Fidélisation en campagnes
Center Parcs a déménagé, en octobre 2001, du 14ème au 19ème arrondissement. Comment se passe le déménagement d'un centre d'appels ?
Le rachat par le groupe Pierre et Vacances a eu lieu fin avril
et le centre d'appels a déménagé le 19 octobre. Un déménagement, ça se prépare.
Plusieurs mois à l'avance. Si c'est bien préparé, ça ne pose pas de problèmes.
Nous avons quitté le site du 14ème arrondissement un vendredi à midi. Le Numéro
Indigo nous permettant de router le trafic, à midi, le relais était pris par
une dizaine de positions installées dans notre domaine de Sologne, où nous
disposons, ainsi qu'en Normandie, d'une structure de back-up. Le lundi à 9
heures, le nouveau centre du 19ème arrondissement entrait en service. Durant ce
week-end de transition, nous avons enregistré le même nombre de réservations
qu'au même moment l'année précédente. Et ce, alors que nous sortions d'une
campagne TV et radio dont les effets n'étaient pas terminés. En revanche, une
dizaine de nos collaborateurs - soit 30 % de notre équipe -, dont certains
étaient là depuis plusieurs années et beaucoup habitaient dans le sud de Paris,
n'ont pas souhaité changer de lieu de travail. Il a donc fallu recruter.
Le rachat par Pierre et Vacances peut-il entraîner un rapprochement, voire une fusion des différents centres d'appels au sein du groupe ?
A priori, ce n'est pas à l'ordre du jour. Il est certain que
l'aboutissement des synergies peut paraître plus évident entre Pierre et
Vacances et Maeva, par exemple, qui ont quasiment les mêmes produits, les mêmes
modes de commercialisation, les mêmes types de clientèle. Center Parcs
conserve, pour sa part, un positionnement atypique dans le monde des résidences
de tourisme, tant dans son offre que dans son modèle commercial. Notre
originalité permet de maintenir notre indépendance dans les processus marketing
et commerciaux.
Quelle est la mission du centre d'appels de Center Parcs ?
Le call center dépend, ici, des ventes, qui recouvrent
également l'activité B to B (elle représente 7 à 8 % de notre chiffre
d'affaires), le service clients (réclamations, SAV) et la comptabilité clients.
Le centre d'appels est ouvert sept jours sur sept, de 9 à 19 heures du lundi au
vendredi (suite au déménagement, pour des raisons de ratio temps de transports/
emploi du temps, le plateau a écourté d'une heure sa plage d'accueil le soir,
ndlr) et de 9 à 17 heures le samedi et le dimanche. Le week-end, le nombre de
réservations équivaut pratiquement à celui d'une journée dans la semaine. Le
plateau traite essentiellement des appels entrants. Notre démarche est en
quelque sorte une démarche de vente à distance. Le marketing direct représente
97 % de nos ventes. Et 90 % du chiffre d'affaires est réalisé via le centre
d'appels. Sur la plate-forme travaillent 33 conseillers clientèle, encadrés par
un responsable de centre (recruté au Club Med), un coordinateur opérationnel
(auparavant responsable de réception dans l'un de nos domaines), trois
superviseurs et une formatrice que nous venons de recruter et qui vient du Club
Med où elle était déjà en charge de la formation.
A-t-il été difficile de recruter une formatrice ?
Oui. Cela faisait un an que
la création de ce poste avait été décidée. Jusqu'à présent, c'est l'une de nos
superviseuses qui assurait la formation. Mais ça amputait forcément son travail
d'encadrement. Aujourd'hui, nous allons pouvoir systématiser des actions
jusqu'alors menées au coup par coup, en fonction des besoins perçus. C'est
d'autant plus capital qu'avec le renouvellement d'un tiers de nos effectifs du
fait du déménagement, il y a fort à faire sur le plateau en matière de
formation. D'autant que j'observe chez les jeunes arrivants un comportement qui
n'est pas le même que celui des personnes en place depuis plus longtemps dans
l'entreprise : moins de charisme, moins d'attachement au produit, plus
d'absentéisme, plus de propension au turn-over. Les plus anciens sont parfois
eux-mêmes surpris par le comportement des plus jeunes. Le métier de conseiller
de vente a beaucoup changé. Dans le bon sens d'ailleurs, avec de meilleures
conditions de travail et des salaires à la hausse.
Et pour les nouveaux, comment s'est passé le recrutement ?
Cela n'a pas été
évident. Aujourd'hui, je ne vous cache pas qu'on est à sec. On n'a plus de
vivier.
Comment le centre d'appels s'inscrit-il dans la politique marketing de Center Parcs ?
La démarche est la suivante : nous
éditons un catalogue annuel, diffusé auprès des personnes qui en font la
demande. Ce, en réponse à nos différentes opérations de marketing direct. A
commencer par les campagnes TV qui génèrent l'envoi de 20 000 brochures en
moyenne. Le Numéro Indigo est mentionné sur l'ensemble des supports ou médias :
il n'est pas une communication qui ne soit une incitation à nous appeler. Nous
pourrions utiliser Médiapost et diffuser un million de brochures dans toute la
France. Ca n'est pas notre démarche. Nous recrutons d'abord et nous envoyons
ensuite la brochure. Celle-ci est également adressée aux adresses de notre
propre base de données clients et prospects les plus récents (nous enregistrons
110 000 réservations par an, dont la moitié en fidélisation). Nous menons
également des campagnes radio. Des mailings sont régulièrement adressés sur des
fichiers extérieurs ciblés. Nous avons également développé, depuis une dizaine
d'années, des partenariats, notamment avec des titres de presse, à la fois pour
une remontée primaire en demandes de brochures et pour une transformation
commerciale. Cette politique de partenariat donne d'excellents résultats. Les
six partenaires piliers étant L'Express, Parents, Top Famille, Camif, Ikea,
TPS.
Quels volumes traitez-vous ?
500 000 appels
entrants par an. Nous en traitons 90 %. C'est une moyenne. En janvier dernier,
par exemple, période de trafic extrêmement fort, nous n'avons pas traité autant
d'appels que nous l'aurions souhaité, d'autant que nous travaillions avec une
équipe plus récente et moins productive commercialement. C'est vrai que le fait
d'avoir une équipe ancienne et chevronnée est une force pour un centre
d'appels. Mais, de manière générale, nous avons de bons taux de qualité de
service. Tous les jours, les conseillers clientèle traitent un millier de
demandes de brochures. Les réservations représentent 25 % des appels. Le
plateau traite également les demandes d'information.
Quels sont les supports les plus intéressants en génération de trafic entrant ?
En volumes d'appels, c'est la télé qui reste la plus intéressante. Depuis trois
ans, Teleperformance traite les appels générés par les campagnes télé et radio,
en direct et en rémanent. Sachant qu'un spot TV sur TF1 à 20 h 40 un dimanche
peut provoquer 700 appels simultanés. Si on parle de transformations, les
résultats sont importants avec les gros mailings envoyés sur notre base et avec
les opérations de partenariats. On peut générer 1 000 transformations sur une
action menée conjointement avec le magazine Parents. Ce qui est énorme.
Avez-vous adopté un numéro d'appel unique ?
Nous
pouvons utiliser des numéros d'appels différents en fonction des actions, des
supports et des médias. Sur les spots radio, par exemple, lorsque nous voulons
identifier la station écoutée par l'appelant. Nous tâchons au maximum
d'identifier la source des remontées. Quand on communique sur la quatrième de
couverture d'un magazine SFR ou Orange, dans la mesure où la diffusion est
importante et que les appels générés seront nombreux, nous avons tout intérêt à
connaître la source afin de suivre au plus près les taux de transformation et
de piloter au plus précis les campagnes de marketing direct. Pour les actions
en partenariat, les conseillers les identifient tout de suite puisque nous y
proposons des offres commerciales spécifiques.
Et l'émission d'appels ?
Le "gros" de l'émission d'appels concerne les relances,
notamment pour les règlements et en confirmation ou infirmation des
préréservations sur Minitel. Mais l'émission d'appels reste marginale par
rapport à la réception. Et le développement des actions proactives de
fidélisation constitue un axe stratégique auquel nous allons travailler cette
année.
Comment cela ?
En fait, nous sommes en train,
ici, d'intégrer au service clients, qui travaillait jusqu'à présent beaucoup
par l'écrit, une démarche active de contacts sortants. Les rappels s'inscriront
dans deux directions. D'une part, les clients qui ont rempli l'"opinion de
séjour", c'est-à-dire le formulaire auquel nos clients sont invités à répondre
au terme de leur séjour, en mentionnant s'ils vont revenir certainement,
probablement, s'ils n'ont pas d'idée à ce sujet, ou s'ils n'ont sûrement ou
probablement pas l'intention de revenir. 30 % de la clientèle prend le temps de
répondre. Nous avons réalisé il y a un an un test téléphonique auprès de 150
clients de cette dernière catégorie, pour nous apercevoir qu'après un entretien
de 20-25 minutes, 80 % d'entre eux changeaient d'avis. Après une année, le
retour effectif dans nos domaines, sur ces 80 %, a été de 20 %. Ce qui est
énorme. C'est pourquoi nous voulons systématiser l'émission d'appels en vue de
désamorcer les mécontentements. Ca ne représentera pas un quantitatif énorme.
Mais c'est de l'or.
Quel sera le deuxième axe d'émission d'appels ?
Il concernera les clients qui ont fait un premier séjour chez
Center Parcs. On sait comme il est difficile de faire venir les gens une
première fois. C'est aussi difficile de les faire venir une deuxième fois.
Mais, quand il sont revenus, c'est bon, le processus est enclenché, ils
reviendront. Il est évident que cette activité d'émission est potentiellement
beaucoup plus lourde en termes de volume et que nous ne sommes pas équipés en
interne pour rappeler tout le monde. Mais on peut faire des sélections. Et
c'est ce que nous allons faire dans les six prochains mois sur la base d'un
certain nombre de critères. Par exemple, étant donné la situation géographique
de nos deux domaines français, nous ne rappellerons pas en priorité les clients
de Marseille. Mais plutôt, en grande partie en tout cas, des clients habitant
en région parisienne. Nous appellerons des clients ayant rempli leur "opinion
de séjour" et d'autres qui ne l'auront pas fait. Ce, afin d'analyser, par
exemple, les raisons d'un non-retour et d'essayer d'agir contre par une offre
appropriée. Nous allons commencer avec deux conseillers de vente qui seront
formés à cette fin.
Quelle est votre politique en matière de motivation ?
L'encadrement se voit attribuer des primes
d'objectifs. L'ensemble des conseillers de vente bénéficie, pour sa part, d'un
système de motivation commun, reposant sur trois critères : le taux annuel de
traitement d'appels, la vente additionnelle, les "dates challenges" (une
quinzaine dans l'année). En valeur absolue, la prime peut être de 610 à 760
euros par an. Le salaire d'entrée d'un téléconseiller est de 7,17 euros (47
francs) de l'heure en CDD et 7,93 euros (52 francs) en CDI. Mais nous sommes en
train de revoir pleinement cela à la hausse. Peut-être avec une part de
variable plus importante, nous réfléchissons. En tenant compte aussi des
pratiques au sein du groupe Pierre et Vacances. Dans les trois mois qui
viennent, nous aurons revu cette question.
Biographie
Gérard Mille, 44 ans, est né au Vietnam et a passé son enfance aux Antilles. Titulaire d'un DESS de droit, il entre en politique comme assistant parlementaire d'un élu parisien, avant d'intégrer un cabinet conseil en formation où il travaille notamment au marketing direct de l'activité salons d'American Express. Il rejoint ensuite la société Charter, spécialisée dans le bus mailing, puis Infocartes, le concurrent direct. En avril 1990, il est nommé directeur des ventes de Center Parcs, entreprise alors quasiment inconnue en France.
L'entreprise
Créé en 1968 aux Pays-Bas, Center Parcs Europe compte aujourd'hui 15 sites en Hollande, Belgique, Allemagne, Grande-Bretagne et France. Lancée dans l'Hexagone en 1988 avec l'ouverture du domaine des Bois-Francs en Normandie, la société compte aujourd'hui un deuxième site aux Hauts-de-Bruyère en Sologne et emploie 1 500 personnes. En avril 2001, l'entreprise a été rachetée par Pierre et Vacances et par Deutsche Bank Capital Partners. Center Parcs Europe réalise un chiffre d'affaires de 550 ME. Center Parcs France, qui affiche une belle santé financière, termine son année fiscale (avril) avec 93 % de taux de remplissage annuel.