Malentendants: comment Canal+ a anticipé les nouvelles réglementations?
Publié par Clément Fages le - mis à jour à
Dans le cadre de la loi pour une République numérique, les services clients du secteur privé auront deux ans pour se rendre accessibles aux sourds-muets et malentendants. Grâce à son partenariat avec Sourdline, Canal+ est en conformité depuis 2011 et a fait de cette contrainte une opportunité.
La loi pour une République numérique stipule que le secteur privé doit garantir dans les deux ans l'accès des "utilisateurs finals sourds, malentendants, sourdaveugles et aphasiques" à un moyen de traduction pour leur service client. Une opportunité pour des startups comme Deafi ou Sourdline, qui gèrent des plateformes de traduction à destination de ces publics. Ces services concernent 7% de la population française, soit 5 millions de personnes.
3000 interactions par an pour Canal+
Les entreprises peuvent former les conseillers Sourdline et donner accès à leurs outils CRM, ou faire appel à eux comme interprètes. Le service collabore ainsi avec Canal+ depuis 2011 et prend en charge près de 3000 interactions par an, dont la moitié de façon totalement autonome. 60% des échanges se font en langue des signes via webcam, le reste par tchat.
"En 32 ans d'existence, Canal+ a toujours été confronté à la problématique de l'audiovisuel pour les clients sourds. Le sous-titrage de nos programmes nous coûte 2 millions d'euros par an" expliquait Emmanuel Turounet, directeur des services clients du groupe lors d'une conférence organisée par Relation Client magazine.
Selon lui, les quelques dizaines de milliers d'euros dépensés pour ces 3000 interactions pourraient déplaire à un directeur financier mais pas à un directeur des ressources humaines : "Cela nous permet d'embaucher des personnes en situation de handicap, précisément six, dont trois conseillers." Et ainsi respecter les quotas fixés par la loi.
Une nouvelle opportunité de fidélisation
Les chiffres sont sensiblement les mêmes chez les autres partenaires de Sourdline : l'assureur Macif, qui utilise les services d'interprètes, ne se charge que de 3000 contacts par an. Les conseillers de la start-up gèrent directement 1000 contacts annuels pour Vente-privee.com et ont traduit près de 5000 appels pour le compte de La Redoute, l'un des plus récents clients de Sourdline.
Au-delà de la satisfaction générée chez ces clients par un service qui tient compte de leur handicap, les marques ont aussi la possibilité de fidéliser et de faire découvrir plus facilement leurs offres, Sourdline s'occupant de traduire et diffuser leurs campagnes de communication.
Mais l'entreprise n'est pas la seule à innover dans le secteur : son concurrent Daefi a lancé en 2015 une application mobile qui offre le même service par tchat et webcam. Le choix de la mobilité devrait s'avérer payant, puisqu'il suffit à un vendeur ou un conseiller en agence d'avoir un smartphone ou une tablette pour être en conformité avec la loi.