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DossierComment faire de ses conseillers clients des experts ?

Stimulé par les dernières technologies et les nouvelles exigences des consommateurs, le centre d'appels se transforme en centre d'expertise : le métier se professionnalise, les techniques deviennent plus complexes et l'organisation du travail évolue. Une transformation qu'il convient d'accompagner.

Publié par Christelle Magaud le
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Comment faire de ses conseillers clients des experts ?

1 Recruter les bons profils...

Vanessa Gousselot, chargée de développement centre expert tertiaire et services chez Randstad

Les métiers du centre de contacts se professionnalisent. "La tendance consiste effectivement à rechercher des experts pour délivrer des solutions. Par exemple, pour une grande marque d'assurance, nous recrutons à Marseille et à Lyon des mécaniciens poids lourds, capables à la fois de gérer les sinistres et de solutionner les pannes", déclare Vanessa Gousselot, chargée de développement centre expert tertiaire et services chez Randstad.

Aussi, les centres recrutent aujourd'hui minimum à bac+2. "Plus de 60% des collaborateurs avaient un bac+2 en 2013, contre 53% en 2012(1)", poursuit-elle. Le nombre d'étudiants affiche logiquement une baisse importante: ils étaient trois fois moins nombreux en 2012 qu'en 2007, selon Randstad(2).

Loïc de Villers, directeur général de TeleRessources

Le temps de recrutement se révèle aussi plus long. "Du fait de l'évolution du métier, de plus en plus technique - plus d'un téléconseiller sur cinq exerce dans le secteur des nouvelles technologies -, les profils adéquats sont plus pointus et donc moins faciles à capter, souligne Loïc de Villers, directeur général de TeleRessources. C'est ­pourquoi il faut valoriser ces métiers. Fatalement, si le niveau d'études a augmenté, la moyenne d'âge aussi, de même que les rémunérations, d'environ 10% en deux ans. Et c'est logique: le métier devient de plus en plus complexe."

Auparavant, le téléconseiller créait une fiche contacts et se contentait de répondre à un appel. Aujourd'hui, il doit renseigner une base de données et établir une proposition sur mesure. En parallèle, l'usage des réseaux sociaux se développe fortement. Les professionnels de la relation client les utilisent de plus en plus pour faire remonter des messages vers la marque, les analyser et y répondre. Les centres d'appels développent donc une expertise de veille sur ces nouvelles plateformes.

Conséquence: selon une étude(3) SP2C/BearingPoint, en 2015, les téléconseillers devraient consacrer plus de temps à la modération de communautés qu'au courrier. Les centres de contacts deviennent ainsi un vivier pour le community management.

Ce sont désormais les conseillers qui jouent le rôle d'ambassadeurs de la marque auprès des clients.

Sources :
(1) Étude Baromètre RC Randstad, 2013.
(2) Baromètre social de la relation client, 2012, Randstad.
(3) Étude S2PC/Bearing Point, 2013.

... et valoriser les métiers du centre de contacts.

2 Former aux nouvelles problématiques...

Le développement du self-care avec, d'une part, l'automatisation des canaux (SVI, FAQ, forums,etc.) et, d'autre part, l'usage des terminaux mobiles, entraîne la diminution des appels à faible valeur ajoutée. Le consommateur est devenu beaucoup plus autonome et agit sans assistance extérieure pour ses demandes simples. "Dans le domaine de la banque, par exemple, un client qui veut effectuer un virement le fait tout seul, directement sur son espace personnel, indique Patrice Mazoyer, président de Colorado Conseil et Formation. Également, le développement du Web et de l'e-commerce génère des nouveaux besoins de contacts (tchat, web-call-back...), pour assister le client dans son parcours en ligne et optimiser le taux de transformation."

L'évolution du métier de téléconseiller a donc eu un impact fort sur la formation. "En ce qui nous concerne, nous enregistrons 10 à 20% de demandes supplémentaires de sessions", assure Loïc de Villers, de TeleRessources. Des formations non pas centrées sur les outils - les centres de contacts bénéficient d'un accompagnement de la part des intégrateurs de solutions - mais plutôt sur toutes les formations de savoir-être.

Les organismes spécialisés sont de plus en plus sollicités à ce sujet. "De nouveaux modules ont été créés, sur les postures, les savoir-faire, les motivations commerciales... Nous ­proposons des techniques relationnelles plus fines et sur mesure. Par exemple, avec l'équipe de vente, nous allons définir des profils comportementaux (flambeurs, techniques, novices...) et, en fonction de cela, travailler sur l'adaptation du discours au profil cible", affirme Loïc de Villers.

Camille Canque, cofondatrice et associée du cabinet Gicam Conseil

Quant à l'écrit, il est aussi devenu l'objet de formations. "Celles-ci sont nécessaires pour mettre sur pied des équipes capables d'apporter des réponses adaptées à des flux toujours plus nombreux", explique Camille Canque, cofondatrice et associée du cabinet Gicam Conseil. "Dans ce cadre, les sessions "bien savoir rédiger" se multiplient, reprend-elle. Pour les mener à bien, nous avons remis à plat, dans les banques et les sociétés d'assurances qui nous ont sollicités, les e-mails et les courriers entrants, afin d'harmoniser le contact avec leur client, quel que soit le média utilisé."

... et mettre le "savoir-être" au coeur des préoccupations.

Mettre en place la conduite du changement...

Difficile, néanmoins, de transformer les métiers du jour au lendemain. "Comment arriver sur un plateau avec 200 téléconseillers qui avaient l'habitude de traiter des courriers et leur annoncer que désormais, ils ont des objectifs commerciaux, de nouveaux process, de nouveaux indicateurs permettant d'enrichir la connaissance client?" interroge Patrice Mazoyer (Colorado Conseil et Formation). Cela suppose de mener une politique en amont de conduite du changement... ce qui prend du temps. Surtout pour les grands noms de la banque et de l'assurance, qui doivent faire avec l'historique de leur système d'information. "Alors que pour les jeunes sociétés du Net, c'est plus facile, reprend-il. Elles ont eu l'opportunité, dès le départ, de fonder leur business sur le modèle d'un centre de contacts au coeur de leur fonctionnement."

Concrètement, pour les centres de contacts traditionnels, c'est au superviseur que revient le délicat travail de mener cette transition en douceur; il se transforme en manager d'équipes. "Il doit faire des briefs, motiver, animer les équipes... À charge aussi pour le responsable du plateau de vérifier que chaque appel est efficace, autrement dit, que chacun obtienne une réponse de qualité... c'est plus un rôle de coach", précise Camille Canque (Gicam Conseil).


... et mener la transition en douceur.

3 Fidéliser les collaborateurs...

"Après avoir passé trois ans en centre d'appels, les téléconseillers peuvent prétendre aujourd'hui à évoluer en agence et, au bout de cinq ans, occuper un poste de directeur d'agence", affirme Vanessa Gousselot (Randstad). Auparavant, les compétences étaient segmentées. Désormais, elles deviennent transversales.

Certaines sociétés ont d'ailleurs mis en place des programmes pour faciliter ces évolutions en interne. "Dans le groupe Banque Populaire, il existe des passerelles d'intégration entre le point de vente physique et le centre de contacts. C'est l'avenir de nombreuses entreprises", constate Loïc de Villers (TeleRessources). D'autant que ces "nouveaux conseillers" disposent d'un large capital d'expertise et d'une forte culture d'entreprise. Leur proposer des parcours professionnels permet ainsi de les retenir et de préserver le savoir-faire de la marque. Un capital précieux.

... et leur proposer de véritables parcours professionnels.

Zoom - Zappos, un modèle pour les centres de contacts nouvelle génération

Le succès du site américain de vente de chaussures (20% de croissance par an) repose sur son call center très performant: disponibles 24 heures sur 24, sept jours sur sept, les équipes répondent sans contrôle, sans DMT (durée moyenne de traitement) imposée, ne se voient attribuer aucun script...

Les agents agissent en complète autonomie. Pour ce faire, Zappos a inventé un management proche de ses collaborateurs.

En outre, tous bénéficient d'un système de gestion des talents très prometteur, qui consiste en un parcours de formation permettant d'évoluer, en sept ans, vers un poste important.

L'un des faits d'armes de Zappos : le record absolu de conversation téléphonique (dix heures) entre un téléconseiller et un client. Elle s'est soldée par une vente.

4 Zoom - Oscaro.com se démarque par son centre d'appels d'experts

"Nos téléconseillers sont recrutés en fonction de leurs compétences mécaniques et non de leur expérience en centre d'appels, précise Véronique Campbell, directrice marketing et communication du site. Pour cela, nous dispensons en interne une formation initiale de cinq jours, consacrée aux clés de l'échange téléphonique, à la maîtrise de nos outils informatiques et à la gestion des appels conflictuels."

Autre spécificité: sa taille. "Le service est surdimensionné par rapport à la grandeur de l'entreprise. Il n'y a jamais eu d'objectif de productivité, assure-t-elle. Sa mission principale consiste à apporter un service qui entraîne une confiance dans la marque et qui fait que les consommateurs feront appel à nous la prochaine fois." Un échange qui permet aussi de faire remonter des informations pour créer un environnement favorable à l'acte d'achat.

Cette stratégie s'avère payante, puisque le pure player annonce 250 millions d'euros de chiffre d'affaires pour 2014 et enregistre près de 10 000 commandes par jour.

Le site marchand spécialisé dans les pièces détachées de voitures a fondé son business sur des téléconseillers experts. Qui mieux que des mécaniciens pour répondre à des clients dont le véhicule est en panne ?

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