Toupargel fondu de la vente
«Le centre d'appels est au coeur de notre métier. » Yves Serfaty, directeur
marketing, résume bien le métier de Toupargel : vépéciste de produits surgelés.
Une marque qui, aujourd'hui, réalise 99,9 % de son chiffre d'affaires avec le
téléphone. Créé en 1947 et reprise en 1982 par son actuel P-dg, Roland Tchenio,
Toupargel s'est essentiellement développé par croissance externe, avec
l'acquisition d'une quarantaine de sociétés, dont une spécialisée dans la
gestion téléphonique de fichiers clients et prospects. Rapidement, le groupe va
abandonner le système du camion magasin et lui substituer, dès 1985, la vente
par téléphone. Aujourd'hui, Toupargel a deux activités principales : le
surgelé, axe commercial historique, qui représente 550 MF de chiffre d'affaires
; les produits frais, activité récemment développée, notamment avec le rachat
en 1998 de Néodis, société de livraison à domicile de produits frais. Jusqu'à
présent, Néodis fonctionnait avec un réseau de camions-magasins sur une zone de
chalandise calquée, grosso modo, sur le Nord-Est de la France. Mais la volonté
de Toupargel est de substituer à cette activité de points de vente itinérants
une activité de call center, et de décliner ainsi sur l'activité produits frais
la mutation que le groupe a opéré pour lui-même dans son activité de vente de
produits surgelés.
80 000 CLIENTS ÉGALENT 1 MDF DE CA
Pour ce faire, le groupe travaille à la construction et à l'aménagement d'une
plate-forme logistique à Chalon-sur-Saône (voir encadré) et devrait, dès son
ouverture en juin 2001, lancer un site marchand de produits frais. Pour
Toupargel, il s'agit d'un marché émergeant avec un potentiel de croissance très
important. « Pour réaliser un milliard de francs de chiffres d'affaires en
produits frais, il nous faut conquérir 80 000 clients. Or, nous avons déjà 420
000 clients sur le surgelé. Ce qui nous ouvre de réelles perspectives »,
précise Yves Serfaty. L'un des axes stratégiques du groupe est de fait
l'acquisition de nouveaux clients, à raison de 90 000 transformations
effectives par an. Au cours de six premiers mois de 2000, 45 000 nouveaux
clients ont déjà été enregistrés dans la base de données du groupe. A cet
effet, Toupargel emploie 140 salariés (essentiellement des temps partiels en
CDI annualisé) sur ses neuf centres d'appels dédiés à la téléprospection : un
par direction régionale, plus le pool de Villeurbanne, qui a récemment été
agrandi à 96 positions et devrait, à terme, faire travailler 80 personnes.
Aujourd'hui, le produit frais représente 15 % de l'activité de l'entreprise,
part qui devrait monter à 50 % à horizon 2004-2005. Ce, dans une perspective de
croissance très forte du chiffre d'affaires, puisque Toupargel entend le
multiplier par trois-quatre d'ici quatre à cinq ans. Toupargel compte
actuellement, pour le traitement de son activité surgelés, 35 centres d'appels.
Tous internalisés. « Nous avons fait des tests avec des agences de
télémarketing. Ca n'a jamais fonctionné. Rien ne vaut la culture d'entreprise
et l'implication des salariés », note Yves Serfaty. Mais la tendance est à la
diminution du nombre de sites, l'objectif étant d'optimiser l'intégration de la
technologie, notamment du prédictif, des outils de mesure, mais aussi de la
formation, de la motivation, de l'animation. Et également de mutualiser les
coûts de télécoms. A terme, l'entreprise devrait se reposer sur un réseau d'une
vingtaine (maximum) de call centers. Il en comptait 45 il y a encore peu de
temps. Pour ce qui est des produits frais, l'activité se concentrera sur un
centre unique, celui de Chalon-sur-Saône, qui comptera cent positions, et qui
traitera l'entrant comme le sortant.
RIEN QUE DE L'ÉMISSION D'APPELS
Les centres d'appels de Toupargel s'inscrivent de
plain-pied dans une stratégie ultra-commerciale. « Nous sommes dans une
démarche de vente et non de prise de commande. Nous avons toujours eu une
approche proactive, de mouvement vers le client, sans attendre qu'il nous
appelle. Ce, dans un souci de rentabilité. Nous n'avons pas la puissance d'un
groupe de type Casino ou Carrefour et donc pas les moyens de perdre de
l'argent. Et la rentabilité passe par la planification et l'anticipation »,
explique Yves Serfaty. L'activité call center de Toupargel est donc quasi
exclusivement concentrée sur de l'émission d'appels. Les 250 télévendeurs
(tous en CDI) sont intéressés au chiffre d'affaires, avec un variable déterminé
par tranche en fonction du chiffre d'affaires réalisé, qui peut équivaloir,
toutes primes confondues, à plus du double du fixe. Toupargel a donc clairement
misé sur une politique de motivation financière. Ce qui explique sans doute le
"faible" turn-over sur les plateaux de vente, moindre que ce que connaissent
les entités de téléprospection. Les télévendeurs contactent chaque mois les
425 000 clients du groupe. La constitution des colis se fait sur les deux
plates-formes de préparation dont Toupargel dispose en France (à Poitiers et
Lyon), et la livraison est effectuée sous 48 heures, uniquement sur
rendez-vous. Chaque colis de livraison (soit 8 000 par jour) comprend un
catalogue et un message indiquant au client à quelle date il sera rappelé par
les télévendeurs. La clientèle est donc prévenue, habituée à ce cycle et,
finalement, en attente de la démarche commerciale. En cas d'absence à la date
fixée, le client peut appeler Toupargel, qui, à cet effet, est en train de
mettre en place un numéro unique dédié au traitement des flux entrants.
UN MODE DE FONCTIONNEMENT "FIGÉ"
En matière d'aide à la
vente, les télévendeurs disposent d'un outil maison élaboré et amendé au fil
des années. Sur leur écran : un historique du client mois par mois sur les
trois dernières années, les 36 produits les plus achetés classés par ordre
décroissant, la mention des promotions en cours pour les produits concernés,
une zone d'information et de remarques personnalisées, le capital points de
chaque client, la base de données de toutes les fiches produits. Le tout
accessible en temps réel sur l'écran de garde. Mais, par-delà l'efficience des
logiciels, le mode de fonctionnement actuel de Toupargel induit une production
téléphonique systématique et extrêmement planifiée : 14 appels par an et par
client, soit, chaque année, un trafic sortant de 5,8 millions d'appels, pour
une durée moyenne de 3 minutes. « Notre objectif, à terme, n'est pas de
contacter les clients plus souvent, mais de les appeler différemment.
C'est-à-dire de prendre en compte la fréquence moyenne de leurs commandes pour
pouvoir les appeler au bon moment. Un citadin qui possède un petit congélateur
ne fera pas l'objet du même traitement qu'un client en milieu rural avec un
équipement à forte capacité. » En fait, le système est, comme le qualifie le
directeur marketing de Toupargel, "figé" : il repose sur des tournées de
livraison et, partant, d'appels. Ainsi, tous les clients référencés dans une
zone donnée seront appelés en même temps, pour la seule raison que la livraison
est programmée à J + 2. La personnalisation du trafic téléphonique sortant est
donc indissociable de la mise en place d'un système plus dynamique de tournées.
Système qui, par ailleurs, permettra à Toupargel d'accepter plus facilement
l'appel entrant, pour l'heure bien davantage lié à du dépannage qu'à de la
production organisée.
Toupargel
Avec 950 références de produits surgelés, 425 000 clients pour un chiffre d'affaires 1999 de 651 millions de francs, 80 départements couverts, Toupargel est sans conteste le leader du marché de la vente à distance de produits surgelés. 220 télévendeurs, répartis sur 35 centres d'appels, contactent chaque client 14 fois par an. Pour un taux de réussite commerciale de 50 % (une commande enregistrée pour deux contacts effectués) et un panier moyen de 285 francs. Toupargel vient d'intégrer le Web à son dispositif commercial. Avec l'ambition de faire du site internet toupargel.com (en test sur les régions Rhône et Rhône-Alpes) un vecteur de rajeunissement et de diversification de sa clientèle existante (en majorité des femmes de plus de 55 ans et vivant pour plus de 75 % dans des communes de moins de 5 000 habitants).
Châlon-sur-Saône : tremplin pour un nouveau développement
80 millions de francs : c'est la somme investie par Toupargel dans la construction de la nouvelle plate-forme logistique de Chalon-sur-Saône, dédiée à son activité produits frais. En 1998, l'entreprise de surgelés a en effet entrepris une politique de croissance externe en matière de distribution de produits frais avec l'acquisition de sociétés comme Néodis, puis Selecta, implantées dans le Nord-Est de la France, et qui ont fusionné courant 1999. Toupargel référencera une gamme d'environ 3 000 produits, dont 50 % de données périssables et 50 % de produits secs et d'entretien. La plate-forme, qui devrait entrer en activité en juin 2001, occupera une surface de 16 000 m2 et offrira une capacité de traitement de 6 000 à 8 000 commandes par jour. Le centre d'appels, qui emploiera à terme plus de 100 personnes, sera équipé de solutions CTI et d'un système prédictif. Ce dispositif de télévente devrait également être étroitement associé à l'exploitation du site marchand de produits frais que l'entreprise prépare pour 2001. Avant d'arrêter son choix sur Chalon, Toupargel avait notamment songé à s'installer dans le Rhône ou la Loire. Mais la région chalonnaise a séduit pour sa situation géographique (noeud autoroutier), son bassin de 300 000 habitants et l'accueil des représentants locaux. Toupargel envisage de créer quelque 500 emplois à Châlon d'ici 2005.