent, comme elles le font souvent à l'issue de cette première expérience, les concessionnaires sont prêts à les accueillir. Misant sur l'accompagnement, ils jouent un rôle de conseil auprès des prospectes, qui veulent savoir où et comment passer leur permis. Et ainsi de suite. A chaque nouvelle rencontre, le groupe joue la carte de la fidélisation. Après l'achat d'une moto, la nouvelle cliente se voit aussi proposer d'intégrer les "Ladies of Harley", la branche féminine du Club Harley-Davidson qui compte, hommes et femmes confondus, 1 million de membres dans le monde. Pour autant, Isabelle Zammit se défend de "faire du pink" selon sa formule récurrente. Il ne s'agit pas de "ghettoïser" les femmes. Un écueil soigneusement évité qui explique sans doute les résultats probants de la méthode en place. En 2013, les inscriptions aux Ladies of Harley ont bondi de 40%. A titre de comparaison, côté homme, la croissance n'était que de 3%. Plus encore, en l'espace de trois ans, la marque a multiplié par deux sa clientèle féminine.


Un profil type ?

Malgré tout, une certaine curiosité prévaut vis-à-vis de la femme Harley-Davidson. "On me demande souvent quel est son profil", confirme la porte-parole du groupe. Une question difficile. Si la marque entretient sa base de données, elle ne la segmente pas en tranches d'âge. Aussi, pour répondre, Isabelle Zammit puise dans ses propres observations. "C'est souvent une quadragénaire, qui après s'être consacrée à son travail, à son mari, à ses enfants, décide de s'écouter. Mais c'est aussi une femme issue de la génération Y, qui admet mal les carcans imposés par la société... ou bien encore une femme de 60 ans, poursuit-elle, avant de reprendre : "C'est tout simplement une femme qui réalise ses envies, et ça, ça n'a pas d'âge."

Livres Blancs

Voir tous les livres blancs

Vos prochains événements

Voir tous les événements

Voir tous les événements

S'abonner
au magazine
Se connecter
Retour haut de page