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2001, an deux DU CRM

L'an 2000 a été l'an un du CRM en France. Logiquement, 2001 devrait voir ce marché décoller. Le succès du sigle CRM est tel qu'il est désormais employé à toutes les sauces, engendrant des variations comme le e-CRM (gestion des interactions clients via le Web) ou l'ERM (employee relationship management). Si les entreprises ont encore du mal à faire le tri dans une offre pléthorique de produits informatiques tous censés piloter la relation client, cette explosion de l'offre fait le bonheur des consultants et autres intégrateurs qui croulent sous les projets. Et aussi celui d'éditeurs qui se positionnent sur le seul créneau encore vierge : la mise en relation de tous ces outils et la création d'un cercle vertueux du CRM.

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2001, année du décollage du CRM en France ? C'est l'avis de la plupart des spécialistes du secteur. L'année 2000 a été sans conteste celle de la maturation d'un marché qui a compris que la gestion de la relation client n'était pas affaire de technique (les logiciels) mais de démarche (la stratégie). « Le concept est entré dans les moeurs et le niveau de maturité est plus important, les sociétés identifiant clairement un certain nombre de projets », estime Guy Bonassi, directeur France CRM chez Cap Gemini Ernst & Young (400 consultants). Pour lui, l'année 2000 a connu plusieurs phases successives. En début d'année, les projets e-Business ont été privilégiés, mais restaient déconnectés d'une problématique CRM globale. Puis, il y a eu une prise de conscience de cette erreur, mise en lumière par l'arrivée massive d'Internet qui a permis de relier tous les processus. En fin d'année, on a assisté au retour de l'euro comme priorité numéro un. Résultat : une année de transition pour les projets CRM, qui devraient donc se multiplier cette année. Transition ou non, le marché du CRM continue de croître (voir encadré). Hervé Drevot, responsable du développement de l'activité CRM chez Valoris, estime que les ventes de licences de logiciels augmentent de 50 % par an, et les honoraires des consultants et intégrateurs de 100 à 150 %. Preuve que ce marché explose : le leader mondial des progiciels de gestion de la relation client, Siebel, vient d'émigrer dans un superbe hôtel particulier à deux pas de l'Etoile à Paris (il a aussi acquis l'immeuble qui lui fait face !) pour y installer son siège social. D'ailleurs, Fred Hessabi, vice-président Europe du Sud, ne cache pas que 2000 aura été un bon cru pour sa société : « Pour notre troisième année d'activité en France, nous avons réalisé un chiffre d'affaires d'un milliard de francs. Personne n'a jamais vendu autant de licences de logiciels, tous secteurs confondus », se félicite-t-il.

QUATRE FACTEURS DE SUCCÈS


Ce succès est dû à plusieurs facteurs. Un : le passage à l'an 2000 est terminé, budget et ressources humaines ont pu être réaffectés vers la gestion de la relation client. Deux : la plupart des entreprises ont plus ou moins achevé la réorganisation de leur back office (mise en place d'ERP). Trois : le retour sur investissement des projets CRM est plus facilement identifiable. « On investit dans le CRM car ses bénéfices sont faciles à visualiser », explique Philippe Nieuwbourg, vice-président marketing et communication de Stellar X. Quatre : l'arrivée d'Internet et le développement du e-Business ont encore raccourci les délais de réaction vis-à-vis des demandes des clients. Implanter une démarche CRM devient une question de vie ou de mort pour les entreprises. « Le CRM concerne 100 % des entreprises : tout le monde à des clients », rappelle justement Fred Hessabi. « Il y a une corrélation forte entre gestion de la relation client et e-commerce. On a besoin de gérer les demande en temps réel », ajoute Laurent Cornu, responsable CRM et business intelligence pour l'Europe de l'Ouest chez IBM Global Services (150 personnes). Face à cette demande, l'offre s'est élargie. Le marché s'est segmenté et l'on trouve aujourd'hui plusieurs types de CRM. L'analyste américain Meta Group divise ainsi le customer relationship management en trois segments : le CRM opérationnel (le traitement de la commande), le CRM analytique (basé sur le décisionnel) et le CRM collaboratif (interaction avec le client à travers tous les canaux possibles). C'est ce troisième volet, appelé également front office, qu'on emploie le plus fréquemment pour désigner le customer relationship management. Le front office est lui-même composé de plusieurs techniques différentes bien séparées les unes des autres. La première à s'être imposée fut l'automatisation des forces de vente ou SFA (Sales Force Auto-mation), suivie de la gestion des campagnes marketing, la mise en place de centres d'appels et enfin l'utilisation de l'Internet (Web et e-mails), qu'on appelle aussi e-CRM.

DIFFÉRENTES TYPOLOGIES D'ACTEURS


Pour répondre à cette évolution, on trouve plusieurs typologies d'acteurs. Parmi les éditeurs de progiciels, les "généralistes" se proposent d'effectuer la gestion de l'ensemble des processus, avec des suites logicielles intégrées composées de modules : SFA, gestion de campagnes, call center, gestion des mails, etc. Ces éditeurs visent prioritairement les grandes entreprises. Le leader de ce segment est Siebel. Fondée par un ancien d'Oracle, Tom Siebel, l'entreprise américaine domine le marché des grands comptes, au point que certains commencent à lui reprocher de reproduire les mêmes erreurs que l'éditeur d'ERP SAP, à savoir professer une certaine arrogance. Fred Hessabi est conscient du danger : « Nous faisons fait très attention à cela. Nous devons éviter de tomber dans ce travers », reconnaît-il. Ce qui ne l'empêche pas de rappeler que Siebel France vend deux fois plus de licences que Vantive Mond... Rachetée par l'éditeur d'ERP PeopleSoft, Vantive a disparu en tant que marque propre. Du moins en France, puisqu'au Royaume-Uni, le label Vantive était encore utilisé très récemment, pour l'équipement du centre de contacts de la division carburants et lubrifiants du pétrolier Shell par exemple. Certains observateurs estiment que le rapprochement des deux entités n'a pas encore prouvé sa pertinence. « Les deux acteurs n'ont pas eu le temps matériel de redévelopper leurs outils », avance Philippe Nieuwbourg. Par contre, Guy Bonassi, de Cap Gemini Ernst & Young, estime que « dans la deuxième partie de l'année, il y a eu une clarification du discours, une évolution du produit et des efforts d'ergonomie ». Autre acteur du monde des ERP cherchant à se faire une place dans ce marché en croissance : SAP. Mais la stratégie de l'éditeur allemand a manqué de transparence. Il a, au préalable, procédé à des rachats (K & D, spécialisée dans l'automatisation des forces de ventes), puis il s'est mis à développer en interne des mo-dules de centre d'appels et de SFA avant de ratifier un accord avec Clarify, produit que SAP conseille pour les call centers qui gèrent plus de 3 000 appels par jour. Philippe Nieuwbourg estime que « SAP a conclu ce partenariat tactique dans l'attente de développer un produit ad hoc ». Mais il se retrouvera alors en concurrence frontale avec Siebel, les deux éditeurs visant les mêmes grands comptes. SAP pourra néanmoins faire jouer la synergie entre son ERP et son programme CRM.

L'ARRIVÉE DES CHALLENGERS


Autre acteur important de ce marché : Oracle. Le deuxième éditeur mondial de logiciels a eu dès le départ une démarche offensive sur le CRM, en développant une solution maison, tout en rachetant des briques, comme l'éditeur Versatility. Oracle CRM peut compter sur une bonne intégration avec les bases de données Oracle, et l'éditeur a développé une interface avec SAP R/3. « C'est un outil très riche en termes de fonctionnalités mais qui demande encore beaucoup d'intégration », affirme Guy Bonassi. Parmi les rapprochements conclus l'année dernière, celui de Nortel et Clarify permet à l'industriel de coupler matériel de téléphonie et logiciel de CRM. « La stratégie est cohérente et les évolutions du produit intéressantes », juge le responsable CRM de Cap Gemini. L'interaction entre les briques hardware et software peut en effet constituer une offre séduisante pour les clients de Nortel. Mais, et malgré les dénégations des éditeurs comme Clarify ou Genesys (racheté par Alcatel), le fournisseur risque dans ce cas de figure de se couper d'une partie du marché qui n'apprécie pas forcement d'être prisonnière d'une offre globale. Enfin, l'un des acteurs qui évoluait encore sur ce marché l'année dernière à la même époque, Baan/Aurum, a disparu des citations. Plus personne ne parle de cet acteur européen qui semblait pourtant bien parti. A côté de ces grosses entités qui ciblent d'abord les grands comptes, on trouve une nébuleuse d'acteurs moyens, challengers des généralistes ou éditeurs qui se positionnent en complément des progiciels de front-office. Remedy, par exemple, est un concurrent des éditeurs généralistes. Historiquement centré sur le help-desk, il mise sur sa maîtrise du workflow (gestion des flux). « Les progiciels généralistes sont difficiles à personnaliser. Or, les outils de gestion de la relation client doivent être mis à jour réguliè-rement », remarque Arnaud Chain, directeur général Europe du Sud, qui met en avant la rapidité d'installation de son produit, trois à six mois selon la taille du projet. Remedy affiche un objectif ambitieux : devenir numéro deux ou trois des logiciels de CRM en France. L'éditeur, qui emploie une quinzaine de personnes, veut multiplier ce chiffre par trois cette année et procède en ce moment à des recrutements. Il vise certains départements des grandes entreprises et le "mid market", c'est-à-dire les entreprises moyennes, au-dessus de 500 personnes.

ALTERNATIVES POUR LES PME


Autre société se voulant une offre alternative à celle des grands éditeurs de progiciels CRM : Onyx. Son offre s'appelle Onyx Enterprise Portal et elle est composée de cinq modules, qui proposent tous les services d'une suite CRM : analyse, services clients, centres d'appels, gestion de campagnes marketing, datamart, e-CRM, etc. Onyx veut bâtir une équipe de consultants d'une dizaine de personnes avant la fin de cette année. L'éditeur cible le mid market, dans les secteurs des technologies et de la banque. Le prix de la solution est d'environ 100 000 francs pour un serveur qui gère 20 utilisateurs. Onyx annonce 38 clients et 600 licences vendues en France. D'autres éditeurs centrés sur le créneau des sociétés moyennes sont cités par les experts. Chez Valoris, Hervé Drevot évoque ainsi Pivotal « qui dispose d'une offre intéressante sur le mid market et devrait faire une percée ». Laurent Cornu, d'IBM Global Services, cite également Pivotal, et ajoute Saratoga. Ainsi que Selligent, éditeur européen (une rareté sur ce marché dominé par les sociétés d'origine américaine) qui vient d'annoncer une augmentation de capital de cinq millions d'euros (33 MF). Ce segment en pleine expansion intéresse aussi les "gros", comme Siebel, qui va lancer une offre packagée mid market pour 15 000 francs par poste, 30 000 à 50 000 francs avec les frais d'intégration. Mais quelle que soit leur taille, les éditeurs de progiciels CRM généralistes ne sont pas obligatoirement la réponse unique aux préoccupations des entreprises moyennes ou petites, qui composent le gros du marché. « Il faut se méfier des outils à tout faire », avertit Thierry Vallaud, directeur des études chez D interactive. « Il n'existe pas d'outils globaux de CRM pour les entreprises moyennes et aucun logiciel intégré pour les PME », affirme Philippe Nieuwbourg. Les petites sociétés qui veulent se lancer dans une démarche CRM devraient donc se tourner vers des produits orientés sur une ou plusieurs des fonctions de la gestion de la relation client.

OFFRES ADAPTÉES AUX CAMPAGNES MARKETING


Si on veut par exemple gérer de manière automatisée ses campagnes marketing, on peut acquérir le logiciel Marketic One, dont l'éditeur vient de fusionner avec l'anglais Intrinsic. Ce rapprochement va permettre à l'éditeur français de développer son business face à ses concurrents britannique Prime Response, américain Xchange et français AIMS. NCR, spécialisé dans le datawarehouse, s'est lui aussi lancé dans le CRM avec sa NCR CRM Suite. Elle est composée de six modules : analytique, modélisation, communication, personnalisation, optimisation, interaction. « C'est un outil d'optimisation de la relation client qui allie décisionnel et gestion de campagne marketing multicanal », précise Michel Bruley, directeur marketing de NCR. Plutôt orientée grands comptes, cette suite vaut entre 2 et 4 millions de francs, base de données comprise. Dans un registre proche, Hypérion se positionne sur la partie "business intelligence", c'est-à-dire l'analyse, le pilotage et la modélisation des actions à mener vers le client. « Nous sommes complémentaires de la partie opérationnelle du CRM. Nos produits permettent d'effectuer du reporting, de l'analyse et de la planification, sans lesquelles le CRM n'a pas vraiment de sens », estime Philippe Adam, directeur marketing. Fort d'un partenariat avec Siebel, Hypérion cible lui aussi les sociétés importantes, ses solutions étant accessibles à partir de 800 000 francs jusqu'à plusieurs millions. La gestion des interactions via un centre de contacts est un autre segment très bataillé. On y trouve plusieurs sociétés éditrices de logiciels dédiés au contact téléphonique : Activox, CBC, Cohéris, Com 6, Point Information Systems, Vocalcom, etc.

LES GRANDES MANOEUVRES ENTRE CONSEILS ET INTÉGRATEURS


Alors quand on aborde la question du e-CRM (via le Web), il devient tout simplement impossible de citer les multiples éditeurs et autres start-up qui proposent de gérer les interactions Internet et par e-mail. On peut néanmoins évoquer Broadvision et Vignette, les deux principaux éditeurs de programmes de personnalisation par Internet. En fait, qu'elles choisissent un progiciel généraliste ou plusieurs programmes spécialisés, les entreprises qui veulent mettre en place une démarche CRM n'éviteront pas le recours à un prestataire extérieur. Là aussi, la croissance de ce marché a suscité des regroupements dans les rangs des consultants et des intégrateurs. Ainsi, le cabinet Praemia, spécialisé dans le CRM, a rejoint Valoris en février dernier. Cap Gemini et Ernst & Young ont fusionné pour allier intégration de systèmes et conseil. « Les grands cabinets qui sont partis un peu tard sur ce marché ont mis les bouchées doubles », explique Hervé Drevot, citant Andersen Consulting et PricewaterhouseCoopers, qui ont procédé à des acquisitions afin de muscler leur activité CRM. IBM a également développé son offre CRM via sa filiale Global Services, dont le responsable Europe de l'Ouest n'est autre qu'un ancien consultant de Price. Ces cabinets qui emploient plusieurs centaines de consultants et d'ingénieurs ciblent plutôt les grands comptes. Pour les entreprises de taille plus modeste, il existe de nombreux autres prestataires comme Business et Decisions, eLoyalty, Datapoint, Europstat, Valoris, Steria, Experian, Atos... Cette liste étant naturellement loin d'être exhaustive. Mais là encore, mieux vaut bien déterminer ses objectifs car tous ne sont pas experts sur l'ensemble de l'offre logicielle. « Attention à l'objectivité des intégrateurs : ils ne peuvent pas connaître tous les produits », prévient Philippe Nieuwbourg. Il conseille d'étudier les réalisations de l'intégrateur, de demander des références clients puis de les appeler ou de les rencontrer. Les clients ou prospects seront également bien avisés d'étudier avec soin le contrat qui va les lier au cabinet.

INVESTISSEMENTS : LE POIDS DU CONSEIL ET DE L'INTÉGRATION


En effet, il peut arriver que les meilleurs éléments convoqués lors de la présentation du projet ne soient pas ceux que l'on retrouve sur le terrain... « Le contrat avec l'intégrateur doit être encore plus précis qu'avec l'éditeur du logiciel », ajoute le vice-président de Stellar X. Le choix d'un prestataire sera d'autant plus rigoureux que la facture risque d'être salée. En effet, pour 1 franc dépensé en logiciel, il est nécessaire d'en rajouter 3 ou 4 de plus pour le conseil et l'intégration. Ainsi, Cap Gemini Ernst & Young chiffre entre 3 et 5 millions de francs le prix d'un projet CRM pour une entreprise moyenne comptant une centaine d'employés. IBM Global Services estime qu'il faut prévoir 30 000 à 40 000 francs par poste pour un progiciel "généraliste", capable de traiter les différents aspects de la démarche, mais aussi entre 75 000 et 200 000 francs si on envisage une personnalisation et une intégration aux autres parties du système d'information, comme le back-office. S'il s'agit de se concentrer sur une partie de la relation client, comme l'équipement d'un centre d'appels, le coût est moindre, de l'ordre d'un million de francs selon Remedy. Pour une gestion de campagne marketing, Michel Bruley, directeur marketing de NCR, évalue le projet entre 2 et 4 MF, y compris la fourniture de la base de données. A contrario, un projet global visant à équiper un millier d'agents d'un progiciel CRM intégré vaudra 50 millions de franc selon Hervé Drevot (voir aussi encadré). Mais une fois leur budget bouclé et leur projet déterminé, les entreprises ne sont pas au bout de leurs peines. En effet, le CRM à peine digéré, voici venir le e-CRM. L'arrivée massive des technologies Internet a encore accéléré les interactions avec le client, qui peut demander un produit, poser des questions ou se plaindre quasi instantanément. « Plus il existe de nouveaux médias, plus les délais de réponse doivent être courts. Ça va si vite que certaines sociétés sont obligées d'installer des ralentisseurs pour les envois d'e-mail de confirmation », détaille Philippe Nieuwbourg. Pour Guy Bonassi, « le e-CRM est une évolution logique et un marché émergent, sur lequel il y a pléthore d'offre et qui se trouve encore en phase de sélection ».

LE GRAAL DU CRM ?


Même analyse pour Laurent Cornu, qui évoque les « outils de profiling comme Broadvision et Vignette, l'intégration multicanal et le décisionnel en temps réel ». En fait, piloter la donnée et la transmette à tous les canaux de manière homogène devient une tâche de plus en plus complexe. Bref, au lieu de simplifier la relation entre les entreprises et leurs clients, l'Internet a encore complexifié ce schéma de base. Il faut non seulement adresser son client de la manière la plus précise possible, mais cette action doit avoir lieu instantanément. Mais le e-CRM ne doit en aucune manière être considéré comme un modèle en soi, capable de révolutionner la communication entre sociétés et clients. « Aujourd'hui, beaucoup de banques en ligne comme Ze Bank ou Egg font marche arrière car elles n'ont pas de véritable modèle de business. Egg, par exemple, perd de plus en plus d'argent au fur et à mesure qu'elle conquiert des clients. La tendance lourde est plutôt à réintégrer les projets Internet dans le cadre d'une stratégie multicanal », rappelle Hervé Drevot. « Le e-CRM ? Ca ne veut rien dire ! On a certes rajouté le Web et les mails, mais ce ne sont que des canaux supplémentaires pour un même problème », ajoute pour sa part Philippe Nieuwbourg. En fait, le marché aimerait disposer d'un outil capable de gérer la totalité du cercle vertueux qu'est censé représenter le CRM. Cet ensemble d'actions doit en effet permettre au prospect de devenir client et surtout de le rester, car on sait depuis longtemps que fidéliser un client coûte beaucoup moins cher que d'en conquérir de nouveaux. Or, l'ordre des actions dans le cercle (prospection, fulfillment, marketing, vente, recouvrement, services après vente et fidélisation) ne peut être changé. La société Stellar X se propose de distribuer le fameux Graal, un logiciel qui peut gérer tous ces processus et interfacer les différents outils. Lancé fin janvier, ce produit est censé mettre en relation les logiciels les uns avec les autres. Il sera disponible sous forme d'une offre packagée d'environ 100 000 francs, et distribué par le cabinet Call & Co. Gageons que même avec ce type d'instrument, les moyens de contacter ses clients seront toujours de plus en plus nombreux, créant un besoin d'intégration, de consulting et de produits spécialisés qui feront pour quelques années encore le succès des nombreux acteurs du CRM.

Les logiciels de e-CRM en question


Une enquête menée par Datamonitor pour Peoplesoft sur trois cents responsables de centres d'appels européens implantés dans sept pays a permis de mesurer l'utilisation des logiciels de gestion des call centers avec accès au Web (e-CRM) et l'impact du multimédia sur ces centres de contacts (voir Centres d'Appels n° 22, p. 24). On apprend ainsi qu'en France, 40 % de ces responsables ne peuvent pas accéder à tous les aspects de l'historique de leurs clients avec leur logiciel de e-CRM. Peu de problème pour les services publics (70 %), le tourisme (65 %) et les télécoms (62 %). Par contre, alerte dans l'assurance (55 %), la banque (52 %) et les technologies (38 %), tous secteurs censés pourtant avoir besoin de profils clients précis. Pour Kathleen Klasnic, responsable du programme européen de Datamonitor, « l'échec des services clients sur le Web coûte 1,44 milliard de dollars par an (10 MF) aux entreprises européennes ». En effet, avec 70 % des transactions en ligne abandonnées avant de passer à l'acte d'achat, il est temps pour les entreprises de se doter d'outils efficaces de gestion de la relation client en ligne.

Un marché en plein boom


Le marché du CRM en France connaît une croissance annuelle de + 50 % qui devrait durer encore plusieurs années, au moins jusqu'en 2004, selon les analystes Meta Group et AMR Research. Pour Pierre Audoin Conseil, le marché a totalisé 5,20 MF en 1999, dont 55 % pour les services informatiques, 26 % pour l'exploitation, 15 % pour les licences de logiciels, et 4 % pour la partie conseil. De son côté, International Data Corporation (IDC) évalue ce marché français à 3,97 milliards de francs, dont 3,45 milliards pour les licences et les services associés. La vente de licences a augmenté de 44,2 % par rapport à l'année précédente. La France représente 15,2 % du marché européen, comptant lui-même pour 20,8 % du marché mondial.

Où trouver l'offre logicielle


Le site de CXP (cxp.fr) recense la plupart des acteurs de l'édition de logiciels CRM, même s'il ne propose aucune rubrique sous ce nom. Il faut chercher dans "gestion de la relation client", "force de vente" et "gestion commerciale/administration des ventes". Sous la rubrique Gamix, on trouve des fiches signalétiques sur les entreprises en format pdf. Autre site spécialisé dans la relation client : planeteclient.com. Il propose des études (accès sur abonnement) et des avis d'experts. On peut aussi aller sur crmcenter.com où se trouvent des fiches sur différents progiciels. Ou encore sur le site britannique The European Centre for Customer Strategies (eccs.uk.com) dédié au CRM. Par ailleurs, la société de conseil win-more (winmore.fr), qui s'est positionnée sur le concept de "CRM agency", présente une étude comparative portant sur 29 logiciels de CRM (10 de plus seront ajoutés en février) tous disponibles sur le territoire français et orientés centres de contacts. La partie SFA viendra plus tard. L'étude fait 550 pages et comporte 36 schémas techniques, 200 écrans des progiciels, un glossaire et un tableau récapitulatif. Elle vaut 10 000 francs HT (25 000 francs après ajouts). Cette agence propose aussi des services comme la rédaction du cahier des charges et l'organisation de l'appel d'offres.

Du CRM à l'ERM


Après le client, voici venir le "cliemployé". Ce concept a été défini par le cabinet Affiniteam, créé par Dominique Beaulieu, ancien de Valoris et spécialiste du CRM. Son constat : la relation vers le client atteint ses limites, malgré les moyens (ou à cause des moyens ?) considérables mis en place pour le joindre, et ce déploiement de forces commence à lasser une cible trop sollicitée. L'ERM ou employee relationship management caractérise les relations entre employeurs et collaborateurs. L'ERM est « un nouveau canal de distribution pour les fournisseurs, à la fois très intrusif et respectueux », explique Dominique Beaulieu. C'est le BtoBtoC (marque déposée), qui répond à une charte rigoureuse, avec par exemple l'interdiction d'utilisation des informations confidentielles. Affiniteam se propose d'intégrer les services destinés à fidéliser ces clients-employés et de créer une plate-forme technologique adaptable à l'entreprise via son Intranet. Par exemple, le portail "vie pratique" propose des services de proximité (baby sitting, livraisons à domicile), l'univers "mon entreprise" recense les offres maisons et les "corporate services" (avantages internes étendus à l'ensemble des employés), etc. Il est vrai que le marché du travail est tendu, surtout en ce qui concerne les cadres. En Californie, les entreprises high-tech de la Silicon Valley ne savent plus quoi inventer pour retenir leurs employés, qui passent de plus en plus de temps au bureau. Mais en France, où la culture professionnelle est très différente, pourra-t-on transformer l'employé en client et vice-versa ? Réponse à venir, avec le succès ou l'échec de cette initiative originale.

Patrick Cappelli

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