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They serve like we lead

Publié par La rédaction le
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Au moment d'entamer ma première contribution pour Relation Client Magazine, me revient à l'esprit cette phrase de John Sainsbury, fondateur de la chaîne éponyme de supermarchés britanniques, et que je cite souvent dans mes conférences : «They serve like we lead. » La langue de Shakespeare étant plus performante et compacte que celle de Molière, cela donne : «Nos collaborateurs servent nos clients de la même façon que nous les dirigeons».

Si je reviens sur cette idée, c'est que l'actualité récente a éclairé ce message d'un angle tout à fait intéressant. En effet, comme client, je me suis souvent étonné de l'irrégularité du service offert aux clients et abonnés d'Orange, la marque emblématique du feuron français des télécoms. Les drames qui ont défrayé récemment la chronique, et qui ont fait battre à France Télécom des records de citations dans les médias, m'ont au moins permis de mieux comprendre les raisons d'un tel phénomène. En effet, qu'apprend-on à la lecture des innombrables articles consacrés au drame des suicides chez l'opérateur historique ? Dans cette entreprise où l'on organise des séminaires de cadres pour leur apprendre à «travailler au corps les équipes pour en faire partir le plus possible» et où «un bon employé est un employé qui s'en va», les langues se délient et les salariés avouent que «pour nous faire plier, ils menacent de nous envoyer en boutique ou au 10-14». Dès lors, comment s'étonner qu'un technicien qui n'a jamais été formé à la communication ou au traitement des réclamations ne soit pas à l'aise avec des clients mécontents qui appellent à une cadence infernale ? Quel carnage ! Sans compter ceux qui sont bourrés d'anxiolytiques et qui tentent de survivre dans une entreprise où l'absentéisme atteint une moyenne de quatre semaines par salarié et par an. Le summum est atteint lorsqu'un salarié constate : «Les managers ne sont plus là pour nous aider mais pour traquer nos failles et nous mettre de mauvaises évaluations». Ils ne sont pas performants en termes de service clients ? Mais qui leur en voudrait ? Quel client oserait, connaissant un tel contexte, exiger quoi que ce soit ? D'ailleurs, cela ne m'étonnerait pas que les indicateurs de satisfaction soient orientés à la hausse tant les Français ont éprouvé de la sympathie et se sont parfois identifiés à ces pauvres salariés maltraités et déboussolés.

C'est aussi à la citation de M. Sainsbury que je pense en assistant à la remise des prix aux lauréats du «Service client de l'année 2010», organisée pour la troisième année par la sympathique équipe de Viséo Conseil, dirigée par Ludovic Nodier. Fin octobre, nous sommes près de 700 personnes rassemblées dans l'ambiance festive d'une boîte à la mode. Dans la salle, des dirigeants et des responsables, mais aussi et surtout des centaines de jeunes qui travaillent au quotidien dans les services clients des entreprises lauréates. Leur présence s'explique par le fait que les patrons des services clients (presque aussi jeunes que leurs collaborateurs) venus récupérer leur trophée en profitent pour remercier et récompenser ceux qui leur ont permis de gagner. Leur joie d'avoir gagné était communicative et sincère : dans une période de doute et de pessimisme généralisé, cela faisait plaisir à voir. Aucun d'entre eux n'avait été «ni puni ni forcé» de travailler dans une plateforme d'accueil téléphonique ni même «condamné» à aider des clients. Ces jeunes-là ont compris que les emplois de demain se trouveront bel et bien dans l'aide et l'assistance au client, un métier qu'il est plus difficile et moins rentable de délocaliser à l'autre bout de la planète.

@ Bruno Delessard

Vous avez raison, M. Sainsbury : «They serve like we lead » ! Dis-moi comment tu traites tes collaborateurs et je te dirai comment ils traiteront à leur tour tes clients. Certaines entreprises qui ont oublié cette vérité risquent de le payer fort cher. Et pour toutes celles qui veulent avoir des clients heureux, il n'est peut-être pas trop tard pour bien faire.

RALPH HABABOU
Directeur général de PB RH Conseil - L'Etat d'Esprit Service

Diplômé de l'Essec (1982), Ralph Hababou a démarré sa vie professionnelle chez IBM. Son premier livre, Service compris (1986), s'est vendu à plus de 500 000 exemplaires. En 1987, il crée, avec Philippe Bloch, son coauteur, PB RH Conseil. En 1991, les deux associés publient Dinosaures & Caméléons (Ed. J.-C. Lattès). En 1994, ils introduisent en France le concept d'espresso bar et créent Columbus Café, enseigne revendue en 2004. Après avoir racheté 100 % de PB RH Conseil début 2005, Ralph Hababou écrit Service gagnant - Les secrets des entreprises qui créent la différence (Editions First) en 2007, puis en 2009, Génération W- Web, Woman, Weather - La révolution est en marche (Ed. First). www.pbrhconseil.com et www.generationw.fr

La rédaction

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