CMC La fidélisation comme dynamique de service
L'émergence de la téléphonie mobile a drainé dans sa mouvance une palette
de sociétés spécialisées dans la prestation de services complets autour de
l'offre des opérateurs télécoms. Ces SCS (sociétés de commercialisation de
services) sont à ce jour 12 en France : sept sociétés indépendantes, deux
filiales captives de France Télécom Mobiles et SFR, auxquelles on a coutume
d'ajouter les trois plateaux intégrés aux trois opérateurs FTM, SRF et
Bouygues. Sociétés de service avant tout, ces SCS sont organisées autour d'une
activité centrale de relation avec leurs clients, à savoir les abonnés des
opérateurs de téléphonie mobile. A ce titre, elles reflètent on ne peut mieux
l'évolution de ce métier à part entière que constituent les centres d'appels.
Rapidement dépassées par un succès inattendu de la téléphonie mobile, les SCS
ont en effet dû apprendre plus vite que toutes autres entreprises les ficelles
de la relation clientèle à distance. Parmi les sept entreprises indépendantes,
CMC, créée en 1991 (la première en France), et qui commercialise les offres SFR
et Itinéris, a connu comme ses homologues certaines difficultés à répondre à
une demande largement surdimensionnée par rapport à l'offre. "Toutes les SCS
ont au début péché par la qualité de service. J'ai eu connaissance de chiffres
datant de 1997 et qui font état de taux de pertes d'appels avoisinant les 70
%", note François Imbach, directeur relation clients de CMC.
DÉLÉGATION TOTALE DES SERVICES
Répondre à une demande
massive, une tâche d'autant plus délicate pour les SCS qu'elles reçoivent une
délégation totale des opérateurs en matière de couverture de services :
commercialisation, facturation, ouverture et gestion des lignes et relation
clientèle. Les SCS ne sont pas des outsourcers, les abonnés sont leurs propres
clients (même s'ils ne le savent pas toujours). "En 1997, nous avons investi
dans un véritable centre d'appels, qui est devenu un département en propre au
sein de l'entreprise. Aujourd'hui, CMC emploie 250 personnes dont 130 pour la
seule direction relation clients", explique François Imbach. Le centre
d'appels de CMC traite l'ensemble des services liés à un l'abonnement, excepté
la facturation qui relève de la direction financière. Le service client de la
SCS s'organise autour de trois pôles principaux. Une équipe de 15 personnes est
dédiée à l'ouverture des lignes pour le compte des clients particuliers et
entreprises. Une autre structure, composée de 22 opérateurs, travaille en
émission et en réception à la fidélisation des abonnés et plus ponctuellement à
certaines opérations de phoning (notamment les enquêtes de satisfaction
clientèle : 150 personnes interrogées chaque mois). Enfin, l'équipe relation
clients, ou hot line, est chargée de répondre aux demandes les plus diverses :
explications techniques ou commerciales, mise en place et retrait d'options,
litige sur les factures, lancement de nouveaux services, changements
tarifaire...Cette équipe relation clients regroupe deux divisions : un pôle
grand public, qui compte 60 conseillers clientèle en front line et 16 en back
line ; un pôle entreprises, dédié à la gestion de la relation avec les grands
comptes, qui emploie 12 personnes.
ANTICIPER LES RÉSILIATIONS
Au sein de chacune de ces trois équipes, ouverture de
lignes, service clients, fidélisation, chaque conseiller répond aux abonnés de
l'offre SFR comme à ceux d'Itinéris. "Nos téléconseillers décrochent au nom de
CMC. Nous ne sommes pas des sous-traitants travaillant pour le compte de SFR ou
d'Itinéris. Les appelants sont nos clients et nous devons les fidéliser en tant
que tels. La fidélisation est au coeur du fonctionnement du centre d'appels.
C'est un principe stratégique", souligne François Imbach. La fidélisation, tel
est le credo affiché par CMC dans les axes majeurs d'orientation de son centre
d'appels. Un mot d'ordre qui se décline à tous les niveaux d'exploitation du
service clients. A commencer par la détection des intentions de fermeture de
contrat. Chaque client exprimant une demande de résiliation est rapidement
rappelé par un conseiller qui identifie les motifs de cette désaffection. Par
ailleurs, dès lors qu'un opérateur du service clients détecte une velléité de
résiliation, même informulée, même au stade virtuel, il en informe l'équipe de
fidélisation, qui prend les choses en main. Une démarche pro-active qui porte
ses fruits puisque les taux de rétention sur des clients exprimant clairement
une volonté de résiliation sont de 10 à 15 %. Les opérations de phoning
préventif ne se limitent pas à l'infléchissement des manifestations
d'infidélité chez la clientèle : l'une des missions du centre d'appels de CMC
réside dans le montage d'opérations ciblées sur les différents segments de
clientèle. La base de données fait ainsi l'objet d'analyses catégorielles sur
la base desquelles s'orchestrent des actions promotionnelles régulières, en
fonction de l'âge, des modes de consommation ou encore du taux de composition
d'un même numéro par le client. "Sur les opérations spéciales, nous obtenons
des résultats positifs à 30 % Ce qui signifie qu'en appelant 100 personnes, on
estime pouvoir en convaincre 30 de nous être fidèle plus longtemps", précise
François Imbach.
PAS DE PRODUCTIVITÉ À OUTRANCE
Cette
politique de fidélisation trouve un écho amplifié auprès de la clientèle
entreprises. Toute société considérée comme un "grand compte", à savoir ayant
ouvert au moins 50 lignes, se voit affecter un interlocuteur unique sur le
centre d'appels de CMC. "La clientèle professionnelle nous offre davantage de
perspective en matière d'opérations de phoning : la fidélisation, bien sûr,
mais aussi la vente", souligne François Imbach. Qu'il s'agisse de fidélisation,
de vente, ou de traitement des questions les plus diverses, la politique du
centre d'appels de CMC ne joue pas sur une productivité à outrance. Ainsi, le
taux de décroché aux appels, qui a tellement entâché l'image des opérateurs de
téléphonie mobile aux débuts de la grande poussée de consommation, ne figure
pas parmi les obsessions du directeur du service clients. "Beaucoup de
responsables de centres d'appels travaillent au taux de réponse pur. En
moyenne, on se fixe un objectif maximal de 5 % d'appels perdus. Quitte à faire
patienter les clients plusieurs minutes. Je ne suis pas convaincu de la
pertinence d'une telle pratique", avance François Imbach, qui a préféré tabler
sur la rapidité de la réponse que sur le taux de décroché. Aujourd'hui, le
centre d'appels de CMC affiche un taux de 17 % d'appels perdus, mais avec un
temps d'attente très faible. Soit l'appelant se voit immédiatement orienté en
file d'attente et se verra répondre en moins d'une minute (30 secondes en
moyenne). Soit il reçoit un message pré-enregistré de dissuasion l'invitant à
rappeler ultérieurement.
UN CLIENT APPELLE EN MOYENNE 4-5 FOIS PAR AN
Cette alternative repose entièrement sur l'état du trafic. La
moitié des clients de CMC appellent une fois par mois. Et, en moyenne, un
abonné SFR ou Itinéris composera le numéro de la SCS quatre à cinq fois par an
(deux fois durant le premier mois suivant l'ouverture de la ligne). L'équipe
service clients du centre d'appels de CMC reçoit quelque 120 000 appels par
mois. "Nous sommes soumis aux pics d'appels que l'on identifie sur la plupart
des plates-formes : une pointe entre 9h30 et 12h, une autre entre 14h30 et
17h30. mais il ne s'agit pas de variations trop sensibles. La production est
donc relativement facile à gérer", précise François Imbach. De même que sont
prévues les pointes durant les "trains de facturation " (trois jours pour SFR
et trois jours pour Itinéris) : la plate-forme de CMC fait alors l'objet d'un
redimensionnement, alimenté par des personnels de l'administration ou de
l'équipe de fidélisation qui se connectent en débordement. Tout comme ils ne
sont pas soumis à des règles strictes en termes de productivité, les
conseillers clientèle ne bénéficient pas d'intéressement à la production. "Je
privilégie les primes à la carotte quantitative. En 1999, pour la deuxième
année consécutive, l'ensemble des salariés recevront deux mois de salaire au
titre de la participation légale aux bénéfices. Par ailleurs, nous délivrons
une prime de fin d'année en fonction des résultats, qui peut représenter de un
demi à trois quarts d'un mois de salaire. Mais je ne suis pas pour
l'intéressement à la productivité. Je pense qu'une politique de primes est plus
fidélisante", explique François Imbach.
RECRUTEMENT DANS UN RAYON DE 15 KM AUTOUR DU SITE
Recrutés pour la plupart à niveau bac+2,
formés initialement durant trois semaines puis placés sous tutorat durant six
mois, les conseillers de clientèle suivent des sessions de formation permanente
une demi-journée par mois. Si la formation participe de la fidélisation des
équipes, l'origine de recrutement est également un critère important : CMC
n'emploie que des personnes habitant dans un rayon de 15 kilomètres autour de
Saint-Quentin-en-Yvelines, lieu d'implantation du centre. L'objectif étant que
chacun n'ait pas plus d'un quart d'heure de trajet entre son domicile et le
travail. Le personnel travaille 38h50. "Le passage aux 35 heures, c'est 10 %
de temps de travail en moins. Mais je ne pense pas que nous recruterons 10 % de
personnes en plus. Je sais que ça n'est pas bien. Je crois pour ma part aux 35
heures. Elles sont faites pour créer de l'emploi. Mais il y a les réalités
économiques..."
CMC en quelques points
CMC (Communication de mobiles cellulaires), quatrième SCS indépendante en France, commercialise les offres de France Télécom Mobiles et de SFR. Elle compte 130 000 abonnés SFR et 100 000 abonnés Itinéris. Depuis 1998, CMC est également sous-traitant pour France Télécom et exploite un centre d'appels pour l'offre Ola (250 000 abonnés). La société compte plus de 1 200 points de vente. Le call center de CMC est accessible du lundi au samedi inclus de 8h30 à 20h via numéro RTC, et assure une permanence 7 jours sur 7 et 24 heures sur 24 pour les pertes ou les vols. Il reçoit en moyenne 120 000 appels par mois pour la seule hot Line. Avec un chiffre d'affaires de près d'un milliard de francs, CMC revendique le titre de seule SCS profitable depuis 1995.