Vodafone met l'accent sur la formation et la qualité
C'est une grande banlieue de Londres qui se partage entre un centre ville
hérissé de tours et de magnifiques résidences très "campagne anglaise".
Croydon, dans le Surrey, fait partie de la "stoke broker belt", la ceinture des
agents de change. C'est dans une de ces tours, la NLA Tower, que Vodafone a
installé un de ses 17 centres d'appels. Vodafone Connect emploie plus de
quatre cents personnes et occupe six étages de la tour. Cette filiale du numéro
un de la téléphonie mobile en Grande-Bretagne s'occupe exclusivement des
clients, particuliers ou PME-PMI, qui ont contracté leur abonnement via des
revendeurs, boutiques spécialisées ou grands magasins, voire supermarchés qui
vendent les produits Vodafone mais aussi d'autres marques. Deux sortes de
contrats sont proposés aux consommateurs via ces revendeurs : les abonnements
et le Pay as You Talk (payez comme vous parlez), service sans abonnement avec
une carte rechargeable. C'est d'ailleurs cette dernière activité qui s'est le
plus développée ces derniers temps. « Il y a un an et demi, nous vendions 90 %
de contrats avec abonnement. Depuis l'hiver dernier, nous avons lancé cette
formule du Pay as You Talk et, en termes de nouvelles ventes, la conjoncture
s'est complètement retournée », explique Paul Ramwell, directeur des services
consommateurs de Vodafone Connect. Mais si cette explosion du sans abonnement
permet de gagner de nouveaux clients, les marges réalisées sur ce service sont
bien moindres. Le centre d'appels de Vodafone Connect est ouvert aux
consommateurs de 8 h à 20 h du lundi au vendredi, de 9 h à 18 h le samedi. Pour
la partie contrats avec abonnement, le centre dispose de 300 positions pour le
service général (questions techniques ou ayant trait à la facturation), 100
positions pour les problèmes d'accessoires ou de changement de formule
d'abonnement, une vingtaine de positions pour les réclamations et les services
spéciaux. Une cinquantaine de positions sont actuellement dédiées au Pay as You
Talk, mais ce chiffre est en forte croissance.
90 % d'appels entrants
Une autre cinquantaine de postes s'occupent des PME-PMI.
Il s'agit à 90 % d'appels entrants (inbound calls), les 10 % sortants
(outbound) sont destinés à rappeler les revendeurs. Vodafone Connect travaille
avec trois sociétés sous-traitantes. Mais la politique maison est plutôt de
tout gérer en interne. « A la fin du mois de juillet, nous n'aurons plus aucun
sous-traitant », affirme Paul Ramwell. Les personnels sont recrutés
principalement avec un équivalent anglais du niveau bac. Les téléconseillers
sont appelés "customer service advisers". « Nous avons un profil type. Il faut
surtout une expérience du contact avec le client. Idéalement, il s'agit d'une
expérience en centre d'appels », précise Angie Ryan-Woolley, responsable des
services clients pour les particuliers. Outre une familiarité avec l'outil
informatique, il est demandé aux postulants de savoir travailler en groupe.
Pour aider ces postulants souvent jeunes et inexpérimentés, les responsables du
centre ont créé un niveau intermédiaire entre le téléconseiller et le chef
d'équipe (team manager). Il s'agit du "coach". « Il connaît très bien le
système ainsi que les procédures. Cela permet au chef d'équipe de se concentrer
sur le management », détaille Angie Ryan-Woolley. Le coach consacre 60 % de son
temps à la production et 40 % à aider à la gestion de l'équipe. « Il représente
une sorte de filtre pour le travail de routine », ajoute Paul Ramwell. Un chef
d'équipe, lui, s'occupe de 16 à 18 agents dont deux coaches.
La formation : indispensable
et incontournable
De plus, cette étape intermédiaire aide les agents
à accéder au poste de chef d'équipe. « C'était trop difficile de devenir
directement chef d'équipe », avoue Angie Ryan-Woolley. Il est en effet
responsable des performances de son équipe et doit aider le chef de centre.
Cette structure sans superviseur, mais avec coaches, semble être une tendance
lourde en Angleterre : d'autres sociétés de téléphonie sont en train de
l'adopter. Le chef d'équipe est recruté (en interne et en externe) sur ses
capacités d'analyse des chiffres, de présentation formelle de ces données, de
ses compétences pour interpréter les informations sur les cas d'école qui
peuvent se présentés. Au sommet de la hiérarchie, on trouve 5 responsables, le
centre principal étant divisé en structures plus petites et chacune affectée à
un travail particulier. Le budget formation est conséquent chez Vodafone
Connect. On compte une ou plusieurs salles dédiées à ces séances à chaque étage
pour une cinquantaine de personnes en permanence en formation. « Nous sommes
très compartimentés, avec des unités très spécialisées », rappelle Paul
Ramwell. La société a créé Steps (Superior Training Enhance Performance and
Salary ou formation supérieure pour améliorer les performances et les
salaires), programme de formation qui permet aux agents de devenir coaches puis
managers. Il est composé de cinq modules différents et peut durer de 12 à 18
mois. Autre innovation : l'"académie". C'est une salle dans laquelle les
nouveaux agents arrivent après le mois de formation initiale. « Ici, ils
peuvent commencer à leur rythme, poser des questions. C'est une manière de les
aider à s'intégrer », explique Angie Ryan-Wooley, capable d'appeler par leur
prénom la quasi-totalité des 400 agents de l'immeuble. La fourchette des
salaires chez Vodafone est de 12 500 £ par an pour un débutant (125 000 F) ; 17
000 £ au niveau 5 de la formation. Le coach est payé entre 14 et 18 000 £, le
chef d'équipe de 18 à 25 000 £ et les responsables de call centers entre 25 et
38 000 £. Les pics d'activité ont lieu lors des deux passages de postiers qui
apportent les factures aux particuliers, le matin et vers 14 heures. La
saisonnalité de l'activité intervient aux alentours de Noël et des vacances
d'été.
De plus en plus de temps partiel
Pour plus de
flexibilité, Vodafone Connect emploie de plus en plus de temps partiels : 15 %
actuellement, mais cette proportion devrait monter jusqu'à 35 %. Un logiciel
(Workforce Management Application) permet de prévoir les flux d'appels et de
les distribuer chez les opérateurs. L'autocommutateur est un Meridian de
Nortel. Les serveurs sont équipés de Windows NT de Microsoft. La facturation
s'effectue grâce aux logiciels de la société israélienne Amdox, ainsi que du
produit de Qmax pour les statistiques. Tous les enregistrements sont assurés
par la suite Nice Universe de la société Nice Systems. Vodafone Connect est en
phase de prospection pour un produit de CTI pour ses trois call centers. Enfin,
si le site web de la société est encore très institutionnel, Vodafone est en
train de préparer un site transactionnel. Dernier aspect très important de
l'activité du centre d'appels de Croydon : l'accent mis sur la qualité. « Nous
avons défini des standards élevés en termes de temps de réponse : pas plus de 2
% d'appels entrants perdus, 90 % des 98 % d'appels traités doivent être pris en
moins de 10 secondes », explique Paul Ramwell. Une équipe de Vodafone se
connecte tous les mois sur les postes des agents et contrôle la qualité des
réponses. Vodafone Connect s'est fait aider dans la définition de ses besoins
en termes de qualité par la société de consulting américaine Tarp. Celle-ci a
établi la méthodologie et travaillé sur des questionnaires de fidélisation. Une
cinquantaine de consommateurs sont ainsi contactés chaque mois, avec un retour
de 10 à 15 questionnaires. « Etre efficace, c'est la règle numéro un », conclut
Paul Ramwell. Le responsable des services consommateurs est un peu fatigué
suite à la fête organisée la veille pour célébrer l'obtention de la récompense
accordée par le magazine professionnel Mobile News. Ce "service provider of the
year award" (oscar du meilleur fournisseur de services de l'année) récompense
une organisation qui privilégie la formation et la qualité. De fait, chez
Vodafone, le turn over est très bas, et ce depuis l'ouverture du centre de
Croydon il y a un an. Un atout pour une activité comme le centre d'appels dont
70 % des dépenses proviennent du poste ressources humaines.
Une organisation en centres de profit
Vodafone UK est divisé en plusieurs centres de profit dont Vodafone Ltd qui s'occupe de l'installation et de la maintenance du réseau cellulaire britannique. C'est le premier opérateur anglais avec la plus grande part de marché. Vodafone Retail Ltd gère les boutique à la marque Vodafone. C'est la plus grande chaîne spécialisée dans le téléphone mobile du royaume. Ses clients sont des particuliers et des PME-PMI. Vodafone Corporate Ltd est centrée sur les grands comptes. Vodafone Value Added and Data Services Ltd propose un portefeuille de solutions à valeur ajoutée. Enfin, Vodafone Connect, qui gère le centre d'appels de Croydon, vise également la clientèle des particuliers et des PME mais au travers de revendeurs, spécialisés ou généralistes, comme les grands magasins.
Vodafone, prochain N°1 mondial de la téléphonie mobile ?
Précédemment Racal Telecom, Vodafone existe sous ce nom depuis 1985. La société est devenue indépendante du groupe Racal depuis 1991. C'est le plus grand opérateur de téléphonie mobile de Grande-Bretagne. Mais si sa fusion avec l'américain Air Touch est avérée, la société deviendra le leader mondial de l'activité. Le nouveau géant pèsera 67 milliards de livres de capitalisation boursière (670 milliards de francs) et comptera 23 millions de clients dans 23 pays. Pour l'instant, Vodafone emploie 3 500 personnes au Royaume-Uni et 5 000 dans le monde. Le chiffre d'affaires 1998 était de 2,471 milliards de livres (environ 24 milliards de francs) pour un bénéfice de 686 millions de livres. Sa capitalisation boursière avoisine les 20 milliards de livres (environ 200 milliards de francs). Vodafone opère dans 12 pays hors de Grande-Bretagne : Allemagne, Afrique du Sud, Australie, Egypte, Fidji, France (à travers une participation de 20 % au capital de SFR), Grèce, Malte, Nouvelle-Zélande, Pays-Bas, Ouganda et Suède. Le nombre des consommateurs hors Grande-Bretagne était de 4,3 millions en 1998. Au 1er janvier 1999, Vodafone avait 9,1 millions de clients dans le monde, dont 1,8 million durant le dernier quadrimestre de 1998. La clientèle britannique comprend 5 millions d'abonnés, soit une progression de plus de 50 % en un an. Le service de Pay as You Talk (sans abonnement) explose actuellement, avec près de 1,2 million de clients au Royaume-Uni.