[DOSSIER] Optimisation de la relation client en ligne : une histoire de data et de canaux
« Les consommateurs expriment un sentiment d'abandon fort dès lors que la phase transactionnelle est terminée. ». C'est l'un des enseignements de l'Observatoire de l'Expérience Digitale 2023 de onepoint et Harris Interactive*. Gestion des demandes, réclamations... l'expérience post-achat représenterait l'étape la moins satisfaisante alors qu'elle est celle durant laquelle les clients attendent le plus d'attention.
Les secteurs de la téléphonie, de la distribution alimentaire et de la distribution spécialisée feraient, selon cette étude, figure de mauvais élèves. Pire, 43 % des clients ne voient pas d'amélioration dans ces interactions digitales avec les marques au cours des dernières années, 10 % affirment même que l'expérience digitale s'est dégradée.
« Le moment de l'immédiat post-achat est perçu comme sous-travaillé, pas tellement au niveau des informations délivrées (suivi des livraisons chez les retailers ou des consommations chez les énergéticiens) car ces piliers mécaniques et technologiques sont bien rodés, mais dès que le client a une question, il vit un grand moment de solitude », commente Patrick Oualid, associé du cabinet onepoint en charge des sujets liés à l'expérience client.
Hyperpersonnaliser les parcours
La solution ? « Penser les usages, les anticiper et répondre aux attentes émotionnelles prégnantes chez les jeunes générations », recommande-t-il. Par exemple, « au lieu d'actionner un welcome call cherchant à vendre un produit complémentaire, les marques seraient bien inspirées de contacter le client pour simplement le remercier d'avoir finalisé son achat ».
Bref, enrichir l'expérience d'une action mémorable. « Les relations avec les clients se renforcent lorsque l'on dispose d'une connaissance approfondie de ces derniers. Il est donc important que les entreprises investissent dans des solutions qui offrent une vision en temps réel des données. La façon dont les clients achètent, les canaux qu'ils préfèrent, l'heure à laquelle ils sont le plus susceptibles d'ouvrir un courriel... voilà autant d'informations précieuses que les clients vous offrent », explique Tjeerd Brenninkmeijer, EVP of EMEA de Bloomreach.
Ces données unifiées et accessibles permettent d'enrichir le parcours client. Ainsi, poursuit-il, « vous pouvez vous assurer que le client voit exactement ce qu'il souhaite, au moment et à l'endroit où il le souhaite. Cela raccourcit le parcours entre le premier point de contact et l'acte d'achat, ce qui améliore l'expérience ». L'affichage de l'offre s'adapte au client et non l'inverse.
« Les clients ne veulent pas voir des produits qui ne sont pas disponibles dans leur taille, des produits en rupture de stock ou des produits qu'ils ont déjà achetés. Ils attendent des marques qu'elles sachent ce qu'ils veulent et qu'elles leur proposent du contenu, des produits et des promotions qui les intéressent », développe Tjeerd Brenninkmeijer. Il s'agit de lever les obstacles par l'hyperpersonnalisation du parcours.
Pour mieux interagir avec les clients et garder une longueur d'avance, William Bailhache, vice president South Europe & general manager de Sitecore, conseille aux marques d'investir dans des solutions martech. « Chez Sitecore, nous fournissons la pile martech permettant aux marques de garantir que les bonnes réponses et le bon contenu sont fournis lorsque les clients saisissent une requête », déclare-t-il. Pour cet expert, l'avenir de l'engagement et de la fidélisation de la clientèle dépend du niveau de granularité de la personnalisation. « Il s'agit de rester pertinent, de réagir rapidement et de connaître personnellement chacun de vos clients, et non comme s'il faisait partie d'un groupe démographique plus large », martèle-t-il.
« Le moment de l'immédiat post-achat est perçu comme sous-travaillé... dès que le client a une question, il vit un grand moment de solitude. », Patrick Oualid, associé du cabinet Onepoint, en charge des sujets liés à l'expérience client.
Introduire des bots intelligents
Depuis que le consommateur peut faire ses achats la nuit et balancer un tweet rageur en cas d'insatisfaction immédiate, la relation client est devenue plus complexe à gérer. « Les bots apparaissent indispensables pour traiter les questions de niveau 1 (Où est ma commande ? Reste-t-il la taille 40 ?) car ils apportent des réponses 24/7, lèvent des irritants et au final contribuent à désengorger les services clients et à éviter de voir les mécontents multiplier les messages sur plusieurs supports », argumente Samir Dilmi, directeur marketing et communication de Dydu, spécialiste français des plateformes d'IA conversationnelle (chatbots, callbots, etc.). À condition toutefois, précise-t-il, qu'il soit mis en avant sur le site, présent et accessible depuis toutes les pages, y compris sur les applis mobiles et via les messageries.
Il semble pourtant que le chatbot soit le seul canal ayant un impact négatif sur l'image de marque de l'entreprise. « Seulement 20 % des Français ont interagi avec un chatbot ou un conseiller virtuel, c'est un choix par défaut en majorité, avec un niveau de satisfaction en baisse, les chatbots ne sont pas matures, peut-être ont-ils un avenir avec ChatGPT qui pourrait aider les conseillers à mieux rédiger », glisse Carole Sasson, directrice du cabinet Cocedal Qualiweb** .
Attention néanmoins à ne pas confondre les FAQ dynamiques avec les robots intelligents. Samir Dilmi insiste : « Les algorithmes utilisés dans les bots intelligents changent l'expérience parce qu'ils identifient les fautes et comprennent la manière de s'exprimer du client, à travers une formulation, ils peuvent aller jusqu'à reconnaître ses émotions, ce qui modifie la manière de lui répondre ».
Il faut également des ressources humaines pour entraîner le robot, l'alimenter. « EDF enregistre de très bons résultats parce que les équipes sont derrière, les sujets sont clairs et les nouvelles connaissances ajoutées au fil de l'eau », indique-t-il. Le bot ne répond qu'aux thèmes qu'il a appris. C'est sa limite. « L'escalade vers l'humain reste indispensable pour gérer une question complexe », admet Samir Dilmi. Le vrai bon traitement consiste à allier les deux, la technologie et l'humain.
« Les clients ne veulent pas voir des produits qui ne sont pas disponibles dans leur taille, des produits en rupture de stock ou des produits qu'ils ont déjà achetés. Ils attendent des marques qu'elles sachent ce qu'ils veulent.» Tjeerd Brenninkmeijer, EVP of EMEA de Bloomreach.
« Quand un client nous appelle par téléphone, c'est quelque part un échec », Xavier Prin, directeur marketing et communication de Boursorama
Avec plus d'un millier de fonctionnalités en ligne, une centaine de notifications personnalisables (push natifs, SMS, courriel), un chat interactif, des webinaires avec des experts, des vidéos pédagogiques, la banque en ligne Boursorama Banque (filiale de Société Générale) met l'accent sur la richesse des contenus. « Quand un client nous appelle par téléphone, c'est quelque part un échec, notre objectif est de lui fournir un outil intuitif lui permettant d'accéder simplement et rapidement à l'information dont il a besoin », reconnaît Xavier Prin.
Des alertes intelligentes (à la première dépense et en temps réel lorsque le client est à l'étranger, en cas de solde bas ou quand une capacité d'épargne est identifiée par exemple) à la proposition de call back en cas de difficulté pour finaliser un crédit immobilier, la banque en ligne ne lésine pas sur les moyens permettant de fluidifier l'expérience.
Près de la moitié de son effectif - environ 400 collaborateurs sur 900 - sert la relation client via un contact direct. « Notre modèle s'organise autour de l'autonomie du client. C'est parce que la chaîne est automatisée et que nous optimisons sans cesse notre efficacité opérationnelle que nous pouvons rendre de la valeur à nos clients et être la banque la moins chère du marché », affirme Xavier Prin.
Boursorama travaille avec de nombreux partenaires IT mais ce sont des équipes internes qui développent l'UX et l'UI. Les pages web et natives, coconstruites avec le marketing, sont totalement maîtrisées en interne. « L'autonomie et la satisfaction des clients sont au coeur de notre modèle. Un client autonome et satisfait, cela représente des coûts en moins et de la recommandation en plus, nous avons d'ailleurs le meilleur NPS du secteur », conclut-il.
« Nous n'avons pas de serveur vocal, mais des conseillers qui répondent », Chloé Kaas, directrice relation membres Veepee.
Depuis deux ans, Veepee améliore le parcours d'achat. « Nous avons optimisé le taux de contact et nous constatons une tendance à la baisse des flux significative, les réponses par courriel sont plus rapides (proches de la demi-journée au lieu de la journée auparavant), la qualité de service est de 95 % au niveau du téléphone et nos membres qui contactent le service relation membres (SRM) ont tendance à être fidélisés et rassurés, ils reviennent et rachètent sur Veepee », se félicite Chloé Kaas. La plupart des appels concernent des demandes de localisation de colis, information pourtant présente sur le site. « Nous avions rajouté des informations complémentaires, notamment en lien avec les transporteurs, nous avons rendu tout cela plus lisible », assure-t-elle. Le parcours sur les applications mobiles a notamment dû être simplifié pour aller droit au but.
En 2023, Veepee se penche sur l'après-vente. La livraison reste le principal irritant. « Nous devons rassurer nos membres car il s'agit d'un moment clé, et mettre à disposition les informations nécessaires pour plus de transparence, les accompagner dans la gestion des retours et des remboursements, le temps de livraison peut aller de 48 heures à 3 semaines, il est accepté par les membres, en revanche nous devons respecter l'engagement de date. Nous avons beaucoup progressé avec l'équipe de la supply chain sur la justesse de la promesse », ajoute-t-elle.
Une stratégie qui se résume en trois axes : « Porter la voix du client en interne, maintenir la relation client accessible et efficace - nous n'avons pas de serveur vocal mais des conseillers qui répondent - et faire de la relation client un levier de croissance. Le téléphone reste le canal préféré (à 52 % contre 47 % pour l'e-mail et 1 % pour les réseaux sociaux) de nos membres, nous le privilégions car il permet de s'assurer de la compréhension de la réponse ». Prochain défi : accompagner les membres qui ne contactent pas le SRM...
Sources :
* Enquête menée auprès de 3 200 consommateurs français interrogés pour évaluer la qualité de l'expérience digitale de 78 entreprises, sur 6 secteurs d'activité
** Baromètre Qualiweb 2023 (Étude réalisée auprès de 1 200 Français, janvier 2023)
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