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« Notre ambition à terme est d'être pro-actif et pas réactif »

Renault dispose, depuis 1999, d'un service relation client. Rattaché en France à la direction commerciale du constructeur, et dirigé par Noël Ferre, il crée une proximité directe avec la marque. Une approche devant aboutir, à terme, sur des opportunités de ventes.

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Quels sont les enjeux de la relation client à distance pour Renault ?


Quand nous avons commencé le projet CRM, il y a maintenant huit ans, la question que nous nous sommes posée était de savoir si les clients avaient besoin d'autre chose que d'un simple accès aux garages. Ils nous ont indiqué leur envie d'avoir des conseils émanant du constructeur. Ce qui nous a amené à développer un projet de relation client qui a abouti en 1999. Notre objectif est d'écouter le client pour lui apporter des réponses que le réseau ne peut pas donner. Ce service nous apporte un élément essentiel : la connaissance du client. Nous apprenons beaucoup sur lui. Nous avons des remarques très intéressantes sur notre offre, notre stratégie ou même notre communication.

Où se situe le service clients dans l'organigramme de l'entreprise ?


D'abord, il existe un service de relation client dans chaque pays. Selon les pays, il est directement rattaché au directeur commercial ou au directeur qualité services. Pour la France, nous dépendons de la direction commerciale.

Quelles en sont les missions ?


La première mission est de répondre aux clients, de les satisfaire et de les fidéliser. Notre deuxième mission, un peu annexe, est de gérer l'information client pour en faire des opportunités, aussi bien commerciales que portant sur des remarques à destination de l'interne. Chaque lundi, je me rends à des réunions pour raconter ce que nous ont dit les clients. Et chaque mois, j'anime un comité "Voix du client" où je rencontre mes collègues de la publicité, du marketing produits ou encore du marketing pièces. Je leur dis : "Voilà ce que les clients nous demandent, voilà de quoi ils se plaignent."

Comment s'organise votre service ?


Il y a en fait trois parties. Nous avons d'abord le front-office pour les demandes d'information, qui est sous-traité à Arvato Services. Nous avons ensuite le back-office pour le traitement des réclamations. Ce dernier se divise en deux. Le premier niveau chez Arvato et le deuxième et troisième niveau chez nous, à Saint-Cloud. Enfin, la troisième partie du dispositif concerne les équipes dont la mission est de trouver les réponses pour les conseillers de clientèle. C'est-à-dire que nous n'envoyons pas les conseillers à la pêche à l'information. Il y a des personnes dont le métier est de trouver les réponses.

Quels sont vos effectifs ?


Le contact direct avec le client regroupe un peu plus de 30 personnes et le back-office 70. Ces équipes sont chez Arvato Services à Laxou, à côté de Nancy. En interne, nous avons 30 personnes.

Quelle est la nature de votre contrat avec Arvato Services ?


Nous avons un contrat à durée indéterminée. Nous avons néanmoins précisé que si nous devions nous séparer, nous aurions besoin de temps. Aussi bien de leur côté que du nôtre. Sinon, ce que nous leur demandons correspond à nos objectifs qualité. En particulier, ceux concernant les demandes d'informations. Nous avons prévu des pénalités financières s'ils n'atteignent pas les objectifs fixés.

Justement, quels sont vos objectifs qualitatifs et quantitatifs ?


L'idée soumise au président, et acceptée par lui, est de faire une relation client de proximité avec un taux de réponse optimal. Nous voulons 95 % de réponse à la première sollicitation du client. Cela ne veut pas forcément dire à la première sonnerie. Nous sommes aujourd'hui à 98 % de cet objectif. Ensuite, nous voulons répondre en moins de 8 secondes à 85 % des appels. Nous sommes en ce moment autour des 90 %. Ensuite, nous tenons à donner une réponse de façon instantanée dans 80 % des cas. Là aussi, nous sommes au-dessus de l'objectif avec 90 % d'immédiateté. Enfin, nous réalisons chaque mois une enquête mystère sur sept critères qualité (accueil, prise de congé, phrase de fidélisation...). L'objectif est d'atteindre les 85 % de performance sur chaque point avec un droit à l'échec sur l'un d'entre eux. Depuis le début de l'année, nous ne connaissons aucun échec sur ces critères.

Combien de contacts traitez-vous ?


Nous avons traité l'an dernier 300 000 contacts clients. Sur ce chiffre, les deux tiers concernent le téléphone. Le reste, les courriers ou e-mails. Le téléphone nous intéresse beaucoup. L'avantage, avec lui, c'est que nous arrivons à avoir une gestion interactive des dossiers. Avec le courrier, il faut d'abord en prendre connaissance, puis l'attribuer à quelqu'un pour qu'il y réponde, etc. Nous essayons de transférer l'activité courrier - ce qui est difficile en France - vers le téléphone.

Quel est le profil de vos salariés ?


Pour Arvato, nous disposons de jeunes de moins de 26 ans en contrat de qualification, que nous transformons en CDI. Nous y tenons beaucoup. Nous avons un peu de turn-over, ce qui est normal, mais assez peu. Autour des jeunes, il y a des personnes plus expérimentées. Nous partageons le site de Laxou avec Cegetel. Nous y avons établi, de concert, une sorte de parcours professionnel entre leurs équipes et les nôtres. Cela permet de créer des évolutions de carrière pour les salariés. En général, les jeunes commencent chez Cegetel, puis lorsqu'ils veulent changer, ils viennent chez nous. Ensuite, lorsqu'ils veulent devenir superviseur, ils retournent chez Cegetel, puis reviennent chez nous... Mais ce n'est pas une règle absolue. Nous ne nous connaissons pas avec Cegetel, mais je crois que nous avons la même éthique professionnelle. Nous attendons des personnes stables, compétentes, qui défendent bien la marque.

Et en interne ?


En ce qui concerne l'interne, nous avons trois profils. Premièrement, des jeunes en premier emploi, pour les former avant qu'ils ne rejoignent d'autres services du groupe. En règle générale, nous recrutons une dizaine de jeunes par an. Soit des bac + 2 ou bac + 5. Deuxième type de population, les personnes plus âgées qui ont la pédagogie pour principale qualité. Elles viennent de l'interne. Et ce, afin d'avoir un discours de professionnels avec le réseau. Le dernier profil correspond aux salariés du groupe qui ont un parcours réussi et qui veulent faire du commerce. La seule façon d'entrer dans le commerce, c'est de se frotter aux clients. Ici, ils apprennent à négocier avec le client, le réseau... C'est une porte d'entrée pour évoluer vers autre chose. En fait, nous essayons de cultiver la différence. Nos conseillers n'ont pas tous le même profil, mais ils ont un point commun. Ils ont du talent pour discuter avec le client. C'est le critère de base. L'idée est de s'enrichir aux contacts des autres. Un dossier compliqué est un travail de groupe avant d'être individuel. Bien que le client n'ait qu'un seul interlocuteur.

Quelle formation reçoivent-ils ?


Nous avons deux semaines de formation. Nous avons créé un module spécial pour l'outil Siebel. Ensuite, cela varie en fonction du profil des salariés. S'ils sont complètement étrangers à l'univers Renault, il y a, dans ce cas, de deux à trois jours de formation supplémentaires sur l'entreprise. Et puis, nous avons une partie pratique de traitement des dossiers. Nous faisons travailler nos équipes sur des cas concrets à l'aide d'un échantillon de courriers représentatifs. Cette étude de cas se fait à la fois sur Siebel et en salle avec un didacticiel sur le consumérisme. Par la suite, nous faisons des piqûres de rappel. Nous n'avons pas la prétention de dire qu'au bout de 15 jours, nos conseillers sont opérationnels. Pour qu'un conseiller réclamation soit opérationnel, il faut trois mois et, pour qu'il soit bon, il faut six mois.

Quelle est la durée moyenne de traitement d'un dossier ?


Une demande d'information, c'est environ six minutes. Une réclamation, c'est une heure. Mais cela varie dans des proportions importantes. Nous disons : "Toutes les heures, vous avez fini un dossier". Bien entendu, ce n'est pas une heure en continu. C'est une heure qui peut s'égrener sur sept jours puisque notre contrat de satisfaction client est de répondre en sept jours maximum.

Combien de clients sont renseignés dans votre base de données ?


Nous disposons de quelque 900 000 clients renseignés dans notre base. Ce sont ceux qui sont venus vers nous et pour qui nous avons constitué un dossier. Mais nous sommes capables d'avoir en ligne les 6 millions de possesseurs de véhicules Renault de moins de dix ans. Nous créons un dossier pour chaque demande d'informations ou de réclamations. Pour celles-ci, nous créons ensuite les activités : appels sortants, courriers, mails sortants.

Le réseau a-t-il accès aux dossiers ?


Non. Nous leur envoyons des éléments du dossier via Internet. Ils leur permettent de relancer le client. Nous ne leur avons pas donné accès à la base de données. En revanche, ils disposeront prochainement du CRM avec des informations de trois types : les stocks, les prospects chauds et les informations sur l'histoire du client.

En quoi, vos services sont-ils complémentaires du réseau ?


Nous avons la vision transversale des sujets. Nous analysons le client sous tous les aspects. C'est-à-dire, à la fois l'achat du véhicule, la fidélité à la marque, la fidélité au réseau, l'après-vente, etc. Nous avons aussi un système d'information qui nous donne accès à la vie du véhicule. Nous disposons également d'un budget de fidélisation. Et puis, nous redescendons l'information au réseau par des contacts documentés dans lesquels existent des opportunités de vente. Ces contacts sont prisés par le réseau. Ils donnent souvent lieu à une vente. Par notre intermédiaire, nous dédramatisons les situations difficiles. C'est là où nous avons une réelle complémentarité.

En quoi consiste votre budget fidélisation et quel en est le montant ?


C'est un budget annuel qui n'est pas négligeable. Il sert à faire des gestes commerciaux, des cadeaux aux clients qui rencontrent de petits soucis avec leur véhicule ou la marque. En fait, il est de trois ordres. D'abord, les cadeaux clients qui sont des petits montants de remboursement. Deuxièmement, des remises commerciales. Enfin, des interventions gratuites sur un véhicule en cours de vie. Comme, par exemple, des révisions. Le montant du budget est lié au nombre de réclamations que nous recevons. Il est déterminé en début d'année. C'est pourquoi, il n'est pas réellement figé.

Diriez-vous de votre service clients qu'il est un centre de coûts ou un centre de profit ?


Vu du contrôle de gestion, c'est un centre de coûts. Mais nous travaillons activement pour qu'il devienne un centre de profit. J'ai une autre formule qui est : "Comment passer de la mine de sel à la mine d'or ?". Il deviendra un centre de profit le jour où nous ferons des appels sortants pour vendre.

Est-ce prévu ?


Oui, c'est prévu. Mais nous y allons doucement parce que nous n'avons pas la prétention de nous substituer au réseau. Nous pensons qu'avec notre base de données, nous pouvons contacter des clients au vu des événements qui leur sont arrivés. Notre ambition à terme est d'être en mode pro-actif et pas en mode réactif.

Mais est-ce suffisant pour devenir un centre de profit ?


Oui, parce qu'à l'occasion d'un appel, nous pourrons proposer, par exemple, des services, des crédits, de l'entretien, des réparations. Des choses qui ne sont pas faites pour le moment.

Peugeot a fait le choix d'une plate-forme paneuropéenne. Pourquoi avoir choisi des implantations locales ?


En tout cas, pas pour la difficulté de la langue. Mais plus pour la connaissance du pays et du réseau. C'est la complexité de la structure du réseau dans chaque pays, de la législation, des produits... qui nous a conduit à nous spécialiser. Et nous ne le regrettons pas. Nous ne nous disons pas que nous allons changer.

En un mot, comment qualifieriez-vous le service clientèle de Renault ?


Convivial. Ce que j'essaie de faire régner ici, c'est la convivialité. Nous cherchons la diversité dans les profils parce que les clients sont différents. Il ne faut pas imaginer qu'ils sont tous pareils. Ils sont tous un. En général, lorsque l'on est convivial, on arrive à faire du commerce.

Biographie


En juin prochain, Noël Ferre fêtera ses 30 ans d'ancienneté chez Renault. En 1973, après des études commerciales et de gestion, il intègre la direction après-vente du constructeur automobile où il occupe durant dix ans le poste de responsable d'organisation réseaux, de méthodes de suivi des incidents et du centre de formation technique commerciale. Il rejoint par la suite la direction commerciale France où il prend en charge les stratégies réseaux. En 1990, il devient responsable des actions clients au sein du service marketing France. Cinq ans plus tard, il prend la tête du projet CRM de Renault. Enfin, en 1999, il devient chef du service relation client.

L'équipement du service relation client France


L'équipement du service clients de Renault est réduit à son plus simple appareil. Il comprend un PABX Alcatel 4400 pour gérer la téléphonie et un outil de gestion de la relation client Siebel. Les options CTI, Workflow, ne sont pas intégrées. Un SVI existe, mais il n'est utilisé que lors de pointes de trafic. Le partenaire Arvato dispose du même outil de CRM, mais reçoit les appels sur un PABX Lucent.

Nicolas Seguin

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