L'ergonomie, un combat d'avant-garde
A l'heure où les managers prennent enfin conscience de la nécessité de soigner l'environnement de travail qu'ils proposent à leurs collaborateurs, les entreprises françaises ont du mal à se départir de certains freins. Paradoxe : les centres d'appels, souvent considérés (et parfois à juste titre), comme l'exemple même de la négligence dans le traitement ergonomique des espaces, font preuve, pour certains, d'un véritable souci d'innovation en la matière.
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Certaines entreprises en sont toujours à se demander pourquoi elles
n'arrivent pas à enrayer la désaffection chronique de leurs troupes.
Heureusement, elles semblent de moins en moins nombreuses. C'est
qu'aujourd'hui, le capital humain n'est plus à négliger. Les mentors des
grandes entreprises américaines ont su convaincre les grands patrons de soigner
un peu plus leurs salariés, sous peine d'être à la traîne dans tous les
palmarès économiques internationaux : le "capital humain" fait désormais partie
des actifs de l'économie. Il est devenu un indicateur de performance au même
titre que l'investissement ou l'endettement... Aux Etats-Unis, les salariés ont
d'ailleurs pris la pleine mesure de leurs pouvoirs et n'hésitent plus à
recourir à la justice en cas d'insatisfaction. Et les centres d'appels
n'échappent guère à cette logique. « Il y a désormais une jurisprudence : les
salariés peuvent donc porter plainte contre leur employeur pour mal de dos...
C'est également vrai en Angleterre où l'entreprise, pour dégager sa
responsabilité, doit prouver qu'elle s'est bien occupée de son employé en
créant un environnement fait pour empêcher le mal de dos... », témoigne Manuela
Traeger, responsable de la division centres d'appels de Steelcase Strafor. Des
associations se sont également montées (telle l'OSHA, une association
d'ergonomes américains, qui possède aussi des antennes en Europe, ou encore
l'Agence européenne pour la sécurité et la santé au travail), surveillant de
près l'impact des fameuses NTIC sur l'organisation du travail. Partout en
Europe, des études commencent à sortir sur les troubles spécifiques (notamment
musculo-squelettiques) liés à une mauvaise ergonomie de l'équipement. En
France, les conditions de travail dans les centres commencent aussi à être
passées au crible. Les syndicats s'en mêlent. Dans un communiqué, daté de mai,
la CGT dénonce ainsi, entre autres, "des conditions de travail exécrables", "la
non-application de la législation du travail" et "l'atteinte à la dignité
humaine"... La CFDT a, quant à elle, réalisé une première étude auprès des
salariés des centres d'appels, qui révèle tout autant combien le chemin est
encore long pour y améliorer les conditions de travail.
UNE MOTIVATION FACILITÉE
Pourtant, améliorer "l'ordinaire" de ses
troupes en leur fournissant des équipements ergonomiques efficaces et agréables
présente bien des avantages. Trois au moins, directement liés, valent la peine
que les entreprises s'y arrêtent : une meilleure motivation des effectifs, qui
engendre un travail plus efficient, ce qui se traduit par une réduction des
coûts au final ! On le sait, le manque d'engouement des candidats postulant aux
métiers des centres d'appels peut s'expliquer en trois points : des salaires
peu encourageants, un aménagement des horaires souvent décalé et un
environnement de travail, tant dans le contenu de la mission que dans le décor,
qui n'incite guère à l'épanouissement (c'est tout du moins l'idée que les
candidats s'en font). Or, si jouer sur les salaires n'est pas l'opération la
plus aisée pour les entreprises, si changer le rythme des rotations ou aménager
des horaires plus "faciles" n'est guère envisageable dans beaucoup de centres,
il est un paramètre incontournable qui peut, dès le début, amener le salarié à
se "sentir bien" (principale revendication des jeunes aujourd'hui dans le monde
de l'entreprise) : l'ergonomie. « Il s'agit incontestablement d'un levier pour
la motivation, estime Olivier Savouret, consultant chez Valoris. Les
collaborateurs doivent se sentir valorisés, et cela passe par de bons outils
comme par un environnement agréable. Sinon, il y a perte de confiance et
l'impact peut être très lourd. » Car une ambiance agréable et un certain
confort favorisent non seulement la séduction des candidats, mais également la
rétention des collaborateurs déjà en place. « Cela aide aussi à créer un
sentiment d'appartenance à un groupe ou à une entreprise, constate Isabelle
Constantin, directrice Europe de Details (filiale de Steelcase Strafor).
Aujourd'hui, les entreprises ne retiennent plus leurs salariés uniquement avec
le salaire. Une autre façon de retenir son personnel est de lui fournir un
environnement qui lui donne l'envie de rester. Il faut qu'ils s'approprient
leur poste de travail. »
ETRE EN PHASE AVEC LES MODES
Christian de Mullenheim, directeur général de Materic, remarque toutefois que
les entreprises sont de plus en plus sensibles à ce type de considérations. «
Les entreprises écoutent quand même davantage nos conseils qu'auparavant. C'est
lié, en particulier, aux problèmes de recrutement qu'elles rencontrent
aujourd'hui dans de nombreuses villes. En plus des salaires qui ont, semble-
t-il, été récemment revalorisés, il faut offrir une ambiance plus sympathique.
» Afin de séduire les jeunes candidats, le directeur général de Materic
préconise principalement d'être "in", de suivre les goûts et les habitudes de
la jeunesse. « Pour les produits interchangeables, comme les mousses, nous
avons toutes les couleurs à la mode cette année ! C'est ce type de détail qui
peut être important. Les jeunes viennent travailler en rollers ou en baskets.
Il faut qu'ils retrouvent cet esprit sur leur lieu de travail. » Certes, tous
les candidats ne sont pas taillés dans la même pierre. Au centre de s'adapter.
« Certains centres ont du personnel de haut niveau, qui parlent deux ou trois
langues, qui sont ingénieurs ou informaticiens... Il faut aussi savoir les
soigner, sous peine de les voir tenter leur chance ailleurs... », poursuit
Christian de Mullenheim. Mais toutes les entreprises n'ont pas encore les bons
réflexes en la matière. Pour Jean-Michel Becquet, directeur général d'Ediburo,
le marché est divisé en deux. « Les centres d'appels extrêmement intégrés, dans
lesquels il y a du respect pour les gens qui y travaillent, où on exprime des
demandes très précises en matière d'acoustique, de lumière, d'espace de
travail... Mais il y a encore beaucoup d'entreprises où il faut aller au plus
économique parce qu'il y a un certain mépris pour les personnes qui travaillent
au centre d'appels. Il y a donc une comptabilisation au plus serré du mètre
carré qui peut être sans limite ! » Combien d'entreprises passent ainsi encore
à côté d'une optimisation de leur rendement et de leur qualité de service à
cause de considérations purement matérielles ? Le principe est pourtant simple.
« Quelqu'un qui est mal installé va très vite se déconcentrer et va avoir
besoin de se lever plus souvent. Et n'aura surtout pas envie de rester dix
minutes de plus le soir pour accomplir les tâches du patron », observe ainsi
Isabelle Constantin. Qui ajoute, « Dans un centre d'appels, tout s'entend au
téléphone. Si vous êtes mal organisé, que vous ne trouvez pas vos papiers, que
vous fouillez partout, cela s'entend forcément de l'autre côté du casque ! » A
bon entendeur... Un minimum d'organisation, servie par des équipements bien
pensés, s'impose donc pour améliorer les performances des collaborateurs.
UNE RÉDUCTION DE COÛTS ET D'ÉNERGIE
Dernier avantage
important, totalement lié aux deux précédents : les économies. Certes, faire
construire et aménager un centre d'appels dernier cri, équipé de toutes les
installations nécessaires à un confort et un rendement optimums, représente un
coût important. Mais les entreprises devraient y voir un investissement sur le
long terme. En évitant au maximum les frais d'entretien et de remplacement de
matériel et les effets d'un turn-over débridé impliquant des dépenses non
négligeables : gestion des arrêts maladie, campagnes de recrutement à
renouveler régulièrement, primes de fin de contrats, mise en place de plans de
formation pour tenter de retenir les effectifs, quand il ne s'agit pas de
hausse des salaires. La perte de rendement pouvant, qui plus est, conduire à la
perte de clients. Mieux vaut donc soigner dès le début tous les détails et tous
les acteurs seront gagnants. Plusieurs facteurs sont toutefois à prendre en
compte avant de se lancer car ce sont eux qui détermineront l'aspect et
l'organisation du centre d'appels. Mais la problématique est évidemment
différente selon qu'il s'agit d'un centre interne à l'entreprise ou d'un centre
outsourcé. « Dans les centres d'appels intégrés aux entreprises, les salariés
peuvent bénéficier d'un support CHSCT (Comité d'Hygiène, de Santé et de
Conditions du Travail), de la médecine du travail interne, voire d'ergonomes
internes », observe Jean-Michel Becquet. Cette volonté est toutefois moins
philanthropique qu'il n'y paraît. Il s'agirait plutôt d'une stratégie (bonne,
de toute façon, puisqu'elle sert les salariés comme les employeurs) pour
prévenir toute critique. « Un centre d'appels interne implique souvent un
transfert de personnel d'une unité de l'entreprise vers le call center, observe
Manuela Traeger. Cela peut créer des tensions. Comme au Crédit Lyonnais : des
salariés qui étaient en cravate derrière un guichet, qui avaient un diplôme et
un statut, se sont retrouvés en centre d'appels. Ce type de problème se
rencontre surtout en Europe continentale où les risques de grèves sont élevés à
cause des statuts et du poids des syndicats. Les syndicats viennent d'ailleurs
nous voir pour être sûrs que le personnel sera respecté et que les statuts ne
s'en trouveront pas dégradés... »
QUAND LE CENTRE D'APPELS "DEVANCE" LES AUTRES DÉPARTEMENTS
Mais ce n'est pas du côté des
centres d'appels internalisés que les plus gros efforts restent à faire.
Certains seraient d'ailleurs tellement bien aménagés qu'il se créerait des
jalousies dans les autres services ! A la Sogecap (filiale assurance de la
Société Générale), par exemple, à Orléans, dont le centre a été monté il y a
deux ans, tous les salariés ont défilé sur la plate-forme du nouveau service. «
Ils demandaient pourquoi ils n'avaient pas été installés dans les mêmes
conditions, se souvient Olivier Genuite, directeur d'Elemens, qui a conçu le
centre. Du coup, nous avons hérité du chantier du siège social, à Paris. »
Chez les outsourcers, c'est malheureusement, bien souvent, une toute autre
histoire. Les centres étant montés avant que les équipes ne soient constituées,
les entreprises sont parfois tentées de rogner les investissements nécessaires.
« Tout ce qui est externalisé est souvent réalisé dans des conditions précaires
», s'indigne Jean-Michel Becquet. D'autant qu'il s'agit souvent de plateaux
plus vastes, sur lesquels travailleront davantage de personnes. L'enjeu étant
de concilier des impératifs a priori antinomiques : insuffler un esprit de
corps, d'équipe, tout en offrant à chacun un petit coin personnel, "intime" ;
offrir un espace individuel, propice à la concentration et à la
responsabilisation, tout en faisant sentir la présence des collaborateurs et
des superviseurs... Des éléments clés que l'ergonomie du mobilier des centres
d'appels aide à mettre en place (cloisonnettes, amovibles ou non, hautes ou
basses, vitrées ou pleines ; disposition des postes en marguerite, ligne,
rosace...) avec quelques différences selon le type de missions du centre.
Ainsi, les sites de télémarketing voient "passer" des collaborateurs très
différents et nombreux, qui ne travaillent le plus souvent que quelques heures
par jour ou par semaine. Les dépenses en matière d'environnement de travail y
sont, le plus souvent, réduites à leur plus simple expression. « Ces sites sont
avant tout destinés au rendement, explique Christian de Mullenheim. Alors que
dans les autres activités, le niveau de l'entreprise fait qu'il y aura de réels
efforts sur la qualité des meubles. Il faut que les gens puissent se voir,
avoir des salles de détente, etc. » Jean-Michel Rhode, responsable activité
plate-forme et multimédia chez Orga Conseil, estime lui aussi que la logique
économique des centres d'appels a largement contribué au manque d'effort des
entreprises en ce domaine : « Dans un centre d'appels, tout est mesurable et
mesuré. Et, depuis quelques années, on a largement usé et abusé de la dimension
productivité, surtout chez les prestataires de télémarketing. Et cette
productivité s'est souvent faite au détriment de paramètres qualitatifs... »
EMISSION OU RÉCEPTION : LE CRITÈRE DISCRIMINANT
Internes ou externes, les centres d'appels nécessitent un aménagement différent
selon la nature de leurs activités. En fait, le critère retenu, qui conditionne
la disposition des postes de travail, est : appels entrants ou appels sortants.
Les appels entrants nécessitent en effet plus d'interaction et de communication
que les sortants, les conseillers ayant des informations à s'échanger et devant
garder un contact visuel avec le superviseur en cas de problème. Une activité
dédiée à la réception d'appels induit également généralement davantage de
documents papier. Tout ceci se traduit, en termes d'aménagement, par des postes
bien souvent plus grands et présentant davantage de possibilités de rangement.
A l'inverse, un centre d'appels fonctionnant en émission pourra se contenter de
postes de travail plus petits, plus propices à la concentration individuelle.
Selon le mobilier et les accessoires choisis, l'aménagement ou non d'espaces
conviviaux, la nature de la décoration, le type de finitions, le coût moyen
d'un centre d'appels peut ainsi aller de 100 000 à 200 000 francs par position
de travail ! Dès la préparation en amont et l'élaboration du cahier des
charges, les dépenses ne sont pas négligeables : de 30 000 à 100 000 francs en
moyenne pour un audit, autant pour une étude de marché, de 150 000 à 400 000
francs pour des tests en agence de marketing téléphonique et de 20 000 à 60 000
francs pour les services d'un consultant extérieur... Viennent ensuite les
frais d'équipement technologique : de 200 000 à 400 000 francs pour le logiciel
de tableau de bord pour un plateau de dix positions, environ 10 000 francs par
poste pour un PC, moins de 1 000 francs par casque, mais deux à trois fois plus
pour un sans fil, etc. Comparées à ces investissements, les sommes consacrées
au mobilier apparaissent dérisoires, bien que non négligeables. La moyenne, par
poste de travail, se situe entre 5 000 et 15 000 francs. Tout dépend du cahier
des charges et du niveau de prestation choisie. « Il y a deux types de clients
: ceux pour qui le centre d'appels est un "cost center" et ceux pour qui il
représente un "profit center", explique Manuela Traeger. C'est la place
stratégique qu'occupe le centre dans l'entreprise qui en détermine le coût. En
ce qui nous concerne, nous ne ciblons pas en priorité les petits clients. »
Steelcase Strafor se situe donc dans la fourchette haute. L'architecte-designer
Craie Design, qui a équipé des grands comptes (banques Rothschild et Indosuez,
EDF...), se situe lui aussi dans le haut de gamme. La table seule coûte déjà de
8 500 à 15 000 francs. « Nous proposons un package complet de facture
classique, explique Catherine Cluny, l'attachée commerciale. Tout ce qui est
fantaisie et aménagement original a encore du mal à passer. » Materic propose,
lui, une fourchette de 4 000 à 12 000 francs par poste de travail. Jean-Michel
Becquet note que la différence de coût entre un poste bas de gamme et un poste
"correct" est de un à cinq. « Pour le mobilier, il faut compter 5 000 francs
par poste pour avoir quelque chose d'intéressant, estime-t-il. Mais il faut
également prévoir le traitement de la pièce entière. Un mur acoustique revient
ainsi très cher, environ 1 000 francs le mètre carré. De toute façon, si on
voulait aller vers l'ergonomie totale, le coût serait énorme et inacceptable en
France ! Du coup, tout le monde fait dans la demi-mesure. A l'image de ces
cloisonnettes acoustiques qui sont de la rigolade et ne servent à rien ! » Pour
Jean-Michel Rhode, le prix annuel pour un poste tout aménagé varie de 60 0000 à
200 000 francs.
IMPLIQUER LES SALARIÉS : UN PAS VERS LE SUCCÈS
Reste que, pour certains accessoires ou meubles, le mieux
serait de consulter les salariés et de les impliquer dans les choix importants.
Si, pour beaucoup de centres d'appels, la consultation du personnel avant la
mise en place du centre est difficile, voire impossible, certains "gestes" sont
tout à fait envisageables lorsque le centre est en place. Détail, par exemple,
psychologiquement important : donner aux salariés la possibilité de choisir
leur casque. « C'est un vecteur d'appropriation par le salarié de son poste de
travail, cela renforce son implication », confirme Olivier Savouret. Même chose
pour les sièges. « Les entreprises associent de plus en plus leurs salariés au
choix des sièges, même si c'est loin d'être systématique, témoigne Christophe
Quirin, spécialiste des sièges chez Steelcase Strafor. Elles commencent à
comprendre que c'est un facteur de paix sociale ! Aux Etats-Unis, il est
d'ailleurs devenu fréquent qu'en guise de cadeau de bienvenue, l'entreprise
offre aux nouveaux salariés intégrés le choix entre plusieurs modèles de siège.
» Mais, là encore, c'est grâce au travail de pression exercé par certains
groupes, notamment d'origine et de culture anglo-saxonnes, que la situation
commence à s'améliorer. « Nos principaux prescripteurs sont les médecins du
travail. Ils ont été les premiers à dénoncer, suite aux visites trop régulières
des salariés, des conditions inadaptées à une bonne santé », poursuit
Christophe Quirin. En fait, il n'y a guère que les salariés pour juger
sciemment de la qualité du mobilier. Raison de plus, donc, pour les associer
aux choix importants. Car, quels que soient les (bons) conseils du consultant
ou de l'architecte choisi, il y a toujours un risque au niveau du ressenti et
du vécu des salariés. Et, comme le reconnaît volontiers Catherine Cuny, « les
salariés ont leur mot à dire car ce sont eux qui y travailleront ; ni le P-dg
ni nous n'y seront ! ». Question aménagement du poste de travail, outre les
normes légales (et les "recommandations" de Bruxelles), il existe deux ou trois
points qui doivent retenir l'attention. Ce sont eux qui, en grande partie,
détermineront la réussite ou l'échec de l'option retenue.
LES POINTS IMPORTANTS À SOIGNER
Premier mot clé : espace vital ! Le
poste de travail doit comporter, au-delà des 50/70 cm entre l'écran et le
siège, un espace suffisamment grand pour permettre à la fois le rangement, le
classement, mais également le bien-être de l'opérateur. Celui-ci doit disposer
de trois "cercles" vitaux en un même espace : un espace "personnel" immédiat,
un second qui détermine la place des outils, le troisième étant celui où
l'opérateur peut accueillir quelqu'un. Un principe (baptisé "proxémie") adopté
par Steelcase Strafor, par exemple. Selon Olivier Savouret, « un espace
inférieur à 4 m2 est inacceptable. A partir de 10 m2 par personne, cela devient
très confortable. » L'important étant à la fois de permettre aux collaborateurs
de pouvoir travailler efficacement et de les "sédentariser" en leur offrant la
possibilité de personnaliser leur espace. « C'est gagné quand on commence à
voir des photos punaisées aux cloisons ! », note Olivier Savouret. Mais
l'espace signifie également l'ergonomie et la physionomie du plateau lui-même.
Il semblerait d'ailleurs que les alignements soient de moins en moins de mise,
au profit de configurations hexagonales ou en marguerite, notamment dans le
souci de "casser" une organisation trop austère. Autre élément qui peut
contribuer à améliorer l'ambiance d'un plateau : la luminosité. Si les normes
en la matière sont strictes, certains architectes n'hésitent pas à valoriser le
mieux possible la lumière naturelle, bien connue pour ses effets positifs sur
l'organisme et beaucoup plus motivante. Ainsi, DHL a-t-il fait construire par
Elemens, à Lyon, un centre dans une tour, avec vision panoramique : tout le
monde a ainsi droit à ses minutes quotidien-nes de soleil. Un facteur à ne pas
négliger non plus : la climatisation. « Cet aspect est rarement pris en compte,
déplore Olivier Savouret. Sur un plateau, il faut compter avec la chaleur que
dégagent les ordinateurs. Et parfois, cela atteint des niveaux insupportables.
C'est donc un paramètre auquel il faut tenter de réfléchir avant la mise en
place du centre. » Mais l'environnement ne signifie pas uniquement un bureau
agréable. Tout doit contribuer à créer, stimuler, une énergie positive et
productive. Il ne faut donc pas oublier non plus, ce qui est souvent le cas, la
localisation du bâtiment. Car, comme l'explique Olivier Savouret, la
localisation du centre contribue elle aussi à faire en sorte que les
collaborateurs auront (ou non) envie de venir travailler : « Il faut des
facilités d'accès, de la sécurité et des services de proximité ». Les
Américains et les Anglais ont d'ailleurs résolu cette partie-là de l'équation.
Beaucoup de call centers (British Telecom, par exemple) y sont désormais
pourvus de "streets" : les locaux deviennent une vaste ville, scindée par une
sorte de rue piétonne comportant boutiques, restaurants, banques, etc. Ou
comment pousser la logique de rétention à son paroxysme, via la seule dimension
ergonomique.