La CGT s'interroge sur le modèle social du homeshoring
Publié par Claire Morel le
Pour ses journées d'étude, la CGT centres d'appels a choisi, cette année, pour thème le homeshoring. Les élus du syndicat ont pointé du doigt les risques et limites de la formule.
«En homeshoring, les principes de management et le niveau d’exigence sont les mêmes qu’en centre d’appels. Ce qui change, c’est que le superviseur est à distance, et ne peut donc pas répondre de façon immédiate aux demandes des salariés.» Pour Xavier Burot, secrétaire fédéral de la CGT centres d’appels, le homeshoring – cette formule dans laquelle un téléconseiller est équipé pour travailler de chez lui – revêt, au fond, bien des inconvénients sur le plan social. Après avoir débattu du sujet à l’occasion de ses journées d’étude annuelles, les 23 et 24 novembre derniers, le syndicat a mis en avant un certain nombre de difficultés posées par ce système, en plein essor aux États-Unis et en Grande-Bretagne, et qui fait actuellement ses premiers pas en France. Télétravail vs homeshoring, quelles différences en termes de statut? Comment définir la frontière entre vie privée et vie professionnelle quand on travaille de chez soi? Autant de questions auxquelles les élus de la CGT centre d’appels ont essayé de répondre.
«Quelle doit être la réaction d’un téléconseiller lorsque le facteur sonne chez lui, par exemple?», s’est interrogé un participant. Le cas pourrait paraître anecdotique… Mais selon Jacques Breitenstein, du cabinet d’expertise comptable Apex, qui a réalisé une étude sur le sujet, «les plages horaires étant définies, le fait de désactiver son poste de travail pour aller ouvrir la porte au facteur pourrait être considéré comme un abandon de poste. De même qu’un téléconseiller en centre d’appels qui quitterait son poste en dehors de ses pauses.»
L’assemblée a également évoqué le manque de sociabilisation des salariés et la différence de management lié au travail à domicile. «Comment acquérir des compétences sans les autres et comment s’étalonner en étant seul chez soi?», a lancé Xavier Burot.
Ces deux journées ont aussi donné la parole à des dirigeants de centres de contact qui expérimentent le homeshoring, dont la société Wehhelp, représentée par son coprésident, Frédéric Jousset. Or, chez Webhelp, sur les 15 salariés ayant démarré l’expérience il y a deux ans, cinq auraient abandonné la formule car elle ne répondait pas à leurs attentes et n’apportait pas plus d’avantages. «Toutefois, d’autres salariés se sont portés volontaires», a souligné Christophe Guesnon, délégué syndical CGT et salarié de Webhelp, qui a ajouté que «certaines personnes choisissent le télétravail pensant y trouver un confort de vie ou pour fuir de mauvaises conditions de travail, mais se retrouvent avec d’autres inconvénients qu’ils n’avaient pas imaginés, comme la perte de la dimension collective du travail, mais aussi le fait de devoir imposer à leur famille de limiter le bruit dans l’appartement lorsqu’ils travaillent.»
En France, le home shoring, apparu en 2005 avec la création d'Easycare, concerne, actuellement, quelques 3000 salariés. A titre de comparaison, 300 000 personnes travaillent selon ce modèle aux Etats-Unis.