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La loi des priorités

La filiale de Suez Lyonnaise des Eaux a misé sur la polyvalence des conseillers. Ce qui lui permet de fluidifier le trafic sur une échelle de priorités et de croiser divers paramètres de productivité.

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Comment s'organise l'activité centre d'appels de Noos ?


Elle regroupe trois métiers distincts : la vente, ou télémarketing, qui fonctionne essentiellement en appels entrants et représente 40 % des effectifs ; la gestion de clients, qui repose aussi presque uniquement sur de la réception et concerne 50 % des équipes ; le dépannage à distance, qui emploie les 10 % restants. Nous disposons d'un gros site dans les murs du siège social à Paris-Bercy, qui abrite un service clients, un laboratoire télévente et le SAV. Ce qui représente 250 positions. Nous comptons également deux gros call centers déportés chez nos sous-traitants. Le premier, exploité chez Euro CRM au Kremlin-Bicêtre, est plutôt axé sur de la télévente et emploie 230 personnes pour notre compte. Le deuxième, confié à Haÿs Ceritex, est plutôt dédié au service clients, tant sur le plan technique que commercial. Il emploie environ 200 personnes, pour l'instant à Boulogne, mais bientôt sur un autre centre d'appels au Mans. Ces trois call centers sont reliés en réseau virtuel, avec un point d'entrée unique qui se trouve à Bercy.

Au vu de la croissance de l'activité, la part de l'outsourcing est-elle vouée à grandir ?


Le développement de l'activité se fera sans doute sur la sous-traitance. En sachant qu'il y aura toujours un rapport à respecter : au moins 30 % de l'activité doit être conservée en interne. Cela concerne surtout les secteurs clés comme le dépannage et tout ce qui nécessite un niveau de formation élevé et un turn-over minimum. Cela dit, il nous reste à faire de gros gains de productivité. Nous sommes légèrement surdimensionnés, et malgré le volume croissant d'appels, nous ne devrions pas augmenter les effectifs de manière significative. Nous allons plutôt travailler sur une meilleure maîtrise des process.

Quelle maîtrise avez-vous du service confié à des sociétés sous-traitantes ?


Nous communiquons à nos partenaires outsourcers une grille de profils types. Le téléconseiller doit avoir un bon niveau d'étude, de discours, d'expérience. En matière de salaires, nous soumettons également des cadres, afin d'éviter les gaps entre les salariés en internes et ceux des sous-traitants. Nous émettons également des règles assez serrées en termes de formation continue, et nous participons à toutes les sessions de formation. Par ailleurs, nous mettons en place des formules intéressantes, comme le fait de placer une équipe de 10 télévendeurs internes sur le site d'Euro CRM au Kremlin-Bicêtre, avec pour objectif d'écouter, de faire attention à la teneur du discours et de nous faire du reporting sur les méthodes et le traitement du service chez nos sous-traitants.

Comment s'organise la gestion des flux ?


Au sein des trois activités centrales du centre d'appels de Noos, les conseillers sont polyvalents, et traitent aussi bien les mails que le téléphone ou les fax. Ce qui limite au minimum les pertes de trafic. La multicompétence nous a permis de mettre en place un système de priorité : l'appel entrant est priorité un, l'e-mail priorité deux, l'appel sortant est priorité trois. Un classement sur lequel nous allons croiser une autre échelle de priorité, calquée celle-ci sur le taux de concrétisation des fichiers. Un fichier sur lequel on réalise 10 à 15 % de transformation va être priorité trois, un autre sur lequel on enregistre 2-3 % sera priorité cinq. Les conseillers sont logués avec des niveaux de priorité : ainsi, on ne perdra jamais d'appels spontanés, puisque, au moindre besoin, on fera jouer le call blending en loguant automatiquement un conseiller en priorité cinq.

Quel est le volume d'appels traités au travers de vos différentes activités ?


Chaque mois, nous recevons 140 000 appels sur la structure clients, 105 000 sur la télévente et 16 000 en SAV. Les e-mails entrants se chiffrent aujourd'hui à environ 200 par jour pour la télévente, à 300 pour le service clients. Le trafic général va croissant, tant du côté clients, puisque le parc abonnés augmente, que du côté prospects, puisque la communication est de plus en plus soutenue. Chaque campagne de communication installe un accroissement du volume. Nous avons un fond de commerce qui se situe, pour le télémarketing en l'occurrence, à environ 5 000 appels. Une fois la campagne terminée, on passera de 5 000 à 5 500 appels. Et ce, de manière récurrente. Selon nos calculs, on estime qu'un client Noos appelle en moyenne 1,7 fois par an. Les clients récents et les internautes appelant plus souvent que les autres.

Quelles sont vos règles en matière de productivité et de qualité de service ?


Chaque grande entité a ses propres règles en matière de productivité. Le dénominateur commun, en termes de mesure, recouvrant le nombre d'appels reçus et traités, le temps d'attente, bref la productivité. Mais du côté du service client, on s'attachera plutôt à la qualité du service. Du côté de la télévente, en revanche, on va davantage observer le nombre de contrats raccordés par heure travaillée. Ce qui variera d'ailleurs en fonction de l'ancienneté de l'agent. En l'occurrence, un nouveau conseiller sera affecté aux niveaux de priorité trois, quatre et cinq. Nos normes de qualité de service sont assez classiques : taux de perte d'appels, temps de décroché, avec un objectif de moins de 30 secondes, productivité. Nous avons également mis en place un petit baromètre pour nos plateaux internes, confié à Euro CRM : accueil, écoute, argumentation, conclusion, qualité du discours. Nous pratiquons l'écoute, mais en essayant le plus souvent possible de prévenir les intéressés, afin de ne pas verser dans l'illégalité.

Les distributeurs de contenus numériques ont souvent été montrés du doigt pour leur piètre qualité de service. Qu'en est-il aujourd'hui en ce qui vous concerne ?


Au début, nous avions de nombreux systèmes de gestion différents. Chaque activité avait en quelque sorte le sien. Ce qui pouvait donner au client une impression de désordre. Aujourd'hui, le service est beaucoup plus fluide. En matière de perte d'appels, nous sommes arrivés à des niveaux inférieurs à 10 %. Nous avons encore sans doute quelques améliorations à faire au niveau de la hot line, mais il faut dire que nous avons affaire à des clients avec un niveau d'exigence très élevé. Pour avoir de l'ensemble de notre service une perception interne homogène, nous allons mettre en place un baromètre de satisfaction clientèle. Nous préparons un appel d'offres dans ce sens.

Ressentez-vous des difficultés en matière de recrutement ?


Pas en ce qui concerne les équipes en interne. Je reçois trois à quatre CV par semaine, pour un besoin de recrutement de deux à trois personnes par mois. Nos sous-traitants, notamment en région parisienne, sont en revanche confrontés à une grosse pénurie en matière de ressources humaines. Euro CRM réalise, pour sa part, 60 % de son recrutement via Internet qui devient, c'est certain, un excellent outil en la matière, avec, néanmoins, un turn-over induit un peu plus élevé car on a affaire, en passant par le Web, à des populations mieux formées, et sans doute plus facilement déçues, en tout cas difficiles, quant aux exigences et aux conditions de la télévente.

Quelle est la politique salariale de Noos ?


Elle est plus incitative que la moyenne du marché. Il faut dire que nous travaillons avec des profils plutôt pointus, férus de nouvelles technologies et présentant un bon niveau de culture générale. Des bac + 2 pour la télévente, des bac + 4 pour le service clients. Pour la partie télévente, le salaire d'entrée est de 52 francs bruts/heure. Au bout de trois ans, le conseiller peut devenir senior et son salaire passe à 58 francs bruts de l'heure. Pour ce qui est du variable, toujours pour la télévente, nous avons mis en place un ratio francs/contrats raccordés. S'il s'agit d'un contrat généré à partir d'un appel spontané, le télevendeur touchera 10 francs. Ce qui se solde par un fixe brut moyen de 8 500-9 500 francs, avec un variable qui peut fluctuer entre 1 500 à 5 000 francs. Par-delà ces critères quantitatifs, nous avons aussi établi des normes qualitatives : le taux d'absence et les retards. Après trois retards, la prime est annulée. Enfin, dernier critère fondamental pour nous, le rapport entre le nombre d'accords et le nombre de clients véritablement facturables au bout. C'est capital dans la mesure où, derrière les contrats, nous envoyons des techniciens sur place. A cet égard, nous avons amélioré notre taux de concrétisation : pour l'appel entrant, on est passé de 40 % en 1993 à 85 % aujourd'hui. En appel sortant, on est passé de 20 % à près de 65 %.

Et votre politique en matière de formation ?


La formation initiale peut aller de sept jours pour la télévente jusqu'à trois semaines pour le centre clients. En ce qui concerne les sessions en continu, nous avons nommé un formateur par groupes de 50 conseillers. Son rôle est d'écouter entre deux et trois conseillers chaque jour, de les débriefer et de fixer avec eux des objectifs individuels. S'ajoutent à ce dispositif deux réunions hebdomadaires, l'une portant sur le management, la formation, la communication. L'autre, plus axée sur les procédures. Sur le service clients, beaucoup d'encadrants viennent de l'externe, de chez Bouygues, de chez SFR... Sur la télévente, 100 % des encadrants sont issus du recrutement interne. Ce qui, finalement, n'est pas plus mal : il est difficile de faire passer des messages à des télévendeurs si l'on n'a pas été soi-même vendeur et bon vendeur.

Pensez-vous que l'activité centre d'appels soit le cadre de métiers à part entière ?


On ne se demande pas, quand on entre dans une agence bancaire, si l'agent exerce un métier ou non. Je ne vois pas pourquoi ce serait différent sur un centre d'appels. Maintenant, c'est aux organisateurs de ces métiers de les transformer, justement, en métiers. Ce qui implique du respect, des process de formation, des évolutions de carrières, des salaires intéressants - c'est indispensable -, de la valorisation. Et les technologies en développement sont un vecteur de valorisation des métiers. Nous allons, pour notre part, tester cette année le web call back avec possibilité de co-browsing. Et nous devrions lancer le web call center dès 2001. Cette orientation vers une relation client intégrant les technologies liées à Internet est, bien sûr, primordiale pour une société comme la nôtre. Nous travaillons également sur des systèmes de prise d'abonnement en ligne. Il faut bien comprendre que tout va de plus en plus se faire à distance. C'est dans l'ordre des choses. Et l'évolution des approches va clairement dans ses sens. On voit d'ailleurs les services se professionnaliser, et ce, dans tous les secteurs d'activité. Les métiers des téléconseillers deviennent des métiers à part entière et reconnus comme tels. Mais il faut encore faire évoluer les mentalités.

Noos


Noos est la marque commerciale de Lyonnaise Communications. La société, filiale du groupe Suez Lyonnaise des Eaux, se présente comme le premier distributeur de contenus numériques sur le marché français. Noos commercialise sur son réseau une offre de télévision numérique à la carte donnant accès à plus de 75 chaînes en langue française, et vend des services internet à haut débit, ainsi que des services de téléphonie exploités en boucle locale. L'entreprise revendique aujourd'hui 250 000 abonnés à la télévision numérique, 200 000 pour l'analogique et 45 000 abonnés Internet. En 1999, Noos a réalisé un chiffre d'affaires de 1,2 milliard de francs.

L'équipement du centre


Le centre d'appels interne de Noos est équipé d'un PABX Nortel intégrant un ACD maître et deux ACD virtuels. En matière d'applications, la filiale du groupe Suez Lyonnaise des Eaux a choisi une solution Vantive pour le CRM, Genesys pour le CTI, et MGE pour le SVI. En ce qui concerne les appels sortants, Noos a interfacé Vocalcom, qui prend en charge le prédictif et la gestion des campagnes en émission.

Muriel Jaouën

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