[Tribune] Pas d'émotions sans attentions
Publié par Florence Desert, administratrice de l'AFRC et directrice culture client chez Air France le - mis à jour à
Alors que les entreprises repensent actuellement leur stratégie relationnelle, un des enjeux forts consiste à développer la culture client au sein de l'organisation d'une entreprise, en partant du comex aux collaborateurs front line, en passant par les fonctions supports.
Chez Air France, nous avons choisi de nous positionner sur une notion forte et engageante : la relation attentionnée. Il s'agit de traduire le lien, la façon dont nos collaborateurs vont au-devant de nos clients. Une de nos valeurs, l'attention, est le socle de ce positionnement qui s'inscrit dans la stratégie plus large d'Air France d'atteindre l'excellence en matière de "customer intimacy".
La relation attentionnée entre également dans les pratiques managériales et le parcours salarié, car ce qui est bon pour le client doit l'être pour les salariés - la réciproque étant d'ailleurs ici avérée. À l'issue de nos recherches, nous avons structuré notre action en matière d'expérience client sur cinq attitudes : personnaliser, valoriser, porter attention, avoir le sens du détail et oser. Ces cinq attitudes se retrouvent dans chaque métier, qu'ils soient ou non au contact du client. Ces postures s'expriment dans des signatures de services - c'est-à-dire dans des façons de créer du lien à chaque moment de vérité (achat de billets en famille, accueil des clients dans l'aéroport ou à bord de nos avions, etc.).
Ne pas s'inscrire dans un standard
L'objectif est que le client comprenne qu'il est à Air France et nulle part ailleurs. Ce ne sont en aucun cas des scripts car l'état d'esprit que nous avons voulu créer, c'est aussi un esprit bien français qui, quand il est bienveillant et tourné vers l'autre, ne s'inscrit jamais dans un standard prédéfini, mais est également une relation pleine de surprise, gentiment impertinente, jamais vulgaire et toujours juste. Ce n'est pas facile, mais quand c'est bien réalisé, c'est si difficile à copier!
Il semblerait que, dans le cadre des stratégies d'expérience client développées par les organisations, l'émotion -quand elle est positive évidemment- est essentielle à la réussite. De sa racine latine, movere, elle exprime la mise en mouvement, l'élan du coeur et donc le rapprochement du client vers le collaborateur, vers la marque. C'est aussi simple que cela. Sans émotion, un service peut tout de même créer de la satisfaction, mais en aucun cas un attachement. L'émotion positive n'engendre pas les clients neutres, mais les promoteurs du NPS que les entreprises recherchent activement!
En janvier dernier, nous avons accompagné l'AFRCet sa délégation pour assister au Consumer Electronics Show (CES) de Las Vegas. Si nous avons été fiers de voir que la France des start-up avait autant investi le terrain, j'ai remarqué que quelques grands groupes français se sont particulièrement illustrés -à l'image du Groupe La Poste. Futur vecteur de l'émotion, la voix y a d'ailleurs été omniprésente- par le biais par exemple des enceintes connectées qui deviennent une commande forte. Alors certes, l'émotion pourra mieux passer par la voix que par du contenu, mais est-ce ici la relation client de demain ? Certes, on pourra donner des personnalités aux "voix" des marques, mais où va demain se nicher la vraie émotion? C'est le chantier qui nous attend car je reste persuadée que sans émotion véritable, nos marques ne parviendront plus à se différencier.