Pour gérer vos consentements :

"La maturité des chatbots ira de pair avec leur hyperspécialisation", Arnaud de Lacoste (Acticall)

Publié par Stéphanie Marius le - mis à jour à

Arnaud de Lacoste, cofondateur du groupe Acticall-Sitel et auteur de l'ouvrage "Le Seigneur des Robots", revient sur les exigences et les promesses de l'intelligence artificielle et, en particulier, des chatbots, au sein des centres de contacts.

Les chatbots conversationnels et autres solutions fonctionnant grâce à l'intelligence artificielle proposent-ils une véritable IA ou est-on encore le plus souvent cantonnés à la reconnaissance de mots-clés?

Les solutions à base d'intelligence artificielle vendues par 95% des prestataires ne contiennent en réalité par d'IA ! Il s'agit d'un buzzword, brandi lors des levées de fonds ou des ventes.

Nous voyons se développer beaucoup de solutions de RPA (robotic process automation), assez anciennes. Lorsqu'un conseiller doit réaliser 20 clics pour une action, ces outils le font pour lui. Il s'agit d'une technologie mature, utile, qui devrait être généralisée encore davantage.

En ce qui concerne la compréhension du langage et la réponse automatisée, les solutions qui fonctionnent sont hyper-verticalisées. Cela nécessite d'entraîner une IA sur un secteur d'activité et un vocabulaire spécifique, lié à un client et nourri grâce au CRM de la marque. Cette procédure commence à produire des résultats intéressants mais oblige à mettre un ensemble d'algorithmes au service d'une micro-activité. La maturité de ce secteur accompagnera son hyperspécialisation. Nous sommes très loin d'une approche horizontale (transmétiers, transentreprises).

Les algorithmes n'ont quasiment pas changé depuis une cinquantaine d'années. Les modifications concernent la quantité de données collectées en permanence et le prix du stockage. Pour 1000 dollars par mois, une start-up a accès au même espace de stockage que pour 20 millions il y a dix ans. Enfin, la puissance de calcul a été multipliée dans des proportions gigantesques.

  • Dans quelle mesure l'ultra-ciblage des clients grâce à l'analyse de data a-t-il modifié la relation client post-achat, puisque l'offre est désormais taillée sur mesure?
  • Nous en sommes encore aux balbutiements : peu de marques ont déjà réussi à mettre en place des programmes ultra-personnalisés. La data est utilisée davantage en post-achat. De grands pans d'amélioration sont à effectuer en amont de l'achat. L'enjeu de reconnaissance est pourtant majeur. En effet, une marque comme Accor en fait son cheval de bataille pour demain et dope sa production de service à la connaissance.

  • Les services de messagerie instantanée comme Messenger ou WhatsApp laissent ouvert un canal de contact permanent avec le client. Comment les entreprises peuvent-elles en tirer profit?
  • La France a basculé massivement des SMS aux messageries sociales instantanées. Tous les mois, le nombre d'utilisateurs actif de ces services augmente. Les messageries permettent d'interagir avec les clients de manière immédiate, avec des contenus riches (image, vidéo, liens) et s'adaptent à la communication des entreprises. Ainsi, il y a quelques années, Messenger a ouvert, sous l'impulsion de David Marcus, ce canal aux marques, notamment Voyages-sncf en France.

    Cela permet de dépolluer le mur de Facebook, seul moyen pour les consommateurs d'interagir avec une marque jusque-là. Le canal Messenger est éminemment conversationnel.

    WhatsApp, qui était resté en retrait ces dernières années, a récemment annoncé la création d'un WhatsApp " marques ", mettant en relation un professionnel en point de vente avec un client. Il s'agit d'un canal riche, de proximité, à mi-chemin entre un timing synchrone et asynchrone, dont le temps de réponse s'élève à 15 ou 30 minutes. La plateforme permet aux deux parties de conserver le flux d'échanges, un élément qui manquait au canal téléphonique. Les usages privés, professionnels et liés aux marques coexistent désormais pour les consommateurs.

    Attention cependant, WhatsApp et Messenger sont majoritairement dédiés à l'assistance. Des " push " peuvent être envisagés mais la marque dot maîtriser l'art du contexte et apporter une valeur ajoutée immédiate au consommateur. Ces canaux apparaissent donc encore plus exigeants que les autres en raison de leur caractère intrusif. Les marques qui utiliseront ces voies de manière industrialisée et non personnalisée s'exposent à des retours de bâton très violents.

  • Comment sont gérés les échanges par messagerie dans les centres de contacts?
  • Chez Acticall-Sitel, la messagerie est intégrée à nos outils de gestion de tchat. Ainsi, la plateforme Dimelo, pour laquelle nous travaillons beaucoup, ou notre outil Novagile intègrent ce canal en natif. La seule différence tient au fait que ce média est relativement stockable, il est donc possible de mettre en attente un client durant quelques instants et de répartir plus aisément la charge de travail au sein des centres.

    Biographie:

    Arnaud de Lacoste est directeur général du groupe Acticall Sitel, cofondé en 1994 et devenu l'un des leaders mondiaux de l'expérience client, avec 76000 salariés dans 23 pays. Dans ses fonctions à la tête du groupe, Arnaud de Lacoste conduit les nouvelles stratégies de transformation et de digitalisation de l'expérience client.

    L'ouvrage:
    Le Seigneur des robots, publié aux éditions Débats Publics, septembre 2017, 152 pages, 18 euros.






    La rédaction vous recommande