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DES FREINS AUX CONTROLES EFFECTUES PAR LA CNIL

Le Conseil d'Etat a annulé le 6 novembre 2009 la sanction infigée par la Commission nationale informatique et libertés (Cnil) à une société opérant par démarchage téléphonique qui ne respectait pas les règles relatives au traitement du droit d'opposition.

Publié par La rédaction le
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CORINE HOVNANIAN. Avocat assicié, cabinet Fidal

CORINE HOVNANIAN. Avocat assicié, cabinet Fidal

ANTOINE LE BRUN. Avocat, cabinet Fidal

ANTOINE LE BRUN. Avocat, cabinet Fidal

Saisie par des particuliers se plaignant d'être démarchés par téléphone par une société spécialisée dans la vente et la pose de fenêtres en dépit de l'opposition qu'ils avaient formulée, la Cnil effectue plusieurs contrôles dans les locaux de cette société. Après avoir mis en demeure cette dernière de se conformer aux exigences légales, la cnil a constaté qu'elle n'avait pas mis en place un process de gestion des demandes d'opposition garantissant la prise en compte rapide et systématique des réclamations des particuliers, le traitement des réclamations ne reposant que sur «leur transmission, au moyen de notes manuscrites, par le téléopérateur à son responsable, seul habilité à supprimer le numéro de la base de données». La Cnil lui a ainsi infligé une pénalité de 30 000 euros et lui a enjoint de cesser d'utiliser le traitement de prospection commerciale.

La pénalité aurait pu être plus importante, la loi Informatique et libertés fixant son maximum à 150 000 euros (300 000 euros en cas de récidive). Surtout, à la pénalité appliquée par la Cnil pouvaient s'ajouter des sanctions correctionnelles. En effet, le non-respect des obligations posées par la loi Informatique et libertés, même par ignorance ou par imprudence, est passible d'un très grand nombre d'infractions pénales parmi lesquelles figure le traitement, malgré l'opposition de l'intéressé, de données permettant de l'identifier, directement (nom, prénom...) ou par recoupement.

La société a pourtant contesté la sanction prononcée par la Cnil en la soumettant à la plus haute juridiction administrative française, le Conseil d'Etat, seul compétent pour connaître de ces sanctions.

Bien lui en a pris ! Le Conseil d'Etat a en effet annulé la sanction infigée par la Cnil pour ne pas avoir informé préalablement la société contrôlée de son droit de s'opposer à la visite.

Si la loi Informatique et libertés permet à la Cnil d'effectuer des contrôles sur place, elle subordonne ces contrôles soit à l'autorisation préalable d'un juge, soit à l'absence d'opposition de la personne contrôlée.

Pourtant, la loi n'impose pas explicitement à la Cnil d'informer la personne contrôlée de sa faculté de s'opposer à la vérification sur place. Bien au contraire, elle rend passible de sanctions correctionnelles quiconque s'oppose à l'intervention de la Cnil. Le Conseil d'Etat estime que cette obligation d'information résulte du droit au respect du domicile - appliqué dans certaines circonstances aux locaux professionnels -, édicté par la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950, texte auquel la loi française ne peut déroger. En l'espèce, le Conseil d'Etat délivre ainsi la société contrôlée du risque de sanctions. Doit-on cependant en conclure une certaine clémence au bénéfice des opérateurs de démarchage téléphonique ? Certainement pas, mais en revanche cette décision rend les contrôles de la cnil moins aisés.

Rappelons que la loi ne précise pas l'ampleur du contrôle qui sera effectué par le juge lorsque la Cnil sollicite l'autorisation d'effectuer un contrôle sur place. La Cnil devra-t-elle étayer ses soupçons par des preuves ou l'appréciation du juge portera-t-elle sur l'ampleur du contrôle envisagé ? Enfin, les vérifications sur place ne constituent que l'un des moyens de contrôle de la Cnil. En pratique, celle-ci recourt le plus fréquemment à des questions écrites. Refuser d'y répondre, fournir des réponses sciemment erronées et/ou dissimuler les infractions que ces questions auraient pu révéler peut constituer une opposition à l'action de la Cnil passible de sanctions correctionnelles.

Pour tout complément d'information, vous pouvez interroger nos experts par courriel adressé à corine.hovnanian@fdal.fr ou à antoine.le-brun@fdal.fr

La rédaction

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