Gérer les disponibilités, planifier les interventions : les deux enjeux de la mobilité professionnelle
Mobilité des équipes à l'extérieur, mais aussi entre plusieurs sites de l'entreprise… Il faut savoir ce que l'on peut précisément demander au salarié mobile suivant l'instant et le lieu où il se trouve. La gestion de la mobilité, c'est avant tout un exercice de planification opérationnelle.
À LIRE AUSSI
L'entreprise peut tirer profit de la mobilité. « Il existe même plusieurs
situations où la mobilité s'impose », estime Eric Hassid, directeur marketing
de NetCentrex. Par exemple, la gestion des équipes d'intervention sur site dans
le cadre d'un service après-vente, ou encore celle des travailleurs mobiles,
comme des pools d'experts qui bougent. Le centre d'appels qui assure des
fonctions de support technique a aussi besoin de trouver l'expert dans l'heure.
Peu importe qu'il soit chez lui, chez un client, etc. Autre cas de figure :
celui des agents qui travaillent sur plusieurs sites. Dans le domaine bancaire,
par exemple, c'est un conseiller de clientèle hautement qualifié qui ne passe
pas son temps dans une agence. Sa semaine est partagée entre des mi-temps dans
deux agences différentes - on appelle cela le “free sitting”. A l'intérieur de
l'entreprise, la mobilité est celle d'un cadre qui se déplace sur le site et
peut utiliser n'importe quel poste. Pour gérer sa disponibilité, il faut savoir
quel équipement est présent à chaque poste de travail. A certains endroits, il
pourra répondre au téléphone, mais n'aura pas accès à Internet et ne pourra pas
traiter le mail ou le chat. Cette gestion de la disponibilité est aussi
présente dans d'autres exemples de mobilité professionnelle. Pour un taxi,
l'information essentielle à transmettre au centre d'appels est “Je suis
disponible à tel endroit”. Pour une équipe d'intervention, “Je serai disponible
dans une demi-heure”. Pour un conseiller, c'est plutôt “Je suis disponible
pour l'ensemble des communications ou seulement pour une partie”.
Les facettes de la mobilité
Les besoins du centre
d'appels varient aussi. Le centre qui gère des taxis a besoin de mettre le
client en attente et de le reprendre dès qu'une ressource disponible se
déclare, le plus vite possible. Dans le domaine bancaire, il faut savoir gérer
une succession de réponses avec le renvoi d'appel qualifié. Par exemple, un
conseiller de clientèle commencera à traiter l'appel et apportera ses réponses
à plusieurs questions. Mais, si le client souhaite en plus commander un
chéquier, le conseiller va transférer la communication vers le centre d'appels
central le plus apte à gérer cette demande. « La gestion de la mobilité peut
intégrer la valeur du client », explique Eric Hassid. Le client “ordinaire”,
qui souhaite obtenir des informations, sera invité à rappeler plus tard, aux
heures de disponibilité de son conseiller habituel. Mais si c'est un client
important, “VIP”, il faudra, peut-être, lui garantir la réponse en quelques
secondes. Alors, on va joindre son conseiller sur son portable, car on attend
une plus value de cet appel. Cette opération promet une augmentation du
rendement, de la productivité des ressources humaines, des spécialistes de haut
niveau pouvant être partagés entre plusieurs sites de l'entreprise. Enfin, le
télétravail est une autre facette de la mobilité. Il s'agit de fournir du
travail au domicile de l'intéressé pendant certaines périodes, et aussi de
contrôler son rendement à l'heure. Cela permet d'offrir des capacités
additionnelles de traitement aux entreprises. Par exemple, dans le domaine du
voyage, pendant les périodes des grands départs. Cependant, la mobilité pose un
nouveau problème de planification. « Les solutions de mobilité servent à donner
au client une réponse plus rapide qui engage l'entreprise », annonce Laurent
Cavélius, P-dg de Délia Systems. L'outil de planification Opti-time de Délia
est utilisé par le service des logements communaux de la ville de Bournemouth
en Angleterre. Ici, un centre d'appels ouvert 24 heures sur 24 gère les
interventions des techniciens sur le parc de 5 000 logements. Grâce aux
solutions de mobilité, le centre d'appels de Vivendi Environnement est en
mesure de répondre sur la mobilisation d'un technicien, de réaliser le
diagnostic préalable et aussi de s'engager sur la disponibilité des pièces de
rechange. Suivant les réponses obtenues sur l'ensemble de ces critères, le
centre est capable de donner une réponse globale au client quand il l'a en
ligne, et de s'engager au nom de l'entreprise sur les délais d'intervention.
Chez le chauffagiste Domo Service, les deux centres d'appels qui font de la
planification d'interventions ont pu réduire le temps d'un appel de dix à deux
minutes, et faire passer le taux d'appels réussis de 80 à 95 %.
Mise en œuvre et inconvénients
Pour mettre en œuvre
cette démarche dite de “planification sous contrainte”, il faut prendre en
compte un certain nombre de critères, comme la disponibilité, la distance, mais
aussi les critères commerciaux rappelant le type de contrat garantissant, ou
non, une intervention immédiate. Sur le plan technique, le centre d'appels doit
avoir accès aux données provenant du système d'information de gestion des
ressources humaines, afin de connaître les jours de repos des techniciens.
Ainsi qu'au système d'information géographique. Il doit être couplé avec les
logiciels de gestion de production (ERP) et de gestion d'approvisionnement. «
Il y a un lien fort entre la gestion de la relation clients en centre d'appels
et la productivité de l'entreprise », rappelle Laurent Cavélius. Le marché de
la mobilité en entreprise est intéressant, mais pas assez important en taille
pour se comparer avec celui du grand public. Le plus souvent, c'est l'opérateur
qui apporte des solutions axées sur le SMS, le Wap ou l'Intranet mobile. Alors,
le développement est forcément moins rapide que pour le grand public. De plus,
la philosophie de ce marché n'est pas complètement arrêtée car la mobilité
professionnelle apporte quelques inconvénients. Un salarié mobile risque de
perdre le lien social avec l'entreprise… mais elle aussi en pâtit. Il n'y a pas
de contacts informels autour d'une machine à café, pas d'échange de
savoir-faire, pas de conseils prodigués aux juniors. Si ce salarié s'en va,
toute son expérience part avec lui. Il n'y aura pas de relève préparée ; le
nouveau va devoir tout recommencer à zéro. L'entreprise se trouve donc otage de
cet éloignement pourtant voulu. Autant de problèmes qu'il faut savoir anticiper
avant de développer des solutions de mobilité à grande échelle.