Loi sur l'accessibilité: de la contrainte à l'opportunité
Aujourd'hui, 5 millions de personnes vivant en France ont une déficience. Le 10 janvier 2011, l'association Enseigne et Innovation organisait, à Paris, devant plusieurs dizaines d'entreprises, une soirée «Loi du 11 février 2005». A cette occasion, Marie Prost-Coletta, déléguée ministérielle à l'accessibilité, a insisté sur le caractère obligatoire et «non négociable» du texte, et ses enjeux pour l'accessibilité. La plus grande autonomie possible à l'acte d'acheter pour les personnes handicapées n'est pas une option A tel point que, dès 2015, une enseigne ne respectant pas cette obligation pourra être sanctionnée pour non-respect des règles d'accessibilité assortie de sanctions pénales (article L. 152-4 du code de la construction et de l'habitation) et/ou délit de discrimination en raison du handicap (Articles 225-1 à 225-4 du code pénal). Evidemment, tout le monde n'a pas la même perception du handicap. Il existe deux grandes catégories d'entreprises.
Certaines entreprises voient dans cette loi une contrainte supplémentaire, sans en imaginer la valeur ajoutée pour leur business à l'avenir. Le handicap, c'est alors un aménagement particulier. Celui-ci est utilisé pour avoir un permis de construire en permettant à un usager en fauteuil roulant d'accéder au lieu de vente. On dessine une rampe, si possible par une entrée «bis» du magasin, on la construit et le tour est joué... Ces entreprises-là vous diront d'ailleurs qu'elles respectent la loi depuis toujours, mais que vu le petit nombre de personnes handicapées entrant dans leur établissement, la rampe... c'est déjà pas mal. Pour elles, le handicap n'est qu'une déficience physique. Et parmi ces déficiences, une seule - la mobilité - est prise compte. Ces entreprises ont une conception extrêmement contraignante de la loi. Et une vision très court-termiste: faute d'avoir pris conscience à temps du caractère obligatoire de la loi et de ses enjeux sociétaux, elles devront bâtir de nouveaux magasins... et, au final, cette option leur coûtera plus cher. C'est d'autant plus vrai que les Français vivent de plus en plus longtemps et que ne pas aménager son point de vente pour cette clientèle à fort pouvoir d'achat représentera un manque à gagner indéniable. La seconde catégorie d'entreprises a bien conscience de la nécessité de cette loi. Elles la hissent au rang d'avantage concurrentiel. Ces dernières ont probablement raison... sur le moyen, mais surtout sur le long terme. Pour ces entreprises-là, le handicap ne se résume pas à une personne en fauteuil roulant: elles pensent à tous les individus (personnes âgées, femmes enceintes, etc.) qui éprouvent une difficulté particulière à se mouvoir. Bref, aux individus qui, à un moment de leur vie ou de manière définitive, ne peuvent accéder aux services et produits de l'enseigne de manière aussi aisée que les individus disposant de toutes leurs facultés. Pour ces entreprises, la loi représente une opportunité qu'il faut savoir transformer. Elles ont déjà une véritable politique d'accessibilité et construisent durablement.
Aujourd'hui, le produit ne suffit plus à créer une différence propre à attirer le consommateur, ni même à le fidéliser. Toutes les actions permettant au consommateur de se retrouver dans un univers proche de ses valeurs deviendront un facteur d'efficacité de la vente. Et de notoriété.
Rendre les magasins, neufs ou existants, accessibles à tous, offrir plus de confort d'achat à tous, sans distinction, c'est une obligation. C'est aussi une vraie opportunité de faire la différence. Aux enseignes de s'en saisir.
NOEL THORIN, p-dg de Norma Concept,
entreprise créée en août 2009 et spécialisée dans la mise aux normes des enseignes à points de vente multiple.