EXISTE-T-IL UN CRM 2.0?
NICOLAS OYARBIDE, Directeur du département eCRM de LSF Interactive.
Le «Web 2.0 »est une expression déjà vieille de quelques années, et qui aujourd'hui se décline à toutes les sauces: entreprise 2.0, marketing 2.0, média 2.0 et l'expression qui nous intéresse ici: CRM 2.0. Qu'entend-on derrière cette appellation? Quelle réalité commerciale cela recouvre-t-il et d'ailleurs, existe-t-il une réalité commerciale pour le CRM 2.0?
Tout d'abord, voici une définition personnelle du CRM (gestion de la relation client en français): le CRM se nourrit des interactions entre l'entreprise et ses clients, afin de mieux comprendre ces derniers. La société espère ainsi établir une relation personnalisée avec ses consommateurs, facteur majeur de fidélisation, gage de retour sur investissement.
Ensuite , voici la façon dont un site très « 2.0 » (Wikipédia) décrit ce phénomène: «le 2.0 facilite l'interaction entre utilisateurs, la création de réseaux sociaux rudimentaires et la génération de contenus par les internautes.»
Si l'on confronte ces deux définitions, il semble que la communication avec l'entreprise n'ait pas sa place dans le Web 2.0. En effet, sa fonction première consiste à connecter les êtres humains, tandis que l'entreprise est une entité sans existence physique.
De plus, la réalité des réseaux sociaux paraît confirmer cette théorie. A ce jour, peu d'entreprises ont réussi à créer un réseau social d'envergure autour d'une marque ou d'un produit. La plupart des sites communautaires de cet ordre sont à l'initiative des consommateurs. Mais l'entreprise est alors exclue du débat, puisqu'elle n'a pas la parole. D'autant que ces sites consuméristes ont souvent pour vocation de rééquilibrer le rapport de force entre les clients particuliers et l'entreprise. Ce n'est donc pas dans ce contexte qu'il faut chercher le CRM 2.0, pour le moment du moins. Ainsi, pour intégrer une dimension communautaire dans leur communication, les entreprises sont amenées à surfer sur des réseaux sociaux étrangers à leur marque, tels Facebook ou Twitter. Ces réseaux sont l'occasion infiltrer les communautés, dans l'espoir de profiter du marketing viral, le Saint-Graal de la notoriété à moindre coût. Mais sur ces sites web, rien ne permet de distinguer facilement les clients des prospects. La communication est alors forcément massive, bien loin des canons d'une relation client efficace. Dans ce cas, il serait également excessif de parler de CRM 2.0.
Pourtant, le recrutement de prospects via les réseaux sociaux est une réalité. Les initiatives pullulent pour générer du trafic, du lead, voire des acheteurs depuis des sites communautaires. Faut-il alors abandonner l'idée d'un CRM 2 . 0 et se focaliser sur le recrutement 2 . 0? La réponse n'est pas tranchée, mais voici trois raisons de continuer à prendre en considération l'aspect communautaire dans nos stratégies de contact:
. Les clients recrutés en mode 2.0 (via une application Facebook ou Twitter, par exemple) ont un comportement différent des autres. Sondons donc nos bases de données pour comprendre au plus vite quelles sont leurs attentes.
. Même si la relation entre l'entreprise et le client n'est pas «2.0», les clients échangent sur ce mode. Une meilleure compréhension des interactions entre les clients peut constituer un vecteur d'efficacité commerciale. Par exemple, communiquer de manière personnalisée avec les leaders d'opinion confère un caractère viral aux messages commerciaux.
Le métier de community manager se développe fortement. Son rôle consiste à animer les espaces de discussions créés par l'entreprise et à en vérifier le contenu. La fonction la plus intéressante est encore la moins développée: le community manager a vocation à devenir ambassadeur de la marque sur les réseaux sociaux. Cela se résume aujourd'hui à jauger l'image de la marque sur le Web (aussi nommée e-réputation) , à intervenir parfois sur les sites externes, à créer une fan page Facebook et un compte Twitter. Mais ce rôle pourrait encore s'étoffer. Quelques solutions d'audit de l'e-réputation se développent, mais il manque encore les outils d'action complémentaires, pour l'infléchir autant que possible.
Le CRM 2.0 est encore à bâtir. Sa future définition passera sûrement par une plus grande place laissée à l'humain, via le community manager ou tout autre ambassadeur de la marque sur la Toile.
Parcours
Diplômé de l'Ecole Supérieure de Commerce de Paris (ESCP-EAP) en 2003, Nicolas Oyarbide intègre la société SFR en 2004 en tant que chef de marché marketing relationnel/stratégie de fidélisation. Il est ensuite nommé chef de produit CRM Internet mobile en 2007, fonction qu'il exerce jusqu'à son arrivée chez LSF.