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Philippe ClogensonDirecteur de la relation clients de Renault

S'appuyant sur quatre métiers, la direction de la relation clients de Renault participe à la stratégie client du constructeur dont la finalité est de renforcer l'attachement à la marque. Et ce, à travers une démarche de plus en plus multicanal.

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@ Photos: Marc Bertrand

Comment jugez-vous, globalement, l'évolution de la relation client au sein du monde automobile?

Dans l'industrie automobile, qui est architecturée autour de la conception, de la fabrication et de la vente de véhicules, le client n'a pas toujours, dans le passé, été la priorité numéro un des constructeurs. La priorité numéro un, c'était le produit. Néanmoins, depuis quelques années, lié au fait que les consommateurs sont de plus en plus avertis, qu'un certain nombre de secteurs sont en pointe sur cet aspect (téléphonie mobile, banques, assurances...), un changement culturel est en cours. Et, maintenant, on remet le client au coeur des préoccupations. Renault étant loin d'être le dernier dans ce domaine. Le client fait désormais partie intégrante de la stratégie de l'entreprise et contribue à faire en sorte que les produits soient plus attractifs. Ce qui se matérialise par trois dimensions. Les centres de relation client, dans l'automobile, étaient très organisés autour du traitement de la réclamation. Aujourd'hui, ils traitent de plus en plus la relation client, c'est-à-dire que l'on rebondit derrière une réclamation pour traiter le client au mieux et faire en sorte qu'il soit plus fidèle. Deuxième point: les attentes clients, au niveau des services liés à la mobilité par exemple, sont de plus en plus intégrées dans la conception amont des véhicules. Troisième point: les constructeurs, dont Renault, sont très attachés à la satisfaction client que l'on essaye de mesurer de plus en plus. Avec, derrière et afin de valoriser nos clients à travers leurs attentes, des programmes de fidélisation.

Quelle est la place de la relation client chez Renault?

Elle constitue une des pièces de la stratégie client de Renault. Celle-ci repose sur un enjeu majeur: faire renouveler le client au sein de la marque. Un deuxième enjeu est de faire revenir nos clients dans le réseau pour qu'ils consomment, au sein de la marque, des produits, tels que des accessoires, et des services, tels que du financement, des contrats de services... Un troisième enjeu est celui du développement de l'attachement à la marque. Ces trois enjeux sont les piliers de la stratégie client, qui se décline sur tous les canaux de contacts. Que ce soit en «push», de la marque vers le client avec le marketing direct par exemple, et en «pull», avec le réseau, les centres de contacts, le Web et bientôt tous les univers digitaux.

Cette stratégie client vient enrichir l'expérience client. En fonction de la façon dont la marque lui parle, du vécu qu'il peut avoir avec les produits..., un client va avoir différentes expériences. L'objectif d'un constructeur est de faire en sorte que la somme de ces expériences soit positive, que la perception du client soit positive et que, derrière, la marque soit présente au moment où il réfléchit à un renouvellement et, enfin, qu'il renouvelle effectivement son véhicule au sein de la marque.

«Notre enjeu: faire renouveler le client au sein de la marque»

@ Photos: Marc Bertrand

«Nous sommes le «père technique» pour l'ensemble des filiales dans le monde.»

Comment votre direction se situe-t-elle dans le cadre de l'organigramme Renault?

La direction de la relation clients a rejoint, à l'automne dernier, la direction marketing monde. C'est un véritable avantage culturel parce que la problématique relation client remonte là même où sont conçus les plans de commercialisation des véhicules. Elle est donc intégrée très en amont.

Quel est son champ de compétences?

Cette direction centrale, qui regroupe une trentaine de personnes, a quatre métiers: les centres de contacts, les programmes d'offres de fidélisation et de conquête, les bases de données marketing et leurs outils associés, et enfin Internet et l'e-commerce; nous gérons les sites commerciaux de chaque pays. Internet est un canal qui se développe de plus en plus. Sur le G 15, nos quinze plus gros marchés, nous avons 40 millions de visiteurs par an. Et 67% des clients qui franchissent la porte d'une concession se sont déjà prérenseignés on line.

Sur ces quatre métiers, nous sommes le «père technique», la référence, les experts métiers... pour l'ensemble des filiales dans le monde. Nous définissons les stratégies, les méthodes, les outils, les process et nous nous assurons de leur mise en oeuvre dans les différents pays en tenant compte des spécificités locales. Avec pour objectif de gérer l'ensemble dans une optique multicanal.

Quelles ont été les évolutions les plus marquantes de ces dernières années?

Comme je le signalais précédemment, nous sommes de plus en plus en train de passer d'un simple traitement de la réclamation à un réel service de relation client. Quand un client téléphone pour une difficulté, nous faisons désormais en sorte de rebondir. Si l'on arrive à régler son souci, on se situe à un moment favorable où il est ouvert au discours de la marque ou à l'évocation d'un futur achat.

Une autre évolution, chez Renault, a été celle de l'internationalisation de la relation client. Nous avons des marchés historiques et de plus en plus de marchés émergents sur lesquels nous sommes dans une phase d'internationalisation des métiers de la relation client. Sur certains marchés, il nous arrive de démarrer avec une feuille blanche. Sur la Russie, par exemple, qui devrait être le premier marché européen à l'horizon 2011, et où nous vendons de plus en plus de véhicules du groupe, nous avons une demande métier pour monter un service clients.

Autre évolution: l'off-shorisation des prestations, qui a commencé en 2003 et qui est une tendance consécutive à une première étape d'externalisation qui, elle, a démarré fin 1999. Enfin, il faut signaler la professionnalisation des métiers de la relation client, celle-ci étant devenue une vraie filière, reconnue chez les grands annonceurs.

Quel est le rôle de vos centres de relation client et comment sont-ils organisés?

Leur premier rôle est de répondre aux demandes d'informations clients, de tout ordre. Ensuite de traiter les réclamations. En la matière, ce qui est important, c'est de traiter le problème au plus près de la demande du client et le plus vite possible; l'idéal étant de le faire chez le concessionnaire. Plus vous traitez vite, plus vous avez de clients qui se disent satisfaits. Les autres rôles du téléphone sont de véhiculer les valeurs de la marque, de contribuer à la fidélisation et à la détection de projets de renouvellement. Par ailleurs, c'est un canal important de remontées d'informations terrain suite, par exemple, à des lancements de produits.

Au niveau organisation, nous avons un front-office qui traite les demandes d'informations, de services et les réclamations clients au premier niveau, et un back-office, en deuxième niveau pour les opérations plus complexes. Dans certains pays, les plateformes de relation clientèle pratiquent également du marketing relationnel, c'est-à-dire des appels sortants. Aujourd'hui, nous disposons d'une vingtaine de centres de relation client dans le monde, couvrant une quinzaine de langues. Environ 90% de nos centres sont externalisés et environ la moitié d'entre eux sont en off-shore. Nous travaillons avec une dizaine de prestataires; arvato et Teleperformance représentant environ 50% du volume global. 80% de ce volume est concentré sur le «G5», nos cinq plus gros marchés historiques.

Selon vous, quelles sont les conditions de réussite à l'off-shore?

De par mon expérience de prestataire et maintenant d'annonceur, j'ai une conviction extrêmement profonde: si l'on va à l'off-shore uniquement pour un problème de réduction de coûts, on fait une erreur. La réduction de coûts ne peut être le seul item majeur. En fait, il y en a trois autres: la recherche de flexibilité, que l'on n'a pas forcément sur un certain nombre de marchés ou de pays; la qualité, car l'off-shore n'est pas synonyme de mauvaise qualité - il peut être synonyme de très bonne qualité à partir du moment où il est piloté en central. Et enfin l'innovation et les ruptures technologiques qui, sur ces métiers, sont très importantes et pour lesquelles les prestataires sont aujourd'hui les mieux placés.

Si, dans votre choix de prestataires, vous vous basez sur ces quatre items, vous avez de fortes chances de réussir votre off-shorisation.

Comment évoluent vos différents canaux de contact?

Notre réseau reste le premier canal de la relation client. Les valeurs de la marque, sur lesquelles nous communiquons actuellement - «Proche, fiable et enthousiaste» -, reflètent d'ailleurs bien l'importance du réseau. Au-delà, la part des contacts par téléphone reste majoritaire. Sur l'ensemble de nos plateformes, nous recevons un million de contacts par an. Le téléphone représente environ 68% des contacts entrants. L'e-mail, qui est en croissance, 17%. Quant au courrier, 9% des contacts, et au fax, 6%, ils sont en décroissance. Dans les années qui viennent, nous allons être confrontés à l'émergence de nouveaux médias. La clé de voûte étant l'intégration multicanal, qui explique d'ailleurs notre organisation. Aujourd'hui, un client veut une relation «sans couture», c'est-à-dire ne pas être satisfait uniquement sur un canal, mais bien être satisfait globalement.

Afin de mesurer la satisfaction client, quels sont les moyens mis en oeuvre?

Nous menons plusieurs types d'enquêtes de satisfaction. Quand un véhicule neuf a été livré par le réseau, nous nous assurons de la bonne perception de cet événement avec des appels téléphoniques à périodicité mensuelle. Nous réalisons ensuite des enquêtes liées à des opérations d'entretien chez un concessionnaire, avec un appel à J + 1 après l'intervention et une enquête complète sur un échantillon de clients dans le mois qui suit l'intervention. La plateforme de relation client peut également s'assurer du bon traitement d'une réclamation. Aujourd'hui, sept clients Renault sur dix se disent satisfaits du traitement de leur réclamation.

Par ailleurs, Renault participe à des enquêtes multiconstructeurs telles que les enquêtes annuelles SSM, qui sont menées par courrier sur un échantillon de possesseurs de véhicules achetés depuis deux ans, et les enquêtes CCX, également papier et annuelles, qui analysent la satisfaction sur un échantillon de clients ayant acheté un véhicule neuf quatre mois auparavant.

Dans le domaine du marketing relationnel, il existe actuellement des recherches, venant des Etats-Unis et arrivant en Europe, qui se basent sur l'idée que, s'il est bien de mesurer la satisfaction, le plus important est de voir quelle est la corrélation entre la satisfaction et l'intention de réachat. Pour Renault, il s'agit là d'une notion très importante. Mais, si elle est simple sur le papier, il n'en est pas de même dans la pratique.

Comment les valeurs de la relation client sont-elles véhiculées au sein du personnel Renault?

Déjà, les valeurs mêmes de la marque contribuent à les véhiculer. Ensuite, dans le groupe, il existe le PER, «Plan d'Excellence Renault», qui est un plan global comportant différents volets. Le volet 4 a pour finalité d'«améliorer la satisfaction client en vente et après-vente, en développant l'efficacité du réseau et la qualité des services». Ce plan concerne aussi bien l'accueil atelier que l'appel après livraison, la «célébration» de la livraison, les showrooms, les véhicules d'essai... Cet ensemble participe à mettre le client au centre des préoccupations du réseau et de l'entreprise. Un de ses objectifs est par ailleurs de faire entrer la marque dans le Top 3 des enquêtes de satisfaction client.

Quelles sont les prochaines étapes de la stratégie client de Renault?

Sur les pays où nous sommes déjà implantés, notre démarche est avant tout une démarche de professionnalisation, de développement de la fidélisation, d'optimisation et d'animation de nos prestataires. Sur les marchés émergents et à fort potentiel, nous poursuivons le déploiement des fondamentaux de la relation client, des structures, des méthodes, des ressources, des outils, de la mesure...

entreprise

Groupe Renault
- Trois marques: Renault, Renault Samsung Motors et Dacia.
- Ventes monde 2007: 2484072 véhicules (+2,1%).
- Chiffre d'affaires 2007: 40 682 millions d'euros.
- Marge opérationnelle: 3,3% (1354 MEuros).
- Nombre de salariés dans le monde en 2007: 130 179.


Renault en France
- Première marque, avec 24,8% de part de marché, soit 626 706 véhicules immatriculés.
- Nombre d'agents et de concessionnaires: 5040.
- En 2008, lancement de 13 nouveaux modèles en France et 9 dans le monde.

Parcours

Marié, 4 enfants, Philippe Clogenson est diplômé de l'Ipag (83) et de l'EMBA CPA HEC (93). Il débute sa carrière en 1983 chez Xerox comme vendeur, puis chef des ventes. En 1987, il devient ingénieur d'affaires chez MIPS (broker-leaser en matériels IBM), puis rejoint Cortex dont il sera directeur commercial et marketing de 1989 à 1995, date à laquelle il devient directeur de marché chez Koba. En 1997, il intègre Arvato Services où il sera dg / Business Development jusqu'en 2004, année où il devient directeur commercial et marketing de Mobile & Permission. Depuis 2006, Philippe Clogenson est directeur de la relation clients de Renault.

François ROUFFIAC

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