Les PME mettent en chantier leur relation client
Le marché de la relation client continue de progresser. Et, si les grands comptes restent, bien sûr, le terrain privilégié des constructeurs, éditeurs et autres prestataires de services, le «mid market» commence à susciter les convoitises. Plusieurs raisons expliquent cette tendance. Les petites et moyennes entreprises (PME) sont plutôt actives dans la construction de leur stratégie de relation client. En effet, d'après une étude IDC datée de 2007, le marché (licences et services) progresse dans son ensemble de 5% alors qu'il atteint 8% si l'on prend l'évolution pour les petites entreprises. En outre, 62% des entreprises ne sont pas du tout équipées en CRM (Source: «Le CRM et les PME en France», Sage). Autre motif venant expliquer le mouvement, les sociétés de taille importante sont souvent équipées et on assiste à un début de saturation de la demande. Pour autant, les PME n'ont pas la même démarche que les entreprises de taille supérieure. Elles ont plus de mal à identifier leurs besoins et vivent sur leurs acquis, agissent par habitude. Elles considèrent davantage le CRM comme un principe théorique que comme un moyen de générer des profits. Leur cheminement s'appuie, la plupart du temps, sur la détection de besoins opérationnels ou de dysfonctionnements.
Olivier Savouret (Sopra Group):
«Il faut que le marketing, la vente et le service clients fonctionnent de manière décloisonnée pour partager l'information.»
Sur le plan organisationnel, elles rencontrent des difficultés similaires à celles auxquels les grands groupes font face. «Les PME n'identifient pas toujours la relation client comme une fonction de l'entreprise. Cette dernière est partagée entre la direction commerciale, la direction marketing ou logistique, les affaires générales et le standard», constate Antoine Dumas, directeur général et président d'Acemis Conseil.
Bien souvent, «les collaborateurs ont peu de temps pour s'informer, prendre du recul, mesurer l'adéquation entre les solutions proposées et leur métier», indique Claude Cordier, directeur marketing au sein de la division Sage CRM Solutions. Il convient donc de capter leur attention en précisant comment les outils et la construction d'une orientation client peuvent améliorer leur quotidien. Le pragmatisme fait loi. «Chaque entreprise a développé une façon de travailler avec ses clients qui lui est propre et est liée à sa culture de produits et d'offre. Il ne faut pas casser cette méthodologie. Il importe au contraire de faire évoluer la société et d'enrichir sa réflexion», assure Christine O'Meara, chef de produit Microsoft Dynamics de Microsoft France.
La prise de conscience du besoin est progressive. Depuis 2004, les PME se posent des questions sur le CRM. En même temps, elles font face à des clients dont le niveau d'exigence a considérablement augmenté. Elles sont confrontées à des comparaisons avec l'ensemble de l'univers client. L'expérience client fait office de benchmark. En outre, la concurrence est de plus en plus exacerbée et, dans ce contexte, «il y a un enjeu à s'orienter client. Au-delà du prix, le service prime», soutient Arnaud Valéry, chef de marché chez Campaneo. Et Stéphane Calimodio, associé fondateur de Synolia et responsable de l'activité CRM, de compléter: «Même dans le secteur industriel, les PME ne peuvent plus se contenter de rester centrées sur leur produit.»
Les petites structures sont donc amenées à se réinventer. D'autant que des déclencheurs comme Internet ont accéléré le mouvement.
Malgré l'intérêt pour les approches de relation client, des blocages demeurent. Ces derniers se situent assez fréquemment au niveau des ressources humaines susceptibles d'accompagner le changement. Les collaborateurs sont souvent en charge de plusieurs missions et rencontrent des difficultés pour dégager du temps. Or, les projets CRM demandent une réelle implication et une remise à plat des processus. Dans les PME, bien souvent le management de proximité joue un rôle essentiel. Il repère les attentes liées à la mise en place d'outils et prépare ses équipes.
De multiples contextes
Globalement, il n'existe pas d'homogénéité des niveaux d'avancement en matière de relation client. Si certaines PME ont déjà mis en place des stratégies pointues, d'autres cherchent à construire les fondations de leur vision client. A noter tout de même, qu'en règle générale, les premières ont «un ratio effectif en contact avec les clients sur l'effectif global important», souligne Olivier Savouret, senior manager chez Sopra Group. En outre, les entreprises orientées grand public s'inscrivent aussi dans cette tendance, essentiellement parce qu'elles ont des problématiques de conquête, de fidélisation et d'industrialisation de process de relation client. «Pour certaines sociétés, gérer le cycle du client (ventes, marketing, fidélisation, traitement de demande, suivi de dossiers) est devenu un passage obligé», poursuit Olivier Savouret. Le secteur d'activité de la PME influe aussi sur son appétence à définir et à développer sa stratégie de relation client. Les e-commerçants ont bien compris les bénéfices d'une vision 360° du client. A l'autre bout de l'échelle, des acteurs sont en phase d'observation. «Les services et l'industrie sont plus à la traîne», précise Arnaud Valéry.
A tort, quelques PME sous-estiment l'importance de la relation client et pensent pouvoir se contenter d'un outil de gestion de contacts. Pourtant, «la gestion de contacts ne va pas permettre défaire progresser la démarche commerciale et marketing et de satisfaire le client. Tout ce qui relève de la gestion des workflows assure une meilleure gestion des processus dans la relation», intervient Christine O'Meara. Des sociétés de petite taille s'inscrivent dans un long processus de vente, nécessitant de nombreuses interactions. Elles se doivent donc, pour améliorer leur performance et saisir les opportunités commerciales, de disposer d'historiques. D'autres adressent un grand nombre de clients et ont besoin d'un outil pour gérer l'activité marketing ou encore tracer les comportements d'achat. Pour les entreprises convaincues par l'utilité de mettre sur pied une démarche CRM, la compatibilité avec les aspects métier a de la valeur. Presque autant que la rapidité de déploiement des solutions.
Mise à plat globale
En amont des projets, les PME doivent s'attacher à dresser un état des lieux de leur relation client. «Elles ont alors intérêt à dégager les bonnes pratiques et à adapter leur process afin d'améliorer leur relation client. Des études de satisfaction permettent notamment d'y parvenir», conseille Antoine Dumas. Une fois ce travail accompli, la définition d'objectifs et de lignes directrices, contribue au bon déroulement des démarches. La plupart des entités s'interrogent alors sur leur organisation, le pilotage de l'activité, la segmentation de la clientèle, etc. «Le CRM doit donner de la visibilité aux dirigeants sur le business», explique Christine O'Meara. C'est ainsi que les premiers équipements concernent essentiellement le suivi de contacts, la gestion des rendez-vous et l'organisation de l'activité commerciale. Parfois, les PME souhaitent aller plus loin et disposer de solutions permettant de détailler les comptes rendus de rendez-vous et de suivre les opportunités commerciales.
Ensuite seulement, et dans la majorité des cas, l'intérêt se porte sur l'amélioration voire la construction du service clients et passe par la mise en place d'un suivi des demandes et des réclamations. Quelques PME font aussi directement confiance à des outils d'e-mailing et de ciblage. L'ordre de déploiement des différents modules dépend des enjeux que se fixe l'entreprise. «Globalement, il faut que le marketing, la vente et le service clients fonctionnent de manière décloisonnée pour partager l'information», explique Olivier Savouret.
Guillaume Baraton (NextiraOne)
«Les besoins des PME sont aussi importants que ceux des grands comptes. C'est la capacité d'investissement qui n'est pas la mème»
Une offre adaptée
«Quand on est une PME, on doit avoir un outil très bien dimensionné, tout en un et qui répond au cas d'un dirigeant qui gère tout dans la société», prévient Arnaud Valéry. Les éditeurs ont ainsi saisi l'importance de coller aux exigences des PME. «On assiste à l'émergence d'une nouvelle offre, plus compatible avec les attentes des PME. En outre, elle s'est largement démocratisée», constate Stéphane Calimodio.
En ce qui concerne les principales attentes vis-à-vis des solutions CRM, le partage de l'information arrive en tête. Pour les managers, ce paramètre compte beaucoup. Les nouveaux collaborateurs de l'entreprise apprécient aussi de disposer d'éléments concrets pour mener à bien leur mission. De plus, l'absence d'un salarié ne pénalise pas le client puisque, grâce aux historiques, les interactions sont tracées et assurent à la personne qui prend le dossier en route de connaître le contexte avant d'agir. L'historique peut aussi être utile pour comprendre les variations d'activité. Avec une solution CRM, il est possible de conduire une analyse des ventes passées. Elle permet de mieux piloter le business et d'adopter des process industriels. «Le but est d'utiliser la technologie pour valoriser l'information client; l'utiliser pour atteindre des objectifs business, pour croître, être rentable et satisfaire le client», précise Olivier Savouret.
En parallèle, comme les grands comptes, les PME sont conscientes qu'elles ne doivent pas lésiner sur la qualité des bases de données. Progressivement, elles ressentent le besoin de disposer de fichiers qualifiés et de mener une segmentation de leur clientèle.
Plusieurs contraintes viennent limiter le projet des petites entreprises. Elles sont d'abord d'ordre financier. «Les besoins sont aussi importants chez les PME que chez les grands comptes. C'est la capacité d'investissement qui n'est pas la même», précise Guillaume Baraton, responsable des solutions centres de contacts de NextiraOne.
De plus, dans les PME, les salariés ont relativement peu de temps pour se familiariser aux interfaces des outils. En conséquence, l'aspect intuitif compte beaucoup. L'outil ne doit pas être déstabilisant. «Il faut rester proche du mode de fonctionnement passé de la PME. Les équipements ne doivent pas s'avérer trop structurants: la PME a besoin qu'on lui laisse de la flexibilité», intervient Christine O'Meara. Et non de se lancer dans des chantiers trop ambitieux et démesurés. Les éditeurs et constructeurs, conscients de ces aspects, ont développé des offres dédiées avec des fonctionnalités moins pointues, plus accessibles financièrement et en termes d'usage. «L'offre opérationnelle évolue. Il existe une palette de services pour que les PME puissent adapter leurs moyens à leur politique», indique Antoine Dumas. Bien souvent, les structures de petite taille se lancent à la recherche de solutions packagées. Elles veulent des outils en mesure de leur simplifier la tâche et de favoriser les gains de productivité. De tels outils existent. Il devient alors possible de transformer, par exemple, un devis en commande puis de facturer le client. De plus, ces liens favorisent la cohérence dans les flux d'informations. «Nous devons assurer un lien dynamique entre le CRM et le back-office», intervient Claude Cordier.
Parmi les autres fonctionnalités appréciées par les PME, la mobilité arrive entête. En effet, «elles se posent beaucoup de questions sur la portabilité des applicatifs», constate Antoine Dumas.
En parallèle, l'open source commence à susciter de l'intérêt. «Les PME ont ainsi accès à un outil CRM professionnel à coût zéro, capable de s'interfacer», souligne Olivier Savouret. «Ce mode convient aux PME pour démarrer une approche CRM et piloter l'activité», ajoute Stéphane Calimodio.
Autre mode de consommation, l'ASP sait convaincre les PME. Siebel, Salesforce.com, Microsoft ou encore SAP, beaucoup d'éditeurs proposent d'héberger les applicatifs. L'ASP présente de multiples avantages. «C'est un concept intéressant pour les PME car elles n'ont pas besoin d'administrer un serveur», poursuit Olivier Savouret. Des propos complétés par Arnaud Valéry: «Avec l'apparition du mode ASP, qui mutualise les coûts, les outils se démocratisent.» La location est une bonne manière d approcher la gestion de la relation client. Même si l'implication humaine autour du projet CRM doit rester importante.
Au final, PME, constructeurs et éditeurs sont sur la même longueur d'ondes. Les uns cherchent à bâtir leur relation client tandis que les autres mettent leur savoir-faire au service de cette démarche.
Un centre d'appels pour gérer la relation client
Parfois, le dispositif CRM requiert les compétences d'un centre d'appels. Ce dernier a la possibilité de prendre en charge le suivi des demandes clients et des réclamations, la détection de leads, la prospection, la prise de commande... Il peut également gérer l'accueil, dont l'Importance n'est plus à prouver pour les PME. Le standard est une vitrine, un point d'entrée pour les clients et prospects. Il donne une Image de la qualité de service. La prise d'appels mérite alors d'être la plus adaptée possible.
Comme pour les grandes entreprises, environ 80% des acteurs choisissent de créer une structure en Interne. Le recours à un outsourceur reste pour autant possible, même si le ticket d'entrée est élevé. «Les PME leur confient des missions dont les volumes restent faibles, mais qui s'inscrivent dans la durée», estime Olivier Savouret, senior manager chez Sopra Group. Tous les prestataires ne sont pas intéressés par ce marché des PME, mais des acteurs locaux, de taille modeste ou positionnés sur des niches, ont une offre dédiée. En ce qui concerne l'équipement, les petites entreprises choisissent des outils plus orientés «mid market», comme ceux de Noble Systems, Vocalcom, CBC Développement ou encore Alcatel. «Nous avons développé des solutions spécifiques, performantes et mieux dimensionnées pour les PME», atteste Cyril Brindeau, business developpment SMB d'Alcatel. Mais certaines s'équipent aussi comme les grands comptes en Avaya, Nortel, Genesys... Une chose est sûre: «La mise en place d'une solution révolutionne le traitement des appels», affirme Cyril Brindeau.
Avant de mettre en place des outils de téléphonie, les PME doivent tout d'abord détailler les process pour identifier les flux, les gérer et les router vers les bonnes compétences. «La gestion des files d'attente conduit à se poser les bonnes questions sur les compétences et les missions en adéquation avec ces aptitudes», estime Guillaume Baraton, responsable des solutions centres de contacts de NextiraOne.
Cyril Brindeau (Alcatel)
«Nous avons développé des solutions spécifiques, performantes et mieux dimensionnées pour les PME».