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Entreprises à mission : la relation client comme accélérateur de la transformation

Les entreprises qui prennent le statut de « société à mission » décident d'aligner leur raison d'être et des objectifs audités par des tiers. La relation client participe pleinement à ce travail de structuration pour expliquer la mission, répondre aux questions et attentes des clients ou avancer dans ce nouveau modèle de développement.

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Passing the Relay Baton
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Adopter le statut d'entreprise à mission permet, entre autres, d'apporter une réponse aux attentes des clients de l'entreprise, de plus en plus informés et sensibles aux produits et services qu'ils achètent et à la cohérence avec la façon dont l'entreprise est gérée, explique sur son site la Communauté des entreprises à mission. Alors que plus de 1 000 sociétés ont adopté ce statut proposé par la loi Pacte de 2019, la relation client est rarement évoquée dans les objectifs de la mission, qui font la part belle aux enjeux sociétaux et environnementaux, à des processus de production plus responsables ou à la réduction de leur empreinte carbone. « Les entreprises ont pris en compte la relation client au sens large dans la définition de leur mission et ne descendent souvent pas à un niveau de granularité qui leur permet d'aborder la relation client opérationnelle », tempère Alain Schnapper, directeur général de la Communauté des entreprises à mission.

Dans la raison d'être, l'attention au client est plus fréquemment citée. « Si, par ses produits et services, l'entreprise a déjà pour objectif principal de servir ses clients, cela ne transforme rien. Il est plus intéressant d'aller chercher dans sa raison d'être des éléments qui vont plus loin que la valeur intrinsèque de l'entreprise, de faire de son engagement un sujet d'échange et d'amélioration continue avec les parties prenantes, dont le client », note Elisabeth Laville, qui dirige Utopies, agence de conseil en stratégie de développement durable, certifiée B Corp depuis 2014 et devenue société à mission en 2020. Pour fixer des indicateurs derrière ces objectifs, elle incite à recourir à l'autodiagnostic B Impact Assessment (BIA) gratuit de B Corp. En matière de relation client, il peut aider à développer « une écoute client plus attentive grâce à des questions opérationnelles qui permettent de creuser la relation ».

Des collaborateurs ambassadeurs

« Pour que la mission ait un impact, il est essentiel que les collaborateurs s'en saisissent et sachent en parler. La singularité de la marque est renforcée par la mission, si elle est incarnée par une équipe de relation client puissante, mais cela ne se fait pas du jour au lendemain », reconnaît Emery Jacquillat, président de la Camif, groupe qui avait inscrit sa mission dans ses statuts dès 2017, avant de devenir société à mission en 2020. « Nous donnons aux équipes beaucoup d'informations sur la feuille de route en matière de consommation responsable, sur ce qui fait que l'on référence ou pas un produit ou le modèle de location qui change complètement la relation avec le consommateur. Les conseillers qui vendent un matelas en matière recyclée doivent pouvoir répondre aux questions du client. Nos collaborateurs sont à même de défendre ces propositions car ils ont été formés sur les nouveaux produits », détaille-t-il. Pour que tout le monde soit bien aligné sur cette approche, la Camif a d'ailleurs réinternalisé sa relation client, auparavant opérée par Teleperformance à Niort. Et pour les équipes qui exprimaient le sentiment de ne pas contribuer autant que d'autres à la mission, des activités transverses ont été développées sur les enjeux de transparence ou l'animation des fresques du climat.

Emery Jacquillat (Camif) : « Nos collaborateurs sont à même de défendre nos propositions auprès des clients car ils ont été formés sur les nouveaux produits »

Okko Hotels est devenue entreprise à mission depuis mars 2023 pour « attester de ce que nous faisions déjà à travers notre stratégie sur la qualité de service, témoigne sa directrice générale Solenne Devys. La relation client s'exprime aussi dans la symétrie des attentions, qui est inscrite dans les objectifs de la mission et sera désormais auditée. Cela nous oblige à structurer la data RH et à automatiser son traitement sur nos 250 collaborateurs. Les aspects qui fonctionnent moins bien ressortiront plus clairement. » Dans l'hôtellerie, où les rythmes sont difficiles et où les salaires à l'entrée restent bas, le plus gros volet tourne autour du social, ajoute-t-elle : « Aujourd'hui, on reprend toutes les bases, ce qui change aussi la donne pour les managers ».

Solenne Devys (Okko Hotels) : « La symétrie des attentions est inscrite dans les objectifs de la mission. Cela nous oblige à structurer la data RH et à automatiser son traitement »

La mission comme boussole

L'outsourceur Amicio a franchi le pas en janvier 2022. Après une petite année de mise en route, l'entreprise se concentre désormais sur ses objectifs opérationnels. Si le management a été formé pour accompagner les talents et identifier "la clé de succès" de chacun, la transformation se joue aussi dans les relations que ce centre de contact qui travaille à 100 % en France et au plus près des terroirs entretient avec les marques qu'il représente. « La mission rééquilibre la relation toujours un peu servile de donneur d'ordres à prestataire. On cherche à travailler avec des entreprises qui ont la même réflexion que nous ou qui évoluent dans l'économie sociale et solidaire pour voir comment notre relation permet de faire vivre la mission de l'un et de l'autre », relate son président fondateur Benoît Bourla. Et parfois, cela coince ! « La mission et les engagements supposent aussi une capacité à renoncer à des clients qui ne sont pas alignés sur cette façon de se comporter. C'est déjà arrivé deux fois. Sur le moment, c'est difficile de faire une croix sur un chiffre d'affaires, mais accepter ces contrats aurait été encore plus difficile à justifier, confie-t-il. Désormais, à chaque fois qu'une question se pose à l'équipe de direction ou qu'un fonctionnement s'avère un peu difficile avec un client, nous passons nos interrogations au tamis de la mission. Dans les deux cas, cela nous a beaucoup éclairés. » Si les KPI du métier restent fondamentaux, le groupe commence à suivre d'autres indicateurs en lien avec sa mission, plus qualitatifs et pas tous encore assortis de niveaux de performance.

Benoît Bourla (Amicio) : « On travaille avec des entreprises qui ont la même réflexion que nous. On voit comment notre relation fait vivre la mission de l'un et de l'autre »

La mission transforme aussi la conversation avec les clients. Les newsletters de la Camif, encore très promotionnelles il y a dix ans, mettent aujourd'hui en avant des arguments sur la consommation responsable. Une plus grande proximité se crée via la coconstruction ou quand les comités de mission intègrent des clients. Revendiquer sa mission vis-à-vis du grand public n'est pas toujours sans risque. « Ces entreprises s'exposent probablement à des attentes plus fortes de la part de leurs clients, ce qui suscite parfois des incompréhensions, observe Alain Schnapper. Sur les réseaux sociaux, un client mécontent de la prestation d'une société à mission a un jour évoqué la possibilité de déclencher une expertise. Si la mission est un cadre juridique dans lequel l'entreprise s'engage pour se transformer, elle ne doit pas pour autant être vue comme un label de vertu. »

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