Connaissance client & analyse des feedbacks : passez à l'action !
Renforcer la connaissance client dans le brouhaha d'une relation omnicanale, c'est tout le défi qui s'impose aux acteurs de la relation client. Entre compréhension et action, les meilleurs seront ceux qui entendent et non ceux qui écoutent. Explications.
Quatre-vingt-neuf pourcents ! C'est la part des dirigeants d'entreprises qui estiment que les attentes de leurs clients évoluent constamment en fonction des meilleures expériences omnicanales qui leur sont proposées.
Dans les faits, seuls 7 % des acteurs de la relation client jugent l'expérience client digitale de leur entreprise exceptionnelle, capable de surprendre et de séduire la clientèle, tandis que 42 % des entreprises estiment qu'elles peinent à répondre aux attentes de la clientèle. Ces chiffres, issus du dernier rapport d'Adobe intitulé Tendances digitales 2023, illustrent à eux seuls l'enjeu clé de la connaissance client et de son corollaire immédiat : l'analyse des feedbacks.
Parce que les parcours client en BtoB comme en BtoC se sont complexifiés, que les clients sont toujours plus versatiles et que la concurrence est toujours plus farouche, les entreprises doivent tout mettre en oeuvre pour comprendre et s'adapter en continu aux attentes de leurs cibles. « Les marques sont confrontées à une réalité : il faut adopter une posture d'interrogation permanente pour s'adapter en continu. Pour cela, il faut prendre le pouls en permanence sur l'ensemble des publics qu'adresse l'entreprise », affirme Laurent Garnier, CEO et fondateur de KPAM (cabinet de conseil et d'études spécialiste de l'expérience clients).
Mais la société, le monde dans son ensemble change toujours plus vite et dans un contexte de crise permanente, il faut s'inscrire dans une posture d'hypervigilance. « Tout change très vite. Les recettes que l'on applique à un instant T ne sont plus valides six mois plus tard. Et cela vaut autant pour les clients internes que pour les clients externes. Parce que le rythme s'accélère, il faut être toujours plus à l'écoute », continue Laurent Garnier.
Devenir une entreprise sensible...
« Plus une marque est historiquement implantée sur son marché, connue, reconnue, plus son enjeu réside dans la granularité de la compréhension des attentes de ses clients », confirme Clément Benalia, directeur de l'Élection du Service Client de l'Année. « Une marque très mature sur les enjeux de relation client arrive tôt ou tard à un plafond de verre qu'il faut briser pour aller plus loin dans l'expérience ou la satisfaction client. La connaissance client et l'analyse des feedbacks sont deux leviers pour briser ce plafond de verre. » Comprendre les clients. Tous les clients et à tout moment. Un défi permanent alors que les points de contact se multiplient.
Agréger de la connaissance ne suffit plus. Il faut encore traduire cette connaissance en actions concrètes sur les processus, sur les outils, sur les méthodes, et il faut le faire vite ! « Je crois énormément à la théorie de l'entreprise sensible, précise Laurent Garnier. Plus l'entreprise est sensible à son environnement, à ses parties prenantes comme ses partenaires, ses collaborateurs, à ses clients... plus elle dispose de capteurs développés, puissants, plus elle est forte. » Ces capteurs amènent une masse d'informations qui constitue une garantie de rester en prise directe avec l'environnement immédiat de l'entreprise.
Mais, capter l'information n'est qu'un prérequis. Il faut encore être en mesure de la comprendre et de la faire remonter aux collaborateurs, aux fournisseurs, à toutes les parties prenantes. « À mon sens, les entreprises qui se sont activement engagées dans un projet de connaissance client et d'analyse des feedbacks sont celles qui ont le plus progressé au sein de l'élection du service client de l'année », confie Clément Benalia.
Mais prudence ! Posts sur les réseaux sociaux, réclamations, enquêtes de satisfaction, e-mails, téléphone, messageries instantanées, l'entreprise croule sous une masse d'informations qui brouille parfois sa capacité de discernement. Dans ce contexte, si l'apport des technologies est considérable et permet d'augmenter la capacité des équipes à entendre et connaître le client, la capacité à agréger des quantités pléthoriques de feedbacks émanant de tous les canaux et sous diverses formes, soulève une difficulté : comment exploiter cette manne d'informations et la transformer en décisions opérationnelles ?
« Avis en ligne, réseaux sociaux, e-mails, écoutes à chaud ou à froid, l'analyse des feedbacks trouve un nouvel élan grâce aux technologies qui permettent de mieux identifier les émotions en temps réel. C'est l'enjeu de demain : inscrire le retour client dans sa dimension émotionnelle plus encore que sur le déclaratif pur », souligne Clément Benalia. Un constat partagé par Boubacar Diallo, Senior Consultant Solutions pour Genesys : « L'analyse des feedbacks, ce ne sont pas que des mots. Il faut capter l'intention du client, son émotion. Le speech analytics est très utilisé a posteriori, mais nous tendons désormais vers des usages en semi-temps réel pour alerter un manager ou un conseiller sur les émotions des clients ».
Boubacar Diallo, Senior Consultant Solutions Genesys :
« L'analyse des feedbacks permet de détecter les moments clés pour le client. Plus rien n'est figé, la redéfinition est permanente. Il faut procéder à des réévaluations tous les six mois, pour valider les orientations stratégiques et les réponses déployées. »
De la compréhension à l'action dans la relation client
Essayer d'écouter et de comprendre le client, c'est bien. Agir, c'est mieux ! L'analyse fine de tous les capteurs déployés pour améliorer la connaissance n'a de sens que si elle se traduit par une volonté d'adapter en permanence la posture, les process et les moyens mis en oeuvre pour maximiser l'expérience et la satisfaction des clients. Passer de l'analyse des feedbacks à l'action correctrice est autant un enjeu technique, stratégique et de management. Transcrire cette connaissance en plans d'actions hiérarchisés constitue donc un axe stratégique.
Le conseil de Laurent Garnier : « Ne jamais intégrer plus de trois ou quatre priorités à la fois dans un plan d'action. Les entreprises qui réussissent le mieux sont celles qui choisissent leurs combats. » Des combats ciblés, précis, pour lesquels elles doivent adopter une logique chirurgicale car les chantiers engagés doivent avoir un impact rapide et mesurable. « Lorsque les combats sont identifiés, ils doivent être construits avec précision et il faut mettre tout le poids du corps dessus et impliquer toutes les énergies concernées en mettant à disposition des KPI et les incentives correspondant », recommande Laurent Garnier.
Mais, sur quel(s) axe(s) concentrer les efforts ? « Les meilleurs sont attentifs aux signaux faibles, continue le fondateur de KPAM. Tuer les problèmes dans l'oeuf, saisir les opportunités avant les autres. C'est la double promesse d'une vigilance sur les signaux faibles révélés par l'analyse des feedbacks. »
Olivier Offerlé, directeur des opérations Majorel France :
« Nous avons la conviction que nos conseillers peuvent apporter une vraie valeur ajoutée par leur connaissance client, car ils vivent au quotidien au plus près de ces derniers. Notre démarche est d'abord portée par l'humain. »
Connaissance client et feedback management : un projet humain d'abord...
Pour ses 17 implantations en France et ses 5 500 conseillers, Majorel France s'appuie sur un outil de speech analytics qui automatise l'analyse des feedbacks. Couplé à un outil d'analyse de verbatims afin de faire émerger des ressentis, des sentiments des pains, liés à des parcours, des produits ou des insatisfactions, ce dispositif permet une captation massive de la voix, l'incrémentation des paramétrages avec des mots ou expressions clés, la modélisation des typologies d'interaction et la mesure de la réitération des appels. Mais au-delà des solutions techniques, « il nous semble essentiel, parce que nous sommes au plus près de la voix du client, de challenger nos conseillers sur de l'innovation bien sûr, mais aussi sur de l'amélioration des parcours clients ou des process », indique Olivier Offerlé, directeur des Opérations pour Majorel France.
La méthodologie : les collaborateurs font remonter des alertes et l'encadrement organise des focus groups, pour identifier les meilleures réponses et mettre en place les meilleurs correctifs. Le défi : faire simple et efficace pour ne pas prendre le risque de tuer les bonnes idées. « C'est un risque préjudiciable pour les clients finaux, mais cela peut aussi être décevant pour nos équipes. Nos conseillers clients sont aux deux extrémités de la chaîne. À l'origine des remontées de feedbacks et à la fin de la conception du correctif », précise Olivier Offerlé. Une implication des équipes clients indispensable d'autant qu'elles sont concernées au premier chef par l'analyse des feedbacks : « Les enjeux se portent aussi sur la connaissance des conseillers pour mieux les accompagner, assurer leur montée régulière en compétences et surtout leur offrir les meilleures conditions de travail », conclut Boubacar Diallo.
L'écoute des clients et l'analyse des feedbacks pour passer à l'action
« La multiplication des canaux qui peuvent faire l'objet d'une collecte des feedbacks nous amène à être très attentifs à notre capacité d'écoute du client, mais surtout à faire bon usage de ce que nous entendons », explique Anthony Humbert, chef de Département Communication et Service Consommateurs pour TotalEnergies Marketing France. Le groupe a fait le choix de centraliser l'ensemble de ces sujets au sein d'un centre de compétences dédié.
Les feedbacks émanant des e-mails, des messageries instantanées, de la voix convergent dans un seul et même outil. Ce dernier agit comme un concentrateur de connaissance client qui met en forme les tendances ou problématiques détectées. « Cette data bank nous permet de retranscrire les points détectés sous une forme digeste afin de redistribuer la connaissance, mais aussi les missions de correction vers le service client ou les métiers concernés. » TotalEnergies s'appuie sur des tableaux de KPI pour analyser les volumes de contact, les cas traités, les sujets, les délais de traitement, etc.
Le rapprochement de la connaissance client issue du concentrateur et des indicateurs permet d'identifier les cas les plus récurrents afin de prioriser et hiérarchiser les chantiers d'amélioration. « L'analyse des feedbacks doit être représentative de la réalité des clients. Nous challengeons nos indicateurs, nos analyses elles-mêmes. C'est pourquoi, en complément de ces dispositifs, nous nous appuyons sur des focus groups que nous sollicitons sur ces sujets pour vérifier la validité de nos constats », précise Anthony Humbert.
Confronté à la démultiplication des sources de connaissance, mais aussi à une massification de l'information disponible, TotalEnergies s'est pleinement saisi de l'enjeu. « Ces sujets de connaissance et d'expérience client sont portés par le top management. Ils sont récurrents au comité de direction. C'est un élément essentiel pour engager l'ensemble de l'entreprise dans un effort d'amélioration continu. À ce titre, les groupes de travail organisés avec nos clients sont pilotés directement par les Senior VP », conclut Anthony Humbert.
Laurent Garnier, CEO et fondateur de KPAM :
"L'entreprise sensible sait entendre les murmures et n'attend pas que les signaux faibles deviennent des signaux forts."
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