Eclaireur en camp externalisé
Scoot France « Nous voulons débanaliser la prestation annuaire. » C'est en
ces termes que Jean Gondé, directeur des opérations de Scoot France, résume
l'ambition qui a présidé à l'un des lancements les plus médiatisés de ces
derniers mois. Depuis le 20 mars dernier, Scoot, opérateur de recherche et de
renseignement autour de services professionnels, est accessible au public
français par téléphone ou Internet. Lancé sous l'égide de Scoot Europe, filiale
détenue à moitié par Vivendi Universal Net et scoot.com (dont Vivendi est
actionnaire à 25 %), Scoot France bénéficie d'un budget de 50 millions d'euros.
Il s'agit en fait de la déclinaison hexagonale d'un modèle qui a déjà trois ans
d'existence en Belgique, quatre aux Pays-Bas et six en Grande-Bretagne où le
service serait devenu quasi institutionnel, « au même titre que les Pages
Jaunes », avance Jean Gondé. Outre-Manche, la société ne serait cependant
toujours pas rentable. Ce qui ne freine en rien les ambitions de Vivendi, le
groupe souhaitant se développer en Allemagne, Italie et Espagne en 2002. En ce
qui concerne Scoot France, qui table sur un chiffre d'affaires de 10 ME au
premier exercice et de 100 ME pour 2003, le seuil de la rentabilité est fixé à
2003. Le principe de cet annuaire est de faire le lien entre consommateurs et
professionnels. Mais, là où les Pages Jaunes aident à trouver les coordonnées
exactes d'un professionnel à partir de son nom (ou, de manière plus étendue, de
son activité), Scoot propose à ses utilisateurs de répondre à des questions
pratiques plus générales sur des professionnels dont ils ne connaissent pas le
nom. Exemple : je cherche pour 6 personnes, dans le 11e arrondissement de
Paris, un restaurant indien assurant un service jusqu'à 23 heures. Pour ce
faire, la filiale de Vivendi doit bien sûr se constituer une base de données de
professionnels. Celle-ci comptait fin mars 15 000 abonnés, 30 000 pré-inscrits,
et vise pour la fin de l'année 50 000 membres renseignés. Et 125 000 en 2003,
ce, entre autres, grâce au partenariat créé avec Comareg, éditeur du réseau de
presse gratuite Bonjour et également filiale de Vivendi. Parallèlement, Scoot
s'est adjoint la source France Télécom, soit 3 millions de professionnels. Pour
être référencés dans la base qualifiée, les candidats souscrivent un abonnement
allant de 1 400 à 3 990 F par an. Forfait auquel s'ajoute une facturation à la
mise en contact avec le consommateur (entre 5 et 25 F selon le secteur
d'activité).
OBJECTIF : 45 MILLIONS DE RECHERCHES MENSUELLES EN 2003
Côté utilisateurs, le service est accessible via le site
scoot.fr, par le 3200 (2,21 F) ou le 222, numéro d'annuaire express des abonnés
SFR (5,50 F l'appel). Et, pour répondre à la demande, Scoot a mis en place un
call center animé par une centaine de téléopérateurs et pris en charge par
Cegetel Services à Montrouge (Hauts-de-Seine) et Nancy. Un choix arrêté, on
s'en doute, à l'aune des liens capitalistiques rapprochant le prestataire de
services et son nouveau client, tous deux filiales de Vivendi. Même si le
directeur des opérations revendique le libre arbitre de Scoot : « Cegetel
Services a été choisi pour ses compétences en matière de gestion des annuaires.
Une expérience que peu d'outsourcers peuvent mettre en avant. Nous avons au
demeurant mis sur pied avec Cegetel Services une relation contractuelle des
plus classiques. » Soit. Mais avec quelques dérogations pourtant à la règle
"classique", dans la mesure où Cegetel Services fait, de son côté, largement
appel à des outsourcers. Lorsque Scoot sous-traite chez Cegetel Services, rien
n'empêche le prestataire d'externaliser à son tour chez Atos ou
Teleperformance. Une architecture structurelle et fonctionnelle qui ne facilite
pas nécessairement l'approche qualitative. Le service d'annuaire devrait
d'ailleurs bientôt faire appel en direct à d'autres prestataires. Du moins si
l'activité confirme les taux de croissance augurés en interne. De 100,
l'effectif des téléopérateurs pourrait passer à 400 « dans les 3 à 6 mois »,
affirme-t-on chez Scoot. Les agents en place ont été sélectionnés par Cegetel
Services et formés sous l'autorité d'équipes Scoot (session de 5 jours). Le
service a démarré sur un rythme de 10 000 recherches par mois. « Nous visons le
million de recherches mensuelles pour la fin 2001. Et 45 millions en 2003. Nous
enregistrons déjà une montée en charge quotidienne de 20 % », précise Nicolas
Arib, responsable de l'activité centre d'appels, transfuge d'Experian. Quant
aux objectifs de qualité de service, il sont pragmatiquement calqués sur ceux
du service de gestion de l'annuaire chez SFR, soit 90 % des appels décrochés en
moins de 6 secondes. Mais, avant d'en arriver là, il faudra maîtriser un trafic
naturellement fluctuant (hors même le phénomène de croissance) et lisser les
effectifs et la production en conséquence. Pour l'heure, Scoot est toujours en
stratégie - agressive - de conquête. Matraquage publicitaire oblige, le
dimensionnement des équipes est à géométrie on ne peut plus variable. Autre
facteur de justification du choix de Cegetel Services qui dispose en interne
des ressources nécessaires. « Nous ne répondons pas aux normes de trafic d'un
call center classique, souligne Nicolas Arib. Les appels démarrent un peu moins
tôt le matin et un peu plus tard le soir, avec une forte charge les vendredi et
samedi soir, ainsi que le dimanche. » Le service étant ouvert en 7 j/24 h.
Dans un service devant assurer de fortes pointes d'activité, avec - mode de
rémunération au contact oblige - des objectifs de productivité soutenus,
comment gérer le rapport volume/qualité de service ? « On se doit d'être un peu
directif avec la clientèle », lâche le responsable du call center. Si les
demandes téléphoniques sollicitant la prestation annuaire basique (source
France Télécom non renseignée) se traitent dans une moyenne d'environ 40
secondes, la durée des communications téléphoniques portant sur la base
qualifiée de Scoot se situait fin mars entre une et deux minutes. C'est trop.
La consigne étant de dépasser à peine les 60 secondes. Scoot s'est par ailleurs
approprié la bonne vieille règle des services annuaires qui veut que
l'utilisateur n'ait droit - sans, bien sûr, qu'on s'empresse de l'en informer -
qu'à trois demandes par contact avec un agent. « Nous sommes contraints de
trouver une bonne adéquation dans le service rendu entre le consommateur et le
professionnel. Sinon, ça ne marchera pas », soutient néanmoins Jean Gondé. Il
est à cet effet intéressant de noter que, pour le traitement de sa structure
après-vente, dédiée à la qualification de la base des adresses professionnelles
et au suivi des relations avec les abonnés, Scoot à privilégié l'interne : 25
personnes traitaient, fin mars, entre 500 et 700 appels par semaine.