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Air France : destination vente à distance

La compagnie aérienne accroît les capacités humaines et technologiques de son service VAD pour développer ses ventes directes et maîtriser sa politique commerciale. Une stratégie représentant 170 MF d'investissement.

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L'aéronautique n'a jamais navigué trop longtemps à l'écart des tendances lourdes de l'économie mondiale. Aussi, surveille-t-elle de près les nouvelles technologies de l'information et de la connaissance du client. Tout comme elle est entrée de plain-pied dans la libéralisation de certains marchés, européen notamment ; tout comme elle a pris conscience de l'importance que revêt la vente directe des titres de transport. Air France ne cache pas le nouvel enjeu commercial et stratégique que représente la vente à distance. La compagnie investit 170 MF dans la rationalisation et l'optimisation des services en charge de cette activité. Avant 1996, il existait 32 sites de réservation accessibles à partir de 32 numéros d'appel différents. Ces centres, présents un peu partout en France, traitaient des opérations pour les particuliers et les groupes, et répondaient aux sollicitations des agences de voyage et aux demandes de renseignements. De plus, ils connaissaient leurs propres amplitudes horaires et, en cas de saturation des plates-formes téléphoniques, il était impossible d'y faire face. De telles disparités impliquaient donc un remaniement structurel. Le projet VAD (Vente à Distance) entre alors en scène avec un double objectif : offrir une meilleure qualité de service en répondant efficacement aux attentes et proposer une alternative à la forte croissance de cette activité au sein de l'entreprise. Air France augurant une progression annuelle de 8 % de ses appels et de 40 % de ses ventes à distance pour les prochaines années. Le projet devrait s'achever avec la mise en place, d'ici 2002, d'un centre d'appels unique "virtuel". Il interconnectera six centres existants (Cachan, Montreuil, Strasbourg, Lyon, Marseille et Toulouse) qui ont été modernisés et redimensionnés pour l'occasion. Quatre d'entre eux (Cachan, Montreuil, Strasbourg et Lyon) comptent entre 150 et 200 positions de travail. En ce qui concerne Lyon, le centre ouvrira ses portes en mars prochain avec trois fois plus de capacités de traitement d'appels qu'auparavant (de 53 à 160 postes de travail). De leur côté, Toulouse et Marseille ne réunissent que 60 positions chacun. Si la vocation de chaque entité consiste dans la vente à distance de titres de transport pour le compte de la compagnie aérienne, certaines assurent en plus des missions ciblées. Mais toutes ont la même organisation fonctionnelle. Par exemple, le site de Cachan traite également les billets à caractère particulier (personnes handicapées, civières...) ; Montreuil, les demandes par Internet. « 80 % de l'activité est commune à tous les centres », indique Carmen Lopez, responsable du centre VAD de Montreuil.

10 000 APPELS PAR JOUR DONT 12 % ABOUTISSENT SUR UNE COMMANDE


Opérationnel depuis le mois de septembre, ce dernier réunit trois services distincts de la relation clients d'Air France : celui en charge des réclamations disposant d'un numéro d'appel communiqué avec les titres de transport, le ROC (Rappel Opérationnel des Clients, voir encadré) et le service de ventes à distance. En tout, ce sont quelque 450 personnes en CDI (86 % de temps plein et 14 % de temps partiel choisi) qui occupent les quatre étages de l'édifice. Avec 160 postes de travail et un taux d'occupation situé entre 2,2 et 2,5 agents par poste, le service vente à distance reste le plus important. Il accueille 350 collaborateurs répartis en 32 équipes. Un superviseur encadre chaque équipe en veillant, d'une part, à l'activité opérationnelle (assistance et contrôle) et, d'autre part, au management de ses troupes. Le centre est joignable de 6 h 30 à 22 heures sans interruption à partir de trois numéros d'accès différents (Clients Club, après-vente billets électroniques, grand public). En revanche, un service continu maintient une permanence pour le compte des clients privilégiés de la compagnie (Club 2000 et Fréquence Plus). Dans le courant de l'année, le 0820 820 820, représentant déjà 80 % des appels, deviendra le seul point de contact de la plate-forme. En tout, 10 000 appels/jour sont traités dont 12 % aboutissent à l'émission de billets. En moyenne, un agent traite 90 appels par jour pour une durée d'environ quatre minutes. De plus, quatre postes de travail sont réservés au traitement des e-mails via le site airfrance.fr. Bien que ce nouveau média reste pour la direction commerciale une source d'interrogation, quant à son développement futur et à la part qu'il pourrait prendre dans la vente directe des titres de transport, il n'est toutefois pas laissé pour compte ni même marginalisé. Puisque chaque agent est considéré comme un vendeur, le personnel suit une formation complète allant de trois semaines pour les débutants à six jours pour l'encadrement. A noter que la salle de formation équipée de postes de travail peut, en cas d'impondérables, servir de cellule de crise. Pour constituer ses équipes, Air France mise sur des compétences de type bac + 2 spécialisées dans le tourisme et parlant l'anglais. En plus de l'apprentissage aux techniques de la relation clients à distance, les débutants suivent une formation au logiciel Alcyon, développé en interne. A l'issue de la théorie, ils achèvent leur formation sur un "plateau junior" pendant trois à cinq semaines et effectuent leurs premières transactions commerciales tout en étant suivis par des superviseurs. Un responsable pouvant encadrer jusqu'à trois débutants. En outre, dès qu'une amélioration intervient sur le logiciel maison, un stage de deux jours complète la formation.

LA QUALITÉ DU SERVICE MESURÉE PAR 1 200 CLIENTS-MYSTÈRE


Alcyon s'appuie sur une souche logicielle Amadeus, l'un des outils de réservation utilisés par certaines compagnies aériennes. Selon les responsables d'Air France, Alcyon facilite les transactions par téléphone en interprétant les réponses, en guidant la vente en fonction du contexte et en offrant une déclinaison des commandes. Le tout, au moyen d'une interface divisée en quatre fenêtres qui affichent simultanément toutes les informations relatives à la demande du client (vols, horaires, tarifs, etc.). La technologie implémentée n'a pas vocation à révolutionner la relation clients. Les centres sont équipés de PABX Alcatel 4400 et le CTI devrait faire son apparition une fois que le routage "intelligent" des appels sera mis en place. Air France a lancé un appel d'offres auprès de France Télécom et d'Alcatel pour la création de la plate-forme virtuelle. Des serveurs vocaux interactifs viendront compléter le routage des appels sur les bonnes compétences. Les six centres seront équipés d'outils de planification et d'optimisation des ressources en fonction de la charge prévisionnelle des appels afin de faciliter le dimensionnement et la gestion des effectifs. « Nous connaissons, en effet, des difficultés dans la régulation des ressources humaines par rapport aux prévisions d'appels et dans la gestion des compétences inhérentes à certaines particularités (billets électroniques...) de notre offre », note Carmen Lopez. Leurs performances devraient également contribuer à l'amélioration de la qualité du service. Celle-ci sera mesurée à partir de huit critères spécialement établis pour la VAD (temps moyen d'attente, accueil du client, informations sur les conditions d'application du tarif...). Plus de 1 200 clients-mystère testeront, sur une année, les objectifs de performance demandés au personnel. Pour la compagnie, un agent est apte à maîtriser toutes les situations au bout de huit mois de travail minimum. Du coup, l'entreprise veille à la formation mais aussi à limiter le turn-over. Une politique d'évolution professionnelle au sein des centres est prévue, en moyenne tous les trois ans. Un débutant reçoit un salaire d'embauche de 8 000 francs net, primes comprises. Ces dernières ne sont pas allouées individuellement mais collectivement sur les ventes réalisées par toute l'équipe. Le même schéma fonctionnel préside à la destinée du site de Strasbourg, le dernier-né des services VAD d'Air France. Les différences se situant au niveau de la taille et de l'organisation des plates-formes. Inauguré à Illkirch, dans la banlieue strasbourgeoise, en novembre dernier, le service est opérationnel depuis le 9 octobre. Le bâtiment dans lequel il se trouve occupe une surface de 3 200 m2 sur trois niveaux. Il abrite, d'une part, les services de la direction régionale Est d'Air France et, d'autre part, les cinq "pétales" de vente à distance. Un "pétale" comprend 40 positions de travail. A l'heure actuelle, seulement deux plateaux fonctionnent. Ils traitent entre 3 500 et 4 200 appels par jour. L'objectif du centre alsacien étant de monter rapidement en puissance en traitant 10 000 appels par jour pour un effectif supérieur à 300 personnes. Aujourd'hui, 79 personnes et quatre superviseurs assurent la réception des appels régionaux et nationaux. La compagnie aérienne compte recruter 250 personnes supplémentaires d'ici trois à quatre ans. En tant que compagnie "Major", Air France se devait de devenir un pionnier dans le domaine de la vente à distance. Les moyens humains et financiers mis en place devraient y contribuer.

ROC : en amont de l'insatisfaction


Le Rappel Opérationnel des Clients (ROC) a déjà fait ses preuves. La compagnie aérienne nationale a importé ce modèle de chez Delta Airlines, un de ses partenaires. Il a pour vocation de prévenir les passagers en cas de retard ou d'annulation de leur vol sur une période allant de trois jours à trois heures avant leur départ. Après quatre mois d'expérimentation et un investissement global de 35 MF, ce service regroupe une quarantaine de personnes basées sur le site de Montreuil. Ouvert de 8 à 22 heures, 7 j/7, ROC apporte automatiquement via Alcyon, le logiciel maison, des solutions d'acheminement sur un ou plusieurs autres vols en indiquant les passagers concernés, ainsi que leur numéro de téléphone. Cette opération se réaliserait en moins d'une minute après la saisie des informations. Par la suite, les agents n'ont plus qu'à appeler les clients concernés. L'équipement de la plate-forme permet également d'envoyer des SMS (Short Message Service), des mails ou encore passer des appels vers les mobiles. A l'heure actuelle, les résultats sont loin d'être probants. En effet, quatre appels sur dix contacts aboutissent et seulement une fois sur dix la personne se fait directement informer des changements survenus sur son agenda. Quoi qu'il en soit, ROC constitue pour Air France une première étape sur l'itinéraire de la relation clients personnalisée à forte valeur ajoutée.

Nicolas Seguin

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