Au coeur de la restructuration
En 1996, la Banque Populaire de Lorraine réalisait que le téléphone
occupait de plus en plus de place dans sa relation clientèle, prenant ainsi la
mesure de l'une des évolutions majeures du secteur des services. Comme
l'ensemble des établissements bancaires, la BPL constatait parallèlement que la
prise d'appels perturbait le travail des chargés de clientèle et que la qualité
de service était loin d'être optimale du fait du nombre grandissant d'appels
non traités. En février 1997, la banque met en place un centre d'appels,
Allodis Lorraine, qui emploie à ses débuts une équipe de six conseillers.
Aujourd'hui, le plateau compte 53 postes, pour 48 téléconseillers encadrés par
un responsable et trois superviseurs. En 2000, Allodis Lorraine a remporté le
Trophée France Télécom du meilleur numéro d'accueil. Le nombre d'appels
entrants est passé de 160 000 en 1998 à 600 000 en 2000. L'une des vocations du
centre étant la prise en charge du routage d'appels de 70 % de la clientèle de
la Banque Populaire de Lorraine. L'effet, pour les agences, est immédiat. « Le
gain en temps équivaut en moyenne à une heure par collaborateur et par jour. En
comparant la productivité des agences routées avec celles qui ne le sont pas,
on voit que les premières gagnent 15 % de productivité », explique Laurent
Petitjean, directeur d'Allodis. Les appels répondent à des besoins spécifiques
et divers : autorisations de paiement chez les commerçants, réclamations,
assurances, etc. Le système ACD permettant l'orientation des demandes vers les
équipes idoines. L'accueil des clients ayant quitté la région est ainsi pris en
charge par un groupe de trois téléconseillers. Un autre groupe de six personnes
va gérer les questions relatives aux assurances, etc. Cette politique
d'affectation par compétences étant propre au premier niveau de traitement des
appels. « Tous les téléconseillers restent disponibles en deuxième ligne pour
prendre en charge, si besoin, des appels destinés à n'importe quel groupe de
compétences. Chacun doit pouvoir répondre à quatre types de questions sur cinq
», souligne le responsable du call center. Lorsque la réponse ne peut être
donnée, l'appel est routé vers des chargés de clientèle en agence.
RECRUTEMENT ET SALAIRES HÉTÉROCLITES
Le recrutement sur
Allodis s'est fait d'abord en interne, auprès de personnes ayant déjà une
expérience dans la banque. Depuis un an toutefois, le centre d'appels recrute
surtout à l'extérieur. Quel profil ? « Des jeunes qui viennent de tous les
horizons, des BTS action commerciale, mais également des licenciés
d'histoire-géo, précise le manager. Les nouvelles recrues côtoient ainsi des
salariés ayant de 20 à 25 ans d'expérience dans la banque. De ce fait, les
rémunérations peuvent aller du simple au double. Les entrants sont en général
embauchés à 105 000 francs par an, mais le personnel expérimenté qui gagnait
déjà 120 000 francs au sein de la banque conserve bien sûr son salaire. » La
politique salariale d'Allodis étant de privilégier un fixe fort. Pas de prime
car « dès que l'on met en place un système de commissionnement et d'objectifs,
on incite le collaborateur à se mettre en situation de vente traditionnelle ».
Or, Laurent Petitjean estime que les téléopérateurs, qui ont plutôt aujourd'hui
une mission de vente-conseil, pourraient, en étant trop offensifs, « indisposer
le client et ainsi allonger la durée des appels ». La durée moyenne de ceux-ci
étant aujourd'hui de 2,30 minutes. Si l'on devait augmenter chaque appel de
trente secondes, il faudrait étoffer les effectifs à hauteur de 20 %. « En
revanche, précise le directeur d'Allodis, nous allons former les
téléconseillers à détecter les opportunités commerciales. » Durant les phases
de moindre production, les collaborateurs se consacrent à l'émission d'appels.
Ce, sur des produits relativement simples, car il ne s'agit là que d'un
complément d'activité. Par ailleurs, les téléconseillers peuvent traiter les
demandes formulées par les clients internautes de la Banque Populaire de
Lorraine, dont le site web mentionne une touche "webcall", encore très peu
utilisée de l'aveu du directeur du centre, car « techniquement pas encore très
au point ».
HOMOGÉNÉISATION DES SERVICES
Aujourd'hui,
la Banque Populaire de Lorraine est en pleine restructuration. « Nous sommes en
train de reconfigurer nos agences, pour que, quel que soit l'endroit où va
notre client, il dispose de services identiques. » Des téléphones ont ainsi été
installés dans les agences, directement reliés au call center. Ce, à
destination des clients qui ne peuvent souffrir d'attendre. Pour Laurent
Petitjean, cette refonte de l'approche service a des effets directs sur le
plateau d'Allodis Lorraine : « Il n'y a pas de turn-over car il n'y a pas de
tâches en suspens, tout se traite au fur et à mesure et en direct. » D'autre
part, les salariés restent au plus tard jus- qu'à 20 heures, leurs horaires
leur étant communiqués quinze jours à l'avance. Limitation du turn-over ne
signifie pas pour autant blocage dans les perspectives d'évolution des
carrières. Les téléconseillers peuvent évoluer dans le réseau de la BPL comme
chargés de clientèle, avec un portefeuille à gérer, ou bien au siège dans des
métiers à vocation commerciale. C'est d'ores et déjà le cas pour huit personnes
depuis la création du centre, il y a quatre ans. Laurent Petitjean, lui-même
ancien directeur d'agence, fustige l'image négative des centres d'appels dans
les médias. Car non seulement les mouvements sont possibles au sein de
l'entreprise, mais l'organisation fonctionnelle même du plateau n'est en rien
rigide. « C'est nouveau dans le mode bancaire, précise Laurent Petitjean. Le
matin, on arrive, on s'installe là où il y a de la place. Si vous n'appréciez
pas quelqu'un, vous pouvez très bien changer de place le lendemain. Il s'agit
certes d'un métier solitaire, où l'on est seul face au client, mais il y a
également, en plateau ouvert, un vrai travail d'équipe. »
Des rendez-vous virtuels avec les clients
Lorsqu'un chargé de clientèle d'une agence de la BPL, en rendez-vous avec un client autour d'un problème d'assurance, a besoin de l'avis d'un expert, il peut non seulement contacter l'un des conseillers du centre d'appels, mais également le faire "apparaître" dans son bureau grâce à la visiophonie. Les six téléconseillers d'Allodis Lorraine dédiés aux questions d'assurance disposent d'une webcam permettant ces rendez-vous en visio avec les agences. Aujourd'hui, 50 % des guichets de la BPL sont équipés de ce système, et Laurent Petitjean estime que ce mode de contact devrait être généralisé à l'ensemble du réseau en 2002.