Un système de rémunération pour motiver les téléconseillers
Le salaire est avant tout la contrepartie d'un travail accompli dans le
cadre d'une relation subordonnée. Il est fixé dans le contrat de travail en
fonction du niveau d'emploi, de la durée du travail et, sous réserve du
respect des minimums légaux et conventionnels et des principes d'égalité de
traitement. Une fois contractualisé, le salaire ne pourra pas être modifié
unilatéralement ou varier en fonction des performances (ou contre-performances)
du salarié ou de l'entreprise. Sauf à introduire un système de rémunération
variable en fonction d'objectifs déterminés.
Différents systèmes
La partie fixe du salaire est le prix d'un travail
apprécié selon un niveau de qualité et de valeur ajoutée considérés comme
normaux et en deçà desquels l'employeur s'interrogera sur la valeur du
titulaire de l'emploi... ou de l'emploi lui-même. La partie variable, quant à
elle, est liée à un niveau supérieur de performance. Elle remplit une fonction
de récompense. Mais surtout elle est vecteur de motivation des salariés.
Intéressement, rémunération variable, primes sur objectifs. Autant de formules
qui recouvrent des réalités différentes. Il est donc important en tout premier
lieu que l'entreprise définisse clairement ses objectifs en termes de
politique salariale avant de se lancer dans l'aventure de la rémunération
variable. S'agit-il d'intéresser tout ou partie du personnel à la réalisation
d'un objectif commun (intéressement collectif) ou au contraire de motiver les
collaborateurs sur la base de leurs performances individuelles ? Chaque
système présente avantages et inconvénients et surtout répond à des règles
juridiques différentes. Si l'entreprise choisit un intéressement collectif,
elle pourra, en s'inscrivant dans le cadre légal (1), bénéficier des
exonérations de charges sociales. Voire fiscales si elle met parallèlement en
place un dispositif d'épargne salariale. Si, au contraire, elle opte pour un
système de rémunération variable individualisé, c'est aux règles fixées par la
jurisprudence qu'elle devra se conformer. A cet égard, les nombreux arrêts
rendus récemment par la Cour de cassation témoignent de l'intérêt mais aussi
de la complexité du sujet.
Les règles à respecter
Variable ou non, la rémunération est un élément du contrat de travail, c'est
donc sur ce terrain que se situe la jurisprudence pour fixer les limites du
pouvoir de l'employeur en la matière. La tentation est grande de prévoir dans
le contrat de travail des clauses autorisant l'employeur à modifier
unilatéralement les conditions d'octroi d'une prime sur objectifs ou des
objectifs eux-mêmes. Mais, pour les juges, la clause par laquelle un employeur
se réserve le droit de modifier, en tout ou partie, le contrat de travail est
nulle (2). L'employeur ne peut, contractuellement, obtenir le droit de
modifier unilatéralement le contrat de travail ! Ce qui pour autant ne sonne
pas le glas des clauses de variation de salaire puisqu'une clause du contrat de
travail peut prévoir une variation de la rémunération du salarié dès lors
qu'elle est fondée sur des éléments objectifs, indépendants de la volonté de
l'employeur, ne fait pas porter le risque de l'entreprise sur le salarié et n'a
pas pour effet de réduire la rémunération en dessous des minima légaux et
conventionnels(3). Ces règles posées, comment les appliquer à des
téléconseillers pour qu'en toute sécurité juridique ils puissent bénéficier
d'un système de rémunération motivant ? Bien délimiter le cadre En tout premier
lieu, la mise en place d'un système de rémunération variable ne doit pouvoir
conduire à un salaire inférieur au minimum légal ou conventionnel (4) qui
constitue une garantie pour le salarié. L'employeur aura intérêt à prévoir un
salaire fixe proche du minimum obligatoire. Mais avec une partie variable qui
permette une espérance de gain supérieur au salaire de l'emploi si les
objectifs sont atteints. En second lieu, les objectifs contractuels doivent
refléter au mieux la performance individuelle sans être affectés par des
éléments sur lesquels l'employeur a une influence directe. Des téléacteurs
pourraient être intéressés sur leur taux de transformation, des
téléconseillers sur la durée moyenne des consultations. Il conviendra de
prévoir un seuil de déclenchement. C'est-à-dire le niveau de performance
minimum en deçà duquel il n'y a pas de prime. Mais également un plafond en
valeur absolue. Car, si le salarié ne peut subir le risque d'entreprise, en
revanche, il pourrait bénéficier d'une conjoncture particulièrement favorable
qui fausserait l'appréciation de sa performance individuelle. L'explosion du
marché, un nouveau client, etc. Enfin, il faut veiller à ce que le système
reste juste et lisible pour le salarié. Sauf à encourir le risque d'une
incompréhension entraînant un effet inverse sur sa motivation ! La mise en
place d'un tel système suppose une rédaction stricte et précise de la clause
contractuelle. Ainsi qu'un suivi régulier, au cours d'un entretien annuel
d'appréciation, qui pourra être, si nécessaire, l'occasion de revoir, d'un
commun accord, les objectifs pour l'année ou les années à venir (5). Enfin, la
rémunération variable reste un choix managérial qui ne ressort pas de la
négociation avec les organisations syndicales. En revanche, sa mise en oeuvre
suppose préalablement une information et consultation du comité d'entreprise.
(1) Art. L. 441-1 du Code du travail. (2) Cass. soc. 27-02-2001 (3) Cass. soc.
2-07-2002 (4) Salaire minimum conventionnel d'un TC : 1 143,63 euros (1 158,18
pour un confirmé) (5) Dans ce dernier cas, la clause peut prévoir dès l'origine
sa propre évolution, il ne s'agit pas alors du droit unilatéral de l'employeur
de modifier la clause.