"Pousser la porte d'un magasin de luxe reste une expérience multisensorielle"
Publié par Marie-Juliette Levin le - mis à jour à
Même si le point de vente reste un canal indispensable dans l'univers du luxe, Nathalie Lemonnier, fondatrice de Lemon Think, cabinet conseil en relation client, estime que les nouvelles technologies permettent de se rapprocher de l'expérience client en magasin.
En quoi le digital a t-il bouleversé les codes de la relation client dans l'univers du luxe ?
L'arrivée d'Internet a sans conteste modifié la relation client. Le parcours client n'est plus le même car le consommateur est aujourd'hui plus mature que les marques. Il va plus vite, évolue avec son environnement et s'approprie les outils digitaux. Le digital est un atout pour les marques de luxe. Un site de marque ou un blog spécialisé constitue un superbe écrin pour magnifier les valeurs de la marque à travers du storytelling, du brand content, de l'expérience utilisateur.
Mais rien ne remplacera l'expérience unique en boutique ?
Oui, pousser la porte d'un magasin de luxe reste une expérience multisensorielle, un instant plaisir inimitable. Un parfum se respire, une pièce de maroquinerie se touche, du prêt-à-porter s'essaye... Pour autant, les nouvelles technologies sur le Web et notamment la réalité augmentée permettent de s'approcher de l'expérience vécue en point de vente. Certaines marques l'ont testé. Une marque de meuble haut de gamme a proposé aux internautes d'essayer des meubles chez eux, en situation, grâce à un logiciel de réalité augmentée. L'essayage de montres ou de bagues de luxe à domicile se pratique également. Mais il faut avoir une certaine maturité pour cela. Disons que le Web est devenu une étape incontournable dans le parcours d'achat.
Quelles sont les tendances en matière de relation client pour les marques de luxe ?
On voit apparaître des services de conciergerie en ligne pour améliorer le parcours d'achat de l'internaute. Grâce au call back, un responsable du service client prend la main sur l'ordinateur et pousse les informations que le client recherche. Par ailleurs, le tchat en temps réel est privilégié par les marques de luxe plutôt que d'installer un agent conversationnel un peu figé sur le site.
Comment les marques gèrent-elles leur relation client à l'international ?
Il faut d'abord mettre fin à une idée reçue selon laquelle la clientèle internationale consomme dans le monde entier. Les clients du luxe consomment avant tout dans leur pays. Pour autant, une maison de luxe doit faire partager ses codes à l'international et s'adapter aux attentes de chaque client et aux coutumes de chaque pays. Ainsi, concernant le marché des cosmétiques, les attentes en termes de soins sont différentes au Japon ou aux États-Unis. La façon de s'adresser au client n'est pas la même en boutique et sur les plateformes ou les réseaux sociaux. Au Japon, on affiche les produits de luxe de façon ostentatoire, en Europe, on est plus discret. Pour se distinguer, dans un contexte où le luxe s'est démocratisé, les consommateurs, en France notamment, recherche des produits plus sobres. Un plaisir plus intime.
Quelle est votre dernière expérience marquante en point de vente ?
Je suis allée à Shangai dans une boutique de la marque Shang Xia (appartenant au groupe Hermès) qui propose du prêt-à-porter, des bijoux, du mobilier et des arts de la table issus de l'artisanat chinois. C'est un écrin avec une architecture très épurée. Les vendeurs, passionnés par les produits, vous offrent le thé dès votre arrivée. C'est une expérience unique. Mais, patience, le "Hermès made in China" arrive à Paris en 2013...
Interview extraite de l'enquête "Luxe : les nouveaux codes de la relation client" - Relation Client 103 (avril-mail-juin)