« Proposer qualité, proximité et expertise »
Le 1er juillet prochain, le marché “Entreprises” d'EDF s'ouvre à la concurrence. Une échéance préparée depuis plusieurs années. Le directeur du Réseau de ventes France de la Division Entreprises (Branche Commerce) dévoile le dispositif relationnel déployé pour en limiter les effets. Le service client a toujours existé chez EDF. Mais, aujourd'hui, il est nettement plus stratégique.
L'une des priorités d'EDF pour 2003-2007 est “la satisfaction de tous les clients”. Comment cette priorité se concrétise-t-elle pour la Division Entreprises ?
Thierry le Boucher : La satisfaction client
part d'un simple constat : un client satisfait est un client fidèle. Il
conserve son fournisseur et achète davantage de produits ou de services.
Aujourd'hui, plus de 90 % de nos clients se déclarent satisfaits, voire très
satisfaits. Ce n'est pas étranger à l'image globale d'EDF qui est, selon le
slogan, “l'entreprise préférée des Français”. Cette satisfaction est un enjeu
encore plus important dans la perspective de l'ouverture à la concurrence du
marché entreprises et collectivités locales en juillet prochain. Les clients
auront la possibilité de choisir leur fournisseur d'énergie électrique.
Combien de clients cela concerne-t-il ?
T. le B. : Pour
la Division Entreprises, cela représente 300 000 clients. Il est d'usage dans
notre profession de bien séparer les clients et les sites. Un client peut avoir
plusieurs sites d'importance et de taille différentes. Historiquement, et parce
que l'électricité se distribue avec des réseaux, nous avions une approche par
site. Un des enjeux de l'ouverture du marché est de parler du client dans sa
globalité. Je précise que, pour l'acheminement, c'est-à-dire le réseau, il sera
nécessaire d'avoir une relation contractuelle site par site.
Qui dit satisfaction client, dit relation client. Quel est le dispositif d'EDF en la matière ?
T. le B. : Le dispositif relationnel d'EDF vise à
optimiser le coût de l'énergie pour notre client. Ce qui compte pour une
entreprise, c'est le chiffre qui lui sera facturé. C'est pourquoi nous
développons de nouveaux services. Notre service Adviso sur Internet, par
exemple, permet à un responsable des achats ou de production de suivre les
fluctuations de la consommation de chacune de ses unités en France.
Comment cela se traduit-il en termes de dispositif ?
T. le B. : La satisfaction client passe par des centres de relation client ou
CRC. Ils ne sont pas que des centres d'appels. C'est avant tout un moyen de
concentrer l'ensemble des demandes de nos clients. Qu'elles arrivent par
téléphone, par fax, par mail, par courrier ou en réponse à notre site internet
[edfonline.com, ndlr]. Quel que soit le canal, nous sommes capables de prendre
en compte cette demande, de la traiter et de la tracer. Cette dernière étape
nous permet d'avoir un état très clair des réclamations que les clients peuvent
nous adresser. Nous avons un maître mot : le client, et une expression : le
“miroir client”. Nous essayons de donner à chacun d'entre eux le miroir qu'il
attend.
De combien de CRC disposez-vous et quelle est leur mission ?
T. le B. : Ils sont au nombre de huit. Leur mission est
d'assurer la vente et l'accueil multicanal. Ventes en rebond sur des appels
entrants mais aussi en appels sortants. Nous n'avons pas voulu créer un
gigantesque centre d'appels. Nous avons fait le choix de la spécialisation avec
des agents EDF parce que le produit est à la fois simple et compliqué. Les
dispositions d'un contrat de fourniture électrique nécessitent une véritable
expertise.
Comment vos CRC s'organisent-ils ?
T. le
B. : Ils se situent à Paris et dans les grandes villes de province (Lille,
Dijon, Lyon, Marseille, Bordeaux, Orléans et Nantes). Nous avons privilégié la
proximité et l'adaptabilité. Proximité, cela signifie que l'appel est pris en
charge par le CRC depuis sa région d'émission. En revanche, il peut très bien
être routé sur le premier CRC disponible en cas de saturation. Nous sommes
organisés en réseau virtuel.
Combien de personnes travaillent sur les CRC ?
T. le B. : D'ici la fin du mois de février, il y
aura plus de 200 personnes sur les CRC. En tout, la Division Entreprises compte
3 000 personnes chez EDF. Cette division de la Branche Commerce gère la
relation client pour les grands comptes, les PME-PMI et les collectivités
locales.
Quel est leur profil ?
T. le B. : Ces
personnes travaillaient déjà dans le domaine commercial. Nous avons veillé à ce
qu'il y ait une diversité dans les parcours. Nous avons fait en sorte que les
huit CRC ne soient pas seulement féminins ou masculins ; qu'il y ait des
personnes en début de carrière et d'autres ayant une plus longue expérience,
etc. Nous tenons à ce qu'il existe un échange d'expérience pour assurer une
bonne proximité et souplesse vis-à-vis de nos clients
Comment leur travail s'organise-t-il ?
T. le B. : Nous avons fait le choix
de l'adaptabilité. Nos agents ne sont pas dédiés à une activité en particulier.
Nous organisons des rotations entre les différentes tâches du CRC. Nous le
faisons aussi en fonction des affinités de chacun d'eux. Il y a un principe de
base qui est : on fait mieux ce que l'on prend plaisir à faire. Notre état
d'esprit s'inscrit dans cette capacité à changer d'activité. Nos télévendeurs
proposent dès qu'ils l'estiment nécessaire un rendez-vous avec les commerciaux
terrain. Nous ne pouvons pas tout expliquer par téléphone. Ce canal nous
garantit simplement une disponibilité. En l'occurrence de 8 à 18 heures tous
les jours ouvrables. Ceci dit, certains clients ont des responsables ou des
commerciaux dédiés.
Combien traitez-vous d'appels entrants ?
T. le B. : Globalement sur une journée, nous recevons entre 1
000 et 2 000 appels. Ces derniers temps, nous dépassons la barre des 1 500
appels quotidiens.
Et pour les appels sortants ?
T.
le B. : Nous sommes en phase de montée en puissance. Pour le moment, nous
sommes plus concentrés sur les appels entrants que sur les sortants. Cela
prendra de l'ampleur au fur et à mesure que l'on se rapprochera du 1er
juillet.
Et pour le Web ?
T. le B. : Le contact web
est encore un peu balbutiant. Il n'est pas pleinement entré dans les habitudes.
Cela dit, nous y sommes favorables. Il a le mérite de permettre une réponse
immédiate et de rassurer. En raccrochant son téléphone, le client peut avoir un
doute sur la prise en compte de sa demande. Nous mettons au point l'envoi d'un
mail l'informant de la prise en considération de celle-ci. Ce couplage
nécessite de compléter la qualification de notre fichier. Cette démarche ne
pouvant être valide qu'en possession de l'adresse mail du client.
Dans son ensemble, combien ce dispositif aura-t-il coûté ?
T. le B. : Je ne peux pas vous donner ce chiffre.
Mais il est budgété…
T. le B. : Tout à fait. Nous avons
défini des programmes à partir de business plans. Il est clair que, sur un
marché ouvert, les coûts se retrouvent dans les prix. Il est de notre
responsabilité d'apporter le meilleur service dans les conditions de prix qui
n'excluent pas un certain nombre de clients. Nous n'ambitionnons ni d'être une
épicerie de luxe, ni d'être un tenant du hard discount. La qualité de service,
l'expertise que nous apportons, nous voulons la faire payer le juste prix. Pas
plus.
Comment mesurez-vous cette qualité de service ?
T. le B. : Cela rentre dans le champ de la certification. Chaque
année, notre accueil client est certifié avec des audits de renouvellement.
Avec notre nouveau système d'information et nos CRC, nous sommes capables de
tracer les contacts, de dire combien de personnes nous ont contactés, le motif
de leur appel… Nous suivons, bien entendu, le temps de décroché, le délai entre
l'expression d'un besoin par un client et sa réalisation. Notre système
informatique enregistre la demande et vérifie que le temps de traitement ne
dépasse pas les normes que nous nous sommes fixées.
Justement, quelles sont-elles ?
T. le B. : L'objectif qualitatif est de 80 %
de clients pour qui la question est résolue dès le premier contact. Nous
pouvons avoir des demandes plus complexes, mais notre souci est d'aller vite
tout en offrant une réponse de qualité. Par exemple, pour une réclamation
client, nous nous engageons à faire une réponse sous les huit jours maximum.
Et pour le temps de décroché ?
T. le B. :
Spécifiquement sur le téléphone, notre taux d'accessibilité au service est de
95 %. En terme de temps, le système mis en place est un système de
disponibilité globale du service. Nous visons un décroché en moins de quinze
secondes.
Vous parlez beaucoup du “système”, quel est-il ?
T. le B. : Le système, ce sont les huit CRC et notre système
d'information qui n'est pas encore déployé sous sa version finale. Ce qui
explique que nous n'avons pas tous les paramètres.
Pouvez-vous en détailler les fonctions ?
T. le B. : C'est un système de CRM
classique, basé sur la technologie Siebel. Il est couplé avec le CTI Genesys.
Il peut suivre à la fois le dossier et le contact du client. Avec notre base de
données, il permet de faire toutes les requêtes intéressantes pour suivre notre
part de marché. Nous partons avec 100 % de parts de marché. Malgré nos efforts,
certains clients partiront. Dans ce contexte, nous souhaitons suivre leur
comportement et analyser leur satisfaction ou insatisfaction. Nous proposerons
de nouvelles offres à partir du 1er juillet 2004. Il faut avoir les moyens de
cibler précisément les prospects afin d'opérer des transactions commerciales
sortantes par téléphone ou, si cela ne suffit pas, proposer un rendez-vous.
Quel va être le rôle des CRC dans le lancement de ces nouvelles offres ?
T. le B. : Là, nous sommes dans la relation client telle
que nous la définissons. Chaque client peut choisir son mode de relation.
L'intérêt de ce dispositif multicanal est de suivre un client dans toutes ses
démarches. C'est vraiment la volonté de tout coordonner, de connaître
l'historique de la relation. Nous voulons avoir la photo du comportement de
notre client pour lui apporter le service le mieux adapté.
Vous êtes dans une logique de cas par cas ?
T. le B. : Nos clients
nous reprochaient de traiter site par site. Maintenant, nous savons les traiter
globalement. Ils peuvent aller sur Internet, consulter un service, visualiser
ou encore croiser différents paramètres de production, vérifier que leur
consommation ne dérive pas… Aujourd'hui, nous faisons de l'individuel avec
beaucoup de proximité.
Le lancement de ces offres a-t-il nécessité une formation particulière de vos agents sur les CRC ?
T. le B. :
Nous avons des personnes qui évoluaient déjà dans le domaine commercial. Elles
connaissent bien l'offre historique d'EDF. Elles se sont portées volontaires
car intéressées par la relation client multicanal. Toutefois, nous avons à les
former. Les réponses par mail ou par téléphone demandent des compétences
particulières. Nous procédons à des formations à la relation et à la vente par
téléphone.
Combien de temps durent-elles ?
T. le B. :
Le cursus complet dure trois semaines. Il est segmenté par journée. Entre le
1er juillet 2003 et le mois de mai 2004, l'ensemble des vendeurs en ligne aura
reçu les trois semaines de formation.
Avec ce dispositif, peut-on parler de révolution culturelle chez EDF ?
T. le B. : Je préfère
parler d'accélération plus que de révolution culturelle. Nous n'avons pas
commencé à nous soucier du client le jour où nous avons appris l'ouverture du
marché à la concurrence… Le rapprochement de l'échéance conduit à une
mobilisation plus forte et, je dirai, plus facile. Parce qu'il est vrai que
l'aiguillon de la concurrence est un bon accélérateur.
Aujourd'hui, votre dispositif est-il prêt, “ronronne”t-il ?
T. le B. : Sur un marché ouvert, on ne ronronne jamais. Nous
sommes en ligne avec notre planning qui prévoit une montée en puissance
jusqu'en juillet 2004. Notre système est en place depuis le 15 novembre 2003.
Il sera pleinement opérationnel au mois de mars ou d'avril. En tant que
directeur du Réseau de ventes, diriez-vous qu'un bon relationnel améliore les
résultats ? T. le B. : C'est clair. Dans notre situation, le bon relationnel va
faire que le client nous passera un coup de fil avant de faire son choix entre
EDF et la concurrence. Le danger est de ne pas avoir l'occasion de faire valoir
ses arguments auprès de sa clientèle. Le deuxième point est qu'un bon
relationnel engendre la confiance. Un client qui nous fait confiance est plutôt
réceptif à toutes propositions de notre part. Nous voulons qu'il trouve chez
EDF de la qualité, de la proximité et de l'expertise.
Biographie
Diplômé de l'école des Hautes Etudes Commerciales (HEC), Thierry le Boucher entre chez EDF en 1983. A l'époque, il intègre le service commercial de Cherbourg où il est responsable Etudes sur le marché des particuliers et des entreprises. Il prend les commandes du service commercial à Angoulême quelques années plus tard. Par la suite, et durant cinq ans, il est directeur adjoint d'EDF-GDF Corse. A la fin des années 90, il rejoint l'équipe commerciale en charge, notamment, de préparer l'échéance du 1er juillet 2004. En 2001, il devient directeur du Réseau de ventes France.